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dération, et cætera, et cætera ? Voilà à peu près à quoi se réduit l’observation d’Uranie. Les lumières sont un bien dont on peut abuser, sans doute. L’ignorance et la stupidité, compagnes de l’injustice, de l’erreur et de la superstition, sont toujours des maux.

Je ne crois pas avoir traité l’article de M. Vialet légèrement. J’avais comparé ce qu’on appelle des faveurs avec la vie d’un homme de bien qu’on avait compromise par une conduite indiscrète, et j’avais prononcé qu’à mes yeux ces choses n’étaient pas d’un prix à comparer ; et je persiste.

M. l’ambassadeur[1] vient d’en user un peu durement avec moi. Il me demande un mot sur les tableaux : je vais les voir, je reviens, j’écris, j’écris un volume ; je passe les jours et les nuits pour le contenter ; vous verrez, par sa lettre, comme j’y ai réussi ; je vous l’envoie. Il faut que vous sachiez que je lui avais écrit un mot où je lui disais de ne me pas parler de reconnaissance parce que ce propos semblait en exiger de moi.

Vous ne me verrez pas cette année à Isle ! et qui sait cela ? Nous allons publier un volume de planches ; il faut voir comment il réussira.

Je vous ai déjà dit que M. Rouillé était mort à Neuilly dans le palais d’Argenson, dimanche, sur les trois heures[2]. Voici encore des nouvelles. Je fais de mon mieux pour vous donner de l’importance. Le roi vient d’accorder le commandement du Languedoc à M. le duc de Fitz-James. M. de Caraman a enlevé un camp des ennemis, leur a tué, pris beaucoup de monde, s’est emparé d’un drapeau, de trois pièces de canon, et de tous les équipages. Un M. de Vignolles, colonel d’une troupe légère, y a reçu une blessure mortelle. M. Clermont d’Amboise est mort. M. le baron de Montmorency a le commandement de

  1. Allusion au titre de chargé d’affaires de la ville de Francfort qu’avait Grimm et peut-être à ses airs hautains. Ailleurs Diderot l’appelle le marquis. Un jour, ayant trouvé chez un brocanteur une enseigne représentant un houx avec cette devise : Semper frondescit, il l’envoya à Grimm, qui accepta le sobriquet de houx toujours vert comme il avait accepté celui de Tyran-le-blanc que Gauffecourt lui donnait pour railler à la fois son fard et ses allures despotiques.
  2. Antoine-Louis Rouillé, comte de Jouy, ministre de la marine, puis des affaires étrangères, né le 7 juin 1689, mort le 20 septembre 1761.