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LES


BIJOUX INDISCRETS



CHAPITRE PREMIER.

naissance de mangogul.

Hiaouf Zélès Tanzaï régnait depuis longtemps dans la grande Chéchianée ; et ce prince voluptueux continuait d’en faire les délices. Acajou, roi de Minutie, avait eu le sort prédit par son père. Zulmis avait vécu. Le comte de… vivait encore. Splendide, Angola, Misapouf, et quelques autres potentats des Indes et de l’Asie étaient morts subitement. Les peuples, las d’obéir à des souverains imbéciles, avaient secoué le joug de leur postérité ; et les descendants de ces monarques malheureux erraient inconnus et presque ignorés dans les provinces de leurs empires. Le petit-fils de l’illustre Schéerazade s’était seul affermi sur le trône ; et il était obéi dans le Mongol sous le nom de Schachbaam[1], lorsque Mangogul naquit dans le Congo. Le trépas de plusieurs souverains fut, comme on voit, l’époque funeste de sa naissance.

Erguebzed son père n’appela point les fées autour du berceau de son fils, parce qu’il avait remarqué que la plupart des princes de son temps, dont ces intelligences femelles avaient fait l’éducation, n’avaient été que des sots. Il se contenta de commander son horoscope à un certain Codindo, personnage meilleur à peindre qu’à connaître.

  1. Tous les noms qui précèdent celui de Mangogul sont pris dans les romans du temps et dans les Mille et une Nuits, ainsi que la géographie fantaisiste qui les encadre. Le comte de ***, qui vivait encore, est celui des Confessions du Comte de ***, par Duclos. — D’après Crébillon fils, Hiaouf Zélès Tanzaï veut dire, en langue chéchianienne, rival du soleil.