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métrie. Il ne faut qu’un sens ordinaire ; et l’enfant de treize ans qui n’est pas capable de cette étude, n’est bon à rien ; il faut le renvoyer.

Je crois qu’il est plus aisé d’apprendre l’arithmétique et la géométrie élémentaire qu’à lire ; les lettres de l’alphabet ont fait verser aux enfants plus de larmes comme caractères de l’écriture, qu’elles ne leur en feront verser comme signes algébriques.

Les enfants apprennent des jeux qui demandent plus de mémoire, de combinaison et de finesse que la géométrie.

L’usage journalier de la vie les a tous disposés, depuis le premier instant de leur naissance jusqu’au moment de leur entrée dans l’école, à l’arithmétique et à la géométrie. Ils n’ont cessé d’ajouter, de soustraire, de mesurer.

L’algèbre, dont le nom n’effraye plus, n’est qu’une arithmétique plus générale que celle des nombres, aussi claire et plus facile ; ce ne sont que les mêmes opérations, mais plus simples.

Les exemples d’enfants initiés à l’âge de quinze ou seize ans aux éléments de la géométrie transcendante et du calcul infinitésimal, ne sont point rares.

Je sors à l’instant de l’exercice d’un jeune homme appelé Guéneau de Montbéliard[1], qui a soutenu au collège d’Harcourt une thèse sur les calculs intégral et différentiel ; ce jeune homme n’a pas encore seize ans, et il a été assujetti à tous les autres exercices du collège. Ce n’est que le fruit de son étude particulière.

M. D’Alembert assurera à Votre Majesté Impériale en avoir entendu, il y a quelque temps, un autre du même âge répondre publiquement et pertinemment à tout ce qu’il est possible de savoir aujourd’hui dans la science mathématique.

On lui en a présenté un troisième qui n’avait pas plus de dix ans, qui s’était accoutumé de lui-même à exécuter de tête les calculs arithmétiques les plus effrayants. D’Alembert lui demanda combien il y avait de secondes dans une année ; tandis que l’enfant rêvait à la question, D’Alembert la résolvait la plume à la main. L’enfant eut aussitôt fait que lui, avec cette

  1. Le fils du collaborateur de Buffon et de l’Encyclopédie. Il n’a pas fait davantage parler de lui.