Page:Dictionnaire de la conversation et de la lecture - Ed 2 - Tome 08.djvu/362

Cette page n’a pas encore été corrigée

352

fiiaiuls progrès les avait conduits jusqu’aux symboles : une maison avec une marque particulière représentait une ville conquise ; des lètcs d’Iioinines ornées d’emblèmes signifiaient les cliefs des peuples, etc., etc. Enfin, leurs signes offrent une telle ressenibljuce avec les premiers liiérogl) plies égyplieiis, si perfectionnés depuis, cjue plusieurs auteurs, entre autres Ue Guignes, n’hésitent pas a les regarder comme les mêmes jusqu’à l’époque oii ces derniers cessent d’élrc «le simples symboles. Nous voyons encore de nos jours les sauvages de l’Amérique employer un procédé semblable. S’ils veulent, par cxempla, aniioncer leur départ pour la guerre, ils tracent grossièrement sur l’écorce des ligures d’iiommes armés du tomaliawli ; quelcpies arbres ou un canot figurés indiquent s’ils voyagent par terre ou par eau. Certes, les Scythes n’étaient pas parvenus à ce degré de civilisation quand leurs députés remirent à Daiius ces objets significatifs : une souris, une grenouille, un oiseau, un javelot et une charrue. S’ils avaient su dessiner, au lieu des objets eux-mêmes, ils ne lui en auraient adressé que les ligures tracées sur quelque matière.

On sent combien ce système est insuflisant : les choses visibles seules peuvent être représentées : encore devient-il impossible de ti-acer les ligures de celles qui sont compliquées, comme une forêt, une ville, etc., et les altiibutions sont totalement omi.scs. Il a donc fallu recourir aux symboles, premier pas vers le perfectionnement biéroglj phiquc. Les hiéroglyphes ne sont que le perfectionnemenl d’un système dont les peintures mexicaines nous offrent le premier jalon. Les images employées par nos lillérateurs sont bien pâles et bien froides, si on les compare à la manière dont s’exprime le langage hiéroglyphique , langage tout de figures et de poésie. On distingue trois sortes d’hiéroglyphes : les plus simples représentent l’homme par un de ses membres ; un incendie, par une fumée qui s’élève ; un combat, par deux mains, l’une ormée du glaive, l’autre avec un bouclier. Dans la seconde espèce d’hiéroglyphes , un œil joint f> un sceptre désigne un roi ; une épée avec les <leux signes précédents, un tyran sanguinaire ; le soleil et la lune rappellent la suite des temps, et un œil dominant le tableau nous révèle la Divinité. Mais il restait encore à représenter bien des idées métaphysiques : la troisième espèce d’hiéroglyphes y a pourvu, et la philosophie a pu exprimer ses abstractions, même le plus profondes. Cette méthode de représenter les idées est très-naturelle, et tous les peuples, quelque langue qu’ils parlent, parviendraient à déchilfrer de tels hiéroglyphes s’ils connaissaient les mœurs, les usages du temps et les analogies qui ont servi de base. D’ailleurs, les [jrêlrcs égyptiens, quand l’éciiluie par let- ■ très devint générale, firent des hiéroglyphes une écriture mystérieuse, prenant à ticlie d’exprimer la vérité par des signes de pure convention, sans aucun rapport avec les choses qu’ils voulaient exprimer. Ces deux causes ont amené les difficultés que nous rencontrons toutes les lois que nous cheichons le sens caché sous des hiéroglyphes. Pour nous. qui connaissons les mœurs de l’ancienne Rome, le mot candidat signifiera celui qui brigue, qui postule ; carnous savons que ceux qui chez les Romains concouraient pour obtenir une charge, un emploi, revêtaient une rolie, remarquable par sa blancheur ; coutume qui les avait fait surnommer candidati, du mot latin candidtis, blanc. Mais il ne nous est pas aussi facile de retrouvera quels usages correspondent chez les Égyptiens les analogies sur lesquelles s’appuient les hiéroglyphes. Du reste, cette écriture élait primilivcment à l’usage de tous, ainsi que le démontrent des inscriptions de cette sorte adressées à toutes les classes. tJn ancien temple de Minerve, entre autres, portait celle-ci : un enfant, un vieillard, un faucon, un oiseau, un hippopotame. L’enfant et le vieillard signifient indubitablement qu’on L-’adresse ici aux homines de tout Age, à toute l’espèce humaine ; le faucon et l’oiseau marquent l’anlipathie, ÉCRITLRE

la haine ; l’hippopotame, qui ne fuit jamais devant le nombre, l’impudence : le sens littéral est donc homme, dileste l’impudence’, ou ï)en, homme dcfœ-loi de ta sagesse t Le principal, dans l’emploi des hiéroglyphes, est de déterminer, de préciser exactement chaque idée par tous les signes accessoires possibles qui peuvent la compléter. Notre écriture moderne donne bien le moyen de rendre une idée de mille manières diflérentes, mais elle n’offre ni la même précision, ni la même universalité.

Mais le système que nous venons d’exposer présente un granil nombre d’inconvénients ; nous signalerons entre autres la lenteur avec laquelle on dessinait un objet et l’espace immense qu’il fallait pour exprimer un petit nombre d’idées. Il était donc important de réduire les .signes à des proportions qui en rendissent l’usage prompt et facile. Dans ce but, les hiéroglyphes furent successivement altérés, sans perdre toutefois, sous la forme nouvelle qu’ils revêtirent, la signification primitive qui leur avait été assignée. L’art chez les Chinois en est resté ii ce point. Deux cent qualoi-ze signes, appelés cte/s ou trùbiinols, leur offrent, par les combinaisons dont ils sont susceptibles, It moyen d’exprimer toutes les idées possibles. Au moyen «te cette écriture, bien plus rapide que les hiéroglyphes, ils correspondent avec les diverses provinces de leur vaste empire, quels que soient d’ailleurs les dialectes qui s’y parlent ; ils s’entendent même parfaitemenl, à l’aide de cet interprète, avec les Japonais et avec les Cochinchinois, peuples dont la langue est bien différente delà leur. Les Péruviens avaient aussi une écriture particulière qui, amenée peut-être pas des hiéroglyphes, n’avait cependant aucun rapport avec ce genre d’écriture. Elle s’exécutait au moyen de cordes de diverses couleurs que l’on combinait suivant les choses à exprimer {voyez Qcipos ). Celte écriture s’est encore conservée chez les Auranibas et parmi quelques tribus indigènes du Chili et du Pérou. Les tribunols chinois offrent le plus haut degré auquel ait atteint jusqu’à présent fart d’exprimer les idées mêmes il l’aide de signes qui parlent aux yeux. Le langage mim iq ue des sourds-muets est également tout idéographique, et avec fort peu d’étude pourrait être compris de toutes les nations du globe. Malheurcuscincnt jusqu’à ce jour, malgré les efforts de B éb ian et d’autres encore, on n’a pu réussir à le fixer par des caractères faciles à comprendre et à retenir. L’origine de l’alphabet se perd dans la nuit des temps. Ainsi que nous l’avons vu , et que nous le voyons encore de nos jours dit* les sauvages, la civilisation naissante commence toujours la langue écrite par l’invention de signes qui expriment les idées mêmes, et .sans tenir compte de là langue parlée. Mais la combinaison de ces signes prêtant souvent, dans l’ctat d’imperfection oii ils se trouvent, à des interprétations et à des équivoques plus ou moins vaguer, le besoin d’établir entre les sons du langage et l’écriture des rapports faciles à saisir ne tarde pas à .se faire sentir. L’écriture syllabique a donc été créée, puis l’alphabet. On fait trop d’honneur au génie des premiers inventeurs en supposant qu’ils soient parvenus dès l’abord à analyser les sons du langage au point de pouvoir former l’alphabet : ce n’est que par gradation qu’une telle dissection a pu être opérée. Sans doute, le peuple qui le premier tenta cet essai devait être déjà très-avancé en civilisation et compter de nombreuses provinces, puisqu’il était arrive au point de pouvoir se laire une langue écrite particulière, et, dès lors unicpiement consacrée’ à son usage. Il est probable cependant que la [iluparl des nations alors connues avaient avec ce peuple puissant des rclalions fréquentes, et par conséquent devaient entendre sa langue ; ou bien il conservait encore pour ses relations extérieures l’écriture hiéroglypliiquc, que tous comprenaient. Mais le premier pas était fait ; et fecrilure alphabétique aduptee partout étoufla l’écriluie universelle, qui servait d’interprète lux peuples de langues différentes. Lutin, on s’efTorta de la