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André, allez, vous reposer. Sylvestre, je vous le recommande. Qu'il ne lui manque rien. Tous les Domestiques s'emparent d'André, et l’emmènent.



Scène VIII


Dorval, Clairville.


Après un silence pendant lequel Dorval reste immobile, la tête baissée, l'air pensif et les bras croisés c'est a son attitude ordinaire : et Clairville s'est promené avec agitation. Clairville dit :


Clairville : Eh bien ! mon ami , ce jour n'est-il pas fatal pour la probité ? et croyez-vous qu'à l'heure que je vous parle , il y ait un seul honnête-homme heureux sur la terre ?

Dorval : Vous voulez dire un seul méchant, Mais Clairville , laissons la morale. On en raisonne mal , quand on croit avoir à se plaindre du Ciel. Quels sont maintenant vos desseins ?

Clairville : Vous voyez toute l'étendue de mon malheur. J'ai perdu le cœur de Rosalie. Hélas ! C'est le seul bien que je regrette ! Je n'ose soupçonner que la médiocrité de ma fortune soit la raison secrète de son in- constance. Mais si cela est , à quelle distance n'est-elle pas de moi , à présent qu'elle est réduite elle-même à une fortune assez bornée ! S'exposera-t-elle pour un homme qu'elle n'aime plus, à toutes les suites d'un état presque indigent ? Moi-même, irai-je l'en solliciter ? Le puis-je ? Le dois-je ? Son père va devenir pour elle un surcroît onéreux. Il est incertain qu'il veuille m'accorder sa fille. Il est presque évident qu'en l'acceptant, j’achèverais de la ruiner. Voyez et décidez.

Dorval : Cet André a jeté le trouble dans mon âme. Si vous saviez les idées qui me sont venues pendant son récit. Ce vieillard,