Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VI.djvu/171

Cette page a été validée par deux contributeurs.

femme ; que son mari est avec elle content comme un roi, et qu’il ne la troquerait pas contre une autre.

Le maître.

Je l’en félicite : il a été plus heureux que sage.

L’hôtesse.

Et moi, je vous souhaite une bonne nuit. Il est tard, et il faut que je sois la dernière couchée et la première levée. Quel maudit métier ! Bonsoir, messieurs, bonsoir. Je vous avais promis, je ne sais plus à propos de quoi, l’histoire d’un mariage saugrenu : et je crois vous avoir tenu parole. Monsieur Jacques, je crois que vous n’aurez pas de peine à vous endormir ; car vos yeux sont plus qu’à demi fermés. Bonsoir, monsieur Jacques.

Le maître.

Eh bien, notre hôtesse, il n’y a donc pas moyen de savoir vos aventures ?

L’hôtesse.

Non.

Jacques.

Vous avez un furieux goût pour les contes !

Le maître.

Il est vrai ; ils m’instruisent et m’amusent. Un bon conteur est un homme rare.

Jacques.

Et voilà tout juste pourquoi je n’aime pas les contes, à moins que je ne les fasse.

Le maître.

Tu aimes mieux parler mal que te taire.

Jacques.

Il est vrai.

Le maître.

Et moi, j’aime mieux entendre mal parler que de ne rien entendre.

Jacques.

Cela nous met tous deux fort à notre aise.


Je ne sais où l’hôtesse, Jacques et son maître avaient mis leur esprit, pour n’avoir pas trouvé une seule fois des choses qu’il y avait à dire en faveur de Mlle Duquênoi. Est-ce que cette fille