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CHAPITRE VI.


Page 284. — Le législateur qui donne des lois suppose tous les hommes méchants.

Je ne crois pas cela. Si le méchant portait sur son front un caractère visible qui le distinguât, le législateur n’adresserait plus ses lois qu’à ces stigmatisés. Il sait qu’il y a des méchants, il n’y a aucun moyen de les discerner : il rend ses lois générales.

Page 285. — L’on paraît sacrifier, mais l’on ne sacrifie jamais son bonheur à celui d’autrui.

Et que fait donc ce Curtius quand il se jette dans un gouffre ?


CHAPITRE XVIII


Page 320. — Les mœurs et les actions des animaux prouvent qu’ils comparent, qu’ils portent des jugements ; ils sont à cet égard plus ou moins raisonnables, plus ou moins ressemblants à l’homme.

Après cet aveu, je ne conçois pas comment Helvétius accorde tant à l’organisation dans la comparaison de l’homme à l’animal, et comment il peut réduire son influence à rien dans la comparaison de l’homme à l’homme.

Page 321. — Il faut que le raisonnement par lequel j’ai détruit le préjugé des revenants, pour opérer son effet, se présente aussi habituellement et aussi rapidement que le préjugé même.

Et quand cela serait, vous trembleriez encore. Est-ce que la pensée a quelque pouvoir sur le mouvement intérieur ? Le tic est pris. Votre tête dit : il n’y a point de revenants ; non, il n’y a point de revenants ; et votre cœur se trouble, et vos entrailles s’émeuvent, et le frissonnement se répand dans tous vos membres, vous avez peur. Hobbes se moque de lui-même, sa frayeur lui fait pitié ; et sa frayeur dure[1].

  1. Bayle n’aimait point Hobbes, qui le lui rendait bien ; il prétend que le philosophe anglais avait peur des fantômes et des démons et il tâche de le prouver en soutenant cette singulière thèse qu’il devait en être ainsi, parce que la croyance à la magie et aux diableries est une conséquence nécessaire de la non-croyance en Dieu.