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Oui, vous êtes justes ; vous aimez aussi ; vous vous mettrez à ma place, et vous me pardonnerez… Mais elle a su mon projet : elle pleure, elle se désespère, elle me méprise, elle me hait… Cécile, voulez-vous vous venger ? voulez-vous m’accabler sous le poids de mes torts ? Mettez le comble à vos bontés… Que je la voie… Que je la voie un instant…

Cécile.

Qu’osez-vous me demander ?

Saint-Albin.

Ma sœur, il faut que je la voie ; il le faut.

Cécile.

Y pensez-vous ?

Germeuil.

Il ne sera raisonnable qu’à ce prix[1].

Saint-Albin.

Cécile !

Cécile.

Et mon père ? Et le Commandeur ?

Saint-Albin.

Et que m’importe ?… Il faut que je la voie, et j’y cours.

Germeuil.

Arrêtez.

Cécile.

Germeuil !

Germeuil.

Mademoiselle, il faut appeler.

Cécile.

Ô la cruelle vie[2] ! (Germeuil sort pour appeler, et rentre avec mademoiselle Clairet. Cécile s’avance sur le fond.)

Saint-Albin lui saisit la main en passant, et la baise avec transport.
Il se retourne ensuite vers Germeuil, et lui dit en l’embrassant :

Je vais la revoir !

Cécile, après avoir parlé bas à mademoiselle Clairet, continue haut, et d’un ton chagrin :

Conduisez-la. Prenez bien garde.

  1. Supprimé à la représentation.
  2. Variante à la représentation : Ô la cruelle complaisance !