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presque l’apologie de Linguet[1] et des autres scélératesses de Néron.


CXCV.

Titus fit assassiner[2] Cœcina qu’il avait invité à manger ; Alexandre, Parménion ; Henri III, le Guise. « Quand il s’agit de la couronne, on ne s’en fie qu’à ceux qui sont morts. » De affectato regno, nisi occisis, non creditur. Si cela est vrai du souverain, cela l’est bien davantage du factieux.


CXCVI.

Il n’y a nul inconvénient à voir le péril toujours urgent.


CXCVII.

César fit couper les mains à ceux qui avaient porté les armes contre lui, et les laissa vivre. Ils promenaient la terreur.


CXCVIII.

Le machiavéliste, c’est-à-dire l’homme qui calcule tout d’après son intérêt, met souvent l’amour de la justice à la place de la haine.


CXCIX.

Ou consoler par de grandes récompenses, ou proscrire les enfants des pères factieux. L’un est plus sûr ; l’autre plus humain. Car, qu’est-ce qu’un enfant à qui une récompense fait oublier la mort de son père ?

  1. Pour comprendre l’introduction inattendue du nom de Linguet dans cette phrase, il faut se reporter à la date de 1775, que nous assignons à ces réflexions. À ce moment même, Morellet faisait paraître sa Théorie du paradoxe à laquelle Linguet répondait par la Théorie du libelle. Parmi les accusations de Morellet contre Linguet, quelques-unes étaient justes ; celle d’avoir fait l’apologie de Tibère et de Néron dans son Histoire des Révolutions de l’empire romain (1766) était un peu exagérée. Linguet, suivant ses habitudes d’avocat, avait plaidé le pour et le contre et il lui fut facile de répliquer à Morellet, qui n’avait cité que le pour, en lui mettant le contre sous les yeux. Linguet s’étant déclaré pour Palissot, et ayant vivement attaqué les encyclopédistes, Diderot devait prendre le parti de Morellet.
  2. Voyez Sueton. in Tito, cap. vi. (N.)