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de répondre sérieusement, et avec ordre, au Dialogue où Diderot introduit le prosélyte répondant par lui-même. Mais, si, comme on ne le voit que trop souvent, un sophiste très-délié, très-subtil, peut donner à une mauvaise cause quelque apparence de justice, et fasciner avec art les yeux de quelques juges prévenus ou sans lumières, tous ses moyens de séduction n’ont aucun effet sur des esprits droits et pénétrants. Diderot ne trouva, comme il s’y attendait, dans la réponse du théologien, que ces misérables lieux communs, dont, à la honte de la raison humaine, les différentes écoles de théologie retentissent tous les jours depuis près de vingt siècles, et qui suffiraient seuls pour prouver la fausseté du christianisme, quand l’absurdité de cette triste superstition ne serait pas d’ailleurs démontrée par le simple exposé des faits et des dogmes qui lui servent de fondements. Le silence lui parut d’abord le parti le plus sage qu’il eût à prendre dans cette circonstance assez délicate : mais la crainte de se compromettre, en mettant dans tout leur jour les paralogismes de son adversaire, céda au désir de faire triompher la vérité des vains sophismes d’un ergoteur, qui, par sottise ou par malice, confond tout pour tout obscurcir ; et il envoya à M. de Mont…, sa réponse à l’Examen du Prosélyte répondant par lui-même. Soit que le théologien sentît en effet toute la force du coup que les raisonnements de Diderot portaient à l’édifice ruineux du christianisme, supposition que le caractère bien connu des prêtres, et en général la fausseté de leur esprit ne permet guère d’admettre ; soit plutôt que, sans être convaincu, il jugeât du moins nécessaire de combattre avec d’autres armes un ennemi contre lequel celles qu’il avait d’abord employées s’étaient brisées, il ne crut pas devoir ramasser le gant que Diderot lui avait jeté d’une main ferme et hardie ; et, tantôt sous un prétexte, tantôt sous un autre, il remit sa défense à un autre temps qui ne vint point, et quitta une arène où la vanité, qui dans la plupart des hommes ne va guère, même dans ses excès, jusqu’à leur cacher, et éteindre en eux le sentiment de leur faiblesse, l’avertissait qu’il ne pouvait plus descendre, sans s’exposer publiquement à une défaite honteuse.

Ces éclaircissements m’ont paru nécessaires pour l’intelligence de ce petit écrit, qu’on ne peut guère entendre, sans en connaître le motif et l’à-propos.