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J’ai reçu tout ce que vous m’avez envoyé. Je vous fais passer ces deux lettres qui vous auraient attendue ici trop longtemps. Je laisse en repos le Dumolard, avec lequel vous serez la maîtresse d’en user comme il vous plaira. Le sieur Baure n’ira pas en avant sans m’avoir vu. J’espère qu’après demain au plus tard votre argent sera placé. Je n’ai pu faire plus de diligence, parce que les rentes viagères sur le roi étaient fermées quand j’ai reçu vos fonds. J’ai laissé en l’air votre poursuite contre la cour de Saxe. Ce n’est pas que je n’aie bien pressenti vos vues, mais je crains que vous ne fassiez en ceci une fausse démarche, peut-être une folie qui vous attirerait à Paris un traitement encore plus fâcheux qu’à Dresde. Il ne faudrait qu’une plainte de l’ambassadeur à la cour de France. Vous n’avez pas bien pesé les choses. Ce n’est pas mauvaise volonté de la part de Mme Diderot, ni aucun éloignement à vous obliger en tout ; mais son avis, qui me paraît bon, était que vous logiez un mois en hôtel garni ; que là vous déposiez vos effets, et que vous nous donniez le loisir de chercher un appartement qui vous convienne ; parti forcé par le moment, le terme de Pâques étant passé. Je vous écris à la hâte, je suis désolé de votre aventure ; mais vous arrivez, nous nous verrons et nous consulterons sur vos affaires. Bonjour, mademoiselle. Un mot encore : ce n’est pas s’annoncer favorablement aux comédiens français que de faire liaison avec Aufresne[1] qui s’est séparé d’eux mécontent. Songez à cela, portez-vous bien, et arrivez.


XI

À LA MÊME, À DRESDE.
11 juillet 1768.

Vous ne me persuaderez jamais, jamais, mademoiselle, que vous n’ayez pas attiré vous-même le désagrément qui vous est

  1. Aufresne, refusé comme sociétaire après son début au Théâtre-Français, mérita les applaudissements de Frédéric à Berlin, et ceux de Catherine à Pétersbourg. Sa fille a écrit quelques pièces pour le théâtre de l’Ermitage.