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Ordres, les Lessons, les Suites. Le 1er  morceau est souvent un prélude solide, le 2e  une allemande, le 3e  une sarabande ou un morceau expressif et lent, le 4e  une gigue ou une courante ou une gavotte, c’est-à-dire un morceau animé. Le traitement est plus simple dans les sonates de chambre. L’unité des morceaux est plutôt obtenue par la continuité du style que par le développement d’un thème. Cependant, se conformant à ce qui se faisait dans certaines suites, Vitali écrit dans ses trois morceaux d’après un thème unique (1644-1692). Tous les morceaux de la sonate de cette époque sont d’ailleurs écrits dans la même forme binaire que les pièces de la Suite. En 1692, Kuhnau, à la fin de son second volume de Suites, donne pour la première fois l’exemple d’une sonate pour clavier seul : devant le succès de son œuvre, il en écrit sept autres, quatre ans après. Ces Sonates de Kuhnau, qui devaient avoir une telle postérité, comprennent volontiers un prélude et fugue, un adagio, un allegro, une pièce da capo. Ce sera le plan employé par Bach dans ses six Sonates pour clavecin (et non pour orgue), à deux claviers et pédalier (vers 1725), mais où apparaît, pour la première fois peut-être, le plan ternaire des morceaux, quoique pas toujours avec netteté, ni avec un dessein arrêté, mais par la fantaisie spéciale du compositeur. Ces Sonates sont habituellement formées d’un allegro, un largo, un allegro ou presto. Là, peut-être d’après l’exemple donné ou indiqué par les Concertos de violon, créés en 1686 par Torelli, ou par ceux de Vivaldi (dans lesquels existe, par le jeu des réponses du tutti, un acheminement vers la réexposition), qu’il affectionnait, au point d’en faire des transcriptions pour l’orgue, J.-S. Bach emploie à plusieurs reprises, dans le mouvement vif, surtout dans sa Cinquième Sonate, une exposition (mais restant habituellement dans le ton principal), un compartiment central où tantôt le développement du thème exposé est nettement dessiné, tantôt au contraire apparaît un second thème modulant et c’est lui alors qui détermine le développement en le mêlant plus ou moins au précédent, enfin apparaît la réexposition. Dans le morceau lent, c’est plutôt la construction inspirée de la canzon francese ou de l’air da capo, mais avec la première partie concluant à la dominante, ce que des pédagogues allemands modernes ont nommé forme lied, sans aucune raison valable. Les Sonates de Bach en trio et celles pour viole de gambe procèdent du même esprit. Dans tout ce groupe de sonates, on peut remarquer l’influence grandissante que prend, quand il y en a une, la seconde idée, modulante, qui n’apparaît d’ailleurs que dans la partie centrale. C’est l’acheminement vers la sonate à deux thèmes, qu’inaugura son fils Philippe-Emmanuel. Mais on peut le remarquer plus nettement dans quelques-uns des Préludes de Jean-Sébastien : nous citerons les nos 13 et 24 du iie livre du Clavecin bien tempéré, et surtout le No (à un thème seulement), mais où l’exposition en deux tons, séparés par un conduit, et la réexposition concluante, sont nettement dans la forme que prendra la sonate. Voir aussi le Solo per il cembalo de son Petit livre de clavecin, déjà mouvement de sonate bithématique. On cite ordinairement le 1er  livre de François Duval, pour le violon, publié en 1704, comme le premier œuvre de sonates françaises. Les Sonates de Duval sont coupées ordinairement en 3 mouvements, mais qui ressortissent des formes de danse et en portent les titres. La 2e  et la 5e  suite du 1er  livre et la 12e sonate du 2e  livre (1707) sont intitulées Rossignol. On trouve des préludes, gigues, sarabandes, rondeaux, airs, etc. La forme sonate est constituée seulement par la division en trois pièces dont celle du milieu en mouvement lent (sarabande, ou air). Mais il existe des sonates françaises de violon plus anciennes restées en manuscrit, de Brossard, de Rebel, de Mlle de la Guerre. Bien que Duval ait devancé Rebel dans la publication de sonates à violon seul, puisque son œuvre i porte la date 1704, et les Pièces de Rebel, 1705, il existe des Sonates de J.-F. Rebel un ms. daté de 1695, signalé par L. de la Laurencie. Rebel n’a pas cherché à imiter les violonistes italiens qu’il connaissait. Il ne se conforme pas au plan à 4 compartiments instaurés par Corelli. Il écrit des pièces de type assez libre, ornées dans la première version de titres galants ou mythologiques, la Flore, l’Apollon, etc. Plus de noms de danses : termes de mouvement, Gay, vif, etc. C’est ce que fera encore Rameau dans ses Pièces en Concerts. Cependant, jusque vers 1780, les sonates françaises d’instruments entremêleront presque toujours les morceaux de suite et les mouvements de sonate, et resteront même fidèles à un type ancien assez fréquent : un largo servant d’introduction à un mouvement vif, construction deux ou trois fois répétée, toujours en forme binaire. Ph.-E. Bach va être le premier auteur qui adoptera résolument la forme ternaire des mor-