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soudre dans un dissolvant, que d’autres métaux qui y sont pourtant déja dissouts ; c’est ainsi que si de l’argent a été dissout par de l’esprit de nitre, en trempant du cuivre dans cette dissolution, le dissolvant quitte l’argent pour s’unir avec le cuivre ; & alors on-dit qu’un métal en a dégagé un autre. Voyez Dissolvant & Précipitation.

La plûpart des métaux & des demi-métaux ont la proprieté de s’unir ou de s’amalgamer avec le mercure, mais cette union ne se fait point avec autant de facilité pour tous, & il y en a qui n’ont aucune disposition à s’amalgamer. Voyez Mercure.

L’action du feu dilate tous les métaux, & leur fait occuper plus d’espace qu’ils n’en occupoient auparavant, lorsqu’ils étoient froids. La chaleur de l’atmosphere suffit aussi pour dilater les métaux, mais cette dilatation est plus insensible.

A l’exception de l’or & de l’argent, le feu fait perdre à tous les métaux leur éclat & leur forme metallique, il les change en une espece de terre ou de cendre que l’on nomme chaux métallique ; par cette calcination, ils perdent leur liaison, ils changent & augmentent de poids ; le plomb, par exemple, devient de la nature du verre ; ils changent de couleur ; ils sont rendus moins fusibles ; ils ne sont plus sonores ; ils ne sont plus en état de s’unir avec le mercure. Ces changemens s’operent plus ou moins promptement sur les différens métaux, mais on peut toujours rendre à ces cendres ou chaux leur premiere forme metallique, en leur joignant une matiere grasse ou inflammable, & en les exposant de nouveau à l’action du feu. Voyez l’article Réduction. Les chaux des métaux jointes avec la fritte, c’est-à-dire, avec la matiere dont on fait le verre, la colore diversement, suivant la couleur propre à chaque metal. Voyez Émail & Verrerie.

En fondant au feu les métaux, plusieurs s’unissent les uns aux autres, & forment ce qu’on appelle des alliages métalliques, c’est ainsi que l’or s’unit ou s’allie avec l’argent & avec le cuivre ; d’autres ne s’unissent point du tout par la fusion ; tels sont le fer & le plomb. Il y a aussi des métaux qui s’unissent avec les demi-métaux ; c’est ainsi que, par exemple, le cuivre s’unit avec le zinc, & forme le cuivre jaune ou laiton. Les métaux alliés par la fusion n’occupent point le même espace, qu’ils occupoient chacun pris séparement : il y en a dont le volume augmente par l’alliage, & d’autre, dont le volume diminue. D’où l’on voit, que le fameux probleme d’Archimede, pour connoître l’alliage de la couronne d’Hiéron, étoit fondé sur une supposition entierement fausse. Il en est de même des alliages des métaux avec les demi-métaux. Voyez la métallurgie de M. Cellert, tom. I. de la traduction françoise.

La balance hydrostatique ne peut point non plus faire connoître exactement la pesanteur specifique des métaux. Aussi, voit-on, que jamais deux hommes n’ont été parfaitement d’accord sur la pesanteur d’un métal : ces variations viennent, 1°. du plus ou du moins de pureté du métal que l’on a examiné ; 2°. du plus ou du moins de pureté de l’eau que l’on a employée pour l’experience ; 3°. des différens degrés de chaleur de l’atmosphere qui influent considérablement sur les liquides, sans produire des effets si marqués sur des corps solides, tels que les métaux.

Telles sont les proprietés génerales qui conviennent à tous les métaux : on trouvera à l’article de chaque métal en particulier, les caracteres qui lui sont propres & qui le distinguent des autres. Voyez Or, Argent, Fer, Plomb, &c.

Les sentimens des anciens Alchimistes & des Physiciens speculatifs, qui ont voulu raisonner sur la nature des métaux, ont été très-vagues & très-obs-

curs ; ils regardoient le sel, le soufre & le mercure,

comme les élémens des métaux ; ce système subsista jusqu’à ce que Beccher eût fait voir, que ces trois prétendus principes sont eux-mêmes des corps composés, & par conséquent ne peuvent point être regardés comme des élémens ; d’après ces reflexions, ce celebre chimiste regarde les métaux, ainsi que tous les corps de la nature, comme composés de trois substances qu’il appelle terres. La premiere de ces terres est la terre saline ou vitrescible ; la seconde est la terre grasse ou inflammable ; & la troisieme, est la terre mercurielle ou volatile. Suivant lui, ces trois terres entrent dans la composition de tous les métaux, & c’est de leur combinaison plus ou moins exacte & parfaite, que dépend la perfection des métaux, & leur difference ne vient que de ce que l’un de ces principes domine sur tous les autres, & des différentes proportions suivant lesquelles ils se trouvent combinés dans les métaux. Quoiqu’il soit très-difficile d’analyser les métaux, au point de faire voir ces trois principes distincts & séparés les uns des autres, Beccher s’efforce de prouver leur existence par des raisonnemens, & par des expériences qui doivent encore avoir plus de poids.

1°. Il prouve l’existence d’une terre vitrescible, par la propriété que tous les métaux, à l’exception de l’or & de l’argent, ont de se calciner au feu, c’est-à-dire, de se changer en une terre ou cendre, qui, exposée à un feu convenable, se convertit en un verre. Selon ce même auteur, cette terre vitrescible se trouve dans le caillou, dans le quartz, & c’est à elle que les sels alkalis doivent la proprieté qu’ils ont de se vitrifier.

2°. Le second principe constituant des métaux est, suivant Beccher, la terre onctueuse ou inflammable ; elle corrige & tempere la siccité de la terre vitrescible, elle sert à lui donner de la raison, & par cette terre, il a voulu désigner ce que l’on appelle le principe inflammable ou le phlogistique des métaux, dont on ne peut nier l’existence.

3°. Enfin, Beccher admet un troisieme principe constituant des métaux, qu’il appelle la terre mercurielle ; c’est cette derniere qu’il regarde comme la plus essentielle aux métaux, & qui leur donne la forme metallique. En effet, les deux principes ou terres qui précedent sont communs aux pierres, aux végetaux, &c. mais, selon lui, c’est la terre mercurielle, qui étant jointe avec les deux autres, donne aux métaux la ductilité qui leur est propre & qui les met dans l’état métallique, ou la métallicité.

Telle est la théorie de Beccher, sur la nature des métaux, depuis elle a été adoptée, modifiée & expliquée par Stahl & par la plûpart des Chimistes ; il paroît néanmoins qu’il sera toujours très-difficile d’établir rien de certain sur une matiere aussi obscure que celle qui s’occupe des élemens des corps ; sur-tout si l’on considere que les parties simples & élementaires échappent toujours à nos sens, qui sont pourtant les seuls moyens que la nature fournisse pour juger des êtres physiques.

Cela posé, il n’est point surprenant que les sentimens des Naturalistes soient si variés sur la formation des métaux ; c’est encore une de ces questions que la nature semble avoir abandonnées aux spéculations & aux systèmes des Physiciens. Il y a deux sentimens géneraux sur cette formation ; les uns prétendent que les métaux se forment encore journellement dans le sein de notre globe, & que c’est par la différente élaboration & combinaison de leurs molécules élémentaires qu’ils sont produits ; on prétend de plus, que ces molécules sont susceptibles d’être mûries & perfectionnées, & que par cette maturation, des substances métalliques, qui dans leur origine étoient imparfaites, acquierent