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Dit à Laverdy :
Le roi, dimanche,
Dit à Laverdy :
« Va-t’en lundi. »


Les deux rois se sont vus[1] Ils se sont dit tout plein de choses douces : « Vous êtes monté bien jeune sur le trône ! — Sire, vos sujets ont encore été plus heureux que les miens. — Je n’ai point encore eu l’honneur de voir votre famille. — Cela ne se peut pas : vous ne nous restez pas assez de temps ; ma famille est si nombreuse ; ce sont mes sujets. » Et puis tous les crocodiles qui étaient là présents se sont mis à pleurer.

Ce despote du Nord est de la plus grande affabilité. Il est honnête, il est généreux. Il a été aux Gobelins. On lui a montré les tapisseries ; et le duc de Duras, qui l’accompagnait, lui ayant demandé quelle était celle qu’il avait trouvée la plus belle, il l’a désignée ; et aussitôt le duc lui dit qu’il avait ordre du roi son maître de la lui offrir. Il y avait là Soufflot, Cochin, Van Loo et d’autres. Il a commandé son portrait à Van Loo.

Une bouquetière voulait lui présenter un bouquet. M. de Duras l’écartait, et la bouquetière lui dit : « Monsieur, laissez-moi approcher. Il n’est pas si ordinaire de voir un roi à pied dans les rues. »

Il a été à Warwick[2], qui l’a ennuyé ; aux Fausses Infidélités, qui l’ont amusé ; il en a fait compliment à Barthe, qui lui a répondu que son rang était enclin à l’indulgence.

Ne me parlez pas de votre M. de ***. Mademoiselle, je sens en écrivant son nom que ma tête se trouble et que tout le corps me frissonne.

Je n’ai pas été si loin que le Monomotapa. Le rendez-vous en question était à Vincennes ; c’est maman qui a deviné. Ainsi, voilà le lieu de la scène connu. Mais le sujet ? c’est là le point. Imaginez, mesdames, et lorsque vous aurez imaginé quelque chose de commun, dites tout de suite : Ce n’est pas cela.

  1. Christian VII, roi de Danemark, était alors à Paris. Né en 1749, il était monté sur le trône en 1766. Victime d’intrigues ourdies par sa mère pour le brouiller avec sa femme, Caroline-Mathilde, sœur de George III d’Angleterre, il perdit la raison fort jeune encore et termina tristement ses jours à Rendsbourg, le 13 mars 1808. (T.)
  2. Tragédie de La Harpe.