Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, I.djvu/417

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LETTRE À MONSIEUR ***




De V…… ce 20 janvier 1751.


Je vous envoie, monsieur, la Lettre à l’auteur des Beaux-arts réduits à un même principe, revue, corrigée et augmentée sur les conseils de mes amis, mais toujours avec son même titre. Je conviens que ce titre est applicable indistinctement au grand nombre de ceux qui parlent sans entendre, au petit nombre de ceux qui entendent sans parler, et au très petit nombre de ceux qui savent parler et entendre, quoique ma lettre ne soit guère qu’à l’usage de ces derniers.

Je conviens encore qu’il est fait à l’imitation d’un autre qui n’est pas trop bon[1] ; mais je suis las d’en chercher un meilleur. Ainsi, de quelque importance que vous paraisse le choix d’un titre, celui de ma lettre restera tel qu’il est.

Je n’aime guère les citations, celles du grec moins que les autres. Elles donnent à un ouvrage l’air scientifique qui n’est plus chez nous à la mode. La plupart des lecteurs en sont effrayés ; et j’ôterais d’ici cet épouvantail, si je pensais en libraire. Mais il n’en est rien. Laissez donc le grec partout où j’en ai mis Si vous vous souciez fort peu qu’un ouvrage soit bon, pourvu, qu’il se lise ; ce dont je me soucie, moi, c’est de bien faire le mien, au hasard d’être un peu moins lu.

Quant à la multitude des objets sur lesquels je me plais à voltiger, sachez, et apprenez à ceux qui vous conseillent, que ce

  1. Lettre sur les Aveugles, à l’usage de ceux qui voient. (D.)