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les occasions utiles. Mais je répondrai que, si notre langue est admirable dans les choses utiles, elle sait aussi se prêter aux choses agréables. Y a-t-il quelque caractère qu’elle n’ait pris avec succès ? Elle est folâtre dans Rabelais, naïve dans La Fontaine et Brantôme, harmonieuse dans Malherbe et Fléchier, sublime dans Corneille et Bossuet. Que n’est-elle point dans Boileau, Racine, Voltaire et une foule d’autres écrivains en vers et en prose ! Ne nous plaignons donc pas. Si nous savons nous en servir, nos ouvrages seront aussi précieux pour la postérité que les ouvrages des Anciens le sont pour nous. Entre les mains d’un homme ordinaire, le grec, le latin, l’anglais, l’italien ne produiront que des choses communes ; le français produira des miracles sous la plume d’un homme de génie. En quelque langue que ce soit, l’ouvrage que le génie soutient ne tombe jamais.