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Voltaire a publié deux fables agréables toutes doux, mais la première charmante : le Marseillais et le Lion ; les Trois Empereurs en Sorbonne. On risquerait de vous les envoyer, si l’on pouvait seulement se promettre de savoir qu’elles vous sont ou ne vous sont pas parvenues. Je ne me fâche pas, vous voyez bien, on ne saurait être plus modéré.

À propos du singulier abbé, il avait autrefois entrepris l’apologie de Tibère et de Néron. Il entama hier celle de Caligula. Il prétendait que Tacite et Suétone n’étaient que des pauvres gens qui avaient farci leurs ouvrages des impertinents propos de la populace.

J’aime encore mieux ces folies-là qui marquent du génie, des lumières, un penseur, que de plates et fastidieuses rabâcheries sur Jésus-Christ et ses apôtres.

Le Baron fit pourtant une observation qui m’était venue longtemps avant lui : c’est par quel tour bizarre la religion d’un homme qui avait passé sa vie et qui l’avait perdue pour avoir prêché contre les temples et les prêtres était pleine de temples et de prêtres.

Je n’entends pas comment ou ne passe que deux jours à Isle, quand on fait tant que d’y aller. Je ne doute pas que ces deux jours ne se soient passés bien gaiement : les hôtesses du château ne sont pas tristes, ni les survenants non plus.

Je n’aime pas les femmes méchantes ; cela est presque contre nature. C’est à nous qui sommes forts qu’il appartient d’être méchants. Si M. Évrard vous a tenu parole, vous devez avoir eu le plaisir du spectacle que vous vous promettiez.

On ennuie ici à plaisir ce roi de Danemark qui est tout à fait aimable. Les pauvres têtes n’ont pu imaginer que la ressource des spectacles, et ils lui font entendre quatorze actes en un jour[1].

  1. C’était le duc de Duras qui était chargé de promener le prince. On fit courir le quatrain suivant mis dans la bouche de l’étranger fatigué :


    Frivole Paris, tu m’assommes
    De soupers, de bals, d’opéras ;
    Je suis venu pour voir des hommes :
    Rangez-vous, monsieur de Duras.


    Ce quatrain, attribué dans le temps à Boufflers et à Chamfort, se trouve dans les œuvres de ces deux auteurs, mais avec de légères variante. (T.)