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1914
OSEE


de l’antique Ramoth-Galaad, à l’est du Jourdain. Voir aussi Bœdeker, Palâstina und Syrien, 1875, p. 351. Une autre légende arabe place le lieu de sa sépulture à Almenia, dans l’Afrique septentrionale. Sur ces renseignements contradictoires, voir J. Friderici, De Hosea et vaticiniis ejus, Leipzig, 1715 ; Carpzow, lntroductio ad libros canon. Vet. Testam., t. iii, p, 268 sq. ; A. Scholz, Comment., p. xxv-xxvi.

IV. Thème du livre d’Osée. — On l’a vu par ce qui précède, c’est le royaume d’Israël qui est l’objectif immédiat, principal, presque unique même de cet écrit. Le message d’Osée est double : il consiste à exposer, d’un côté, le crime que les Israélites ont commis en brisant l’alliance théocratique, et de l’autre, l’amour de Jéhovah, qui demeure fidèle quand même, et qui, lorsque son épouse mystique, actuellement si coupable, aura été convertie par les châtiments nécessaires, se manifestera de nouveau avec éclat. Durant la longue période de l’activité prophétique d’Osée, la condition religieuse et morale des dix tribus schismatiques du nord nécessita constamment les mêmes reproches ; c’est pour cela qu’on entend, à travers l'écrit tout entier, l’accent uniforme soit du blâme, soit de. l’exhortation, au sujet de l’idolâtrie, de l’injustice, des agissements anti-théocratiques, comme aussi l’accent de la menace. Le peuple israélite a rompu en pratique le contrat passé avec le Seigneur ; celui-ci punira les coupables, s’ils ne reviennent à de meilleurs sentiments : voilà le thème perpétuel des oracles d’Osée.

Les lamentations sur l’idolâtrie et sur l’immoralité d’Israël remplissent, à elles seules, une grande partie du livre. Le prophète revient souvent sur le culte idolâtrique, qui consistait tout à la fois dans les pratiques grossières, sensuelles des nations chananéennes, et dans l’adoration du veau d’or, installé à Béthel par Jéroboam I". Cf. Ose., iv, 12-14, 15, 17 ; v, 1-3 ; viii, 4-6, 11 ; ix, 1, 10, 15 ; x, 1, 5, 8, 15 ; xi, 2 ; xii, 11 ; xiii, 1 sq. Il dépeint aussi sous des couleurs très vives, non seulement la profonde corruption des masses, mais aussi celle de toutes les classes dirigeantes : l'égoïsme des prêtres, l’ambition des grands, la faiblesse et la mollesse des rois, les luttes perpétuelles entre les factions opposées. Tout cela est mis tour à tour sous nos yeux avec une grande fidélité de pinceau. Cf. Ose., iv, 1-3, 18 ; v, 1, 3 ; vii, 16 ; viii, 6, 8-10 ; ix, 15 ; x, 3 ; xiii, 10, etc.

L’infidélité d’Israël se maniiestait également par ses relations politiques, dont notre prophète trace aussi un tableau très exact. Comme nous l’apprenons IV Reg., xv, 19-20, le roi Manahem acheta au prix de 1 000 talents d’argent (8500000 fr.) la faveur de n'être point attaqué par le roi d’Assyrie Théglathphalasar III, et les annales du grand conquérant assyrien citent en effet « Manahem de Samarie » parmi les princes qui lui payaient le tribut. Nous savons que cette politique fut suivie de même par le dernier roi d’Israël, Osée, qui, d’après les mêmes annales, n’obtint son élévation au trône que grâce au concours de l’Assyrie. Plus tard, sous la pression d’une partie des grands de son royaume, il se tourna vers l’Egypte ; mais ce double jeu le conduisit directement à la ruine. Cf. IV Reg., xvii, 1-6 ; F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6° édit., t. iii, p. 532-540. D’ailleurs, envisagée en elle-même ; ' une politique qui consistait à se mettre sous la dépendance des empires païens du voisinage était en opposition flagrante avec les principes théocratiques, suivant lesquels Jéhovah était seul le vrai roi et protecteur du pays. Cf. Ose., vii, 8, 11 ; xi, 1 a ; xiv, 1-3, etc. Le résultat d’une telle conduite était donc aisé à prévoir : le Seigneur cessera de regarder le royaume d’Israël comme faisant partie de son peuple, et il le « chassera de sa maison ». Ose., ix, 15.

gré le caractère menaçant du livre d’Osée, les pro messes en sont aussi un élément très important. Elles apparaissent très nettes, et relativement fréquentes, à côté des plaintes et des objurgations sévères. Cf. ii, 1, 14-24 ; iii, 5 ; v, 15 ; vi, 1-3 ; xi, 8-11 ; xiv, 2-10, etc. Il faut signaler, entre toutes, celles qui se rapportent au Messie et à son règne glorieux. Bien qu’Osée ne prédise qu’un seul fait de la vie du Christ, et cela d’une manière typique, indirecte (cf. Ose., xi, 1°, et Matth., n, 15 ; voir L.-Cl. Fillion, L'Évangile selon S. Matth., . Paris, 1878, p. 59, et Knabenbauer, dans ses notes sur ces deux passages), il annonce du moins très clairement que le Messie naîtra de David, Ose., iii, 5, et il trace un brillant tableau de l'âge d’or qui sera inauguré par lui. Ose., ii, 1, 16-24 ; iii, 5 ; xiv, 2-9.

On a fait observer, surtout à notre époque (voir en particulier Davidson, dans The Expositor, 1879, p. 258 sq. ; T. K. Cheyne, Hosea with Notes, p. 27-30), que « les menaces terribles et les consolantes promesses du prophète Osée s’appuient sur une base identique, qu’il a la gloire d’avoir mise très spécialement en relief : à savoir, l’amour de Jéhovah pour son peuple ; l’amour outragé, saintement jaloux, qui s’irrite et se venge ; l’amour malgré tout, qui pardonne et qui sauve ». Cf. iii, 1 ; ix, 10 ; xi, li>, 8-11 ; xiv, 5, 9, etc. C’est là ce qu’on a très justement appelé « la note dominante de la plaidoirie d’Osée ». À ce même point de vue, on a aussi nommé Osée « le prophète des peines tragiques de l’amour ». Si on le compare avec Amos, son contemporain, on voit que celui-ci regarde surtout Jéhovah comme le roi et le juge d’Israël, tandis qu’Osée contemple surtout en Dieu l'époux et le père de son peuple. En ce sens, notre prophète a contribué de la façon la plus noble au développement de l’idée religieuse ; mais on ne doit pas oublier que déjà le Deuléronome avait clairement présenté cette belle et grande pensée du divin amour. Cf. Deut., 14, x-15 ; xxii, 6, 10-11, etc.

Nous devons noter encore l’insistance avec laquelle Osée relève les obligations avant tout morales que l’alliance théocratique imposait à Israël. Ce dernier s’imaginait bien à tort, comme le dit un texte célèbre, Ose., VI, 6 ; cf. v, 6, et viii, 13, qu’il réussirait à s’attirer le pardon et la bienveillance de Jéhovah par un culte purement exlérieur, en lui immolant des troupeaux entiers de victimes. Non ; c’est par la miséricorde qu’on se rend le Seigneur propice î'est par la connaissance pratique de Dieu qu’on mérite ses bienfaits.

On a aussi établi, pour mieux comprendre le caractère spécial d’Osée, un rapprochement intéressant entre lui et Jérémie. L’un et l’autre ils virent approcher, celui-ci pour Juda, celui-là pour Israël, la catastrophe inévitable, et ils eurent la douloureuse mission de l’annoncer, d’en justifier le décret. Osée fut donc comme « le Jérémie du royaume du Nord ». Voir Stanley, Lectures on the History of tke Jewiih Church, édit. de 1885, t. ii, p. 317. Le prophète d’Anathoth fait d’ailleurs de fréquentes allusions au livre d’Osée. Cf. Ose., i, 2, et Jer., iii, 6, 8 ; Ose., i, 11, et Jer., iii, 18 ; Ose., ii, 24, et Jer., iii, 19 ; Ose., iii, 5, et Jer., xxx, 9 ; Ose., iv, 2, et Jer., vii, 9 ; Ose., viii, 13 ; tx, 9, et Jer., xiv, 10, etc. Voir Kueper, Jeremias Særorum Librorum interpres et vindex, p. 67-70.

Un autre fait intéressant à signaler, c’est qu’il existe des coïncidences assez remarquables, non seulement de pensées, mais aussi d’expressions, entre notre prophète et le Pentateuque, et l’intérêt est encore plus avivé, si l’on se souvient qu’Osée lui-même, viii, 12, atteste que la loi avait été mise par écrit et que les prêtres en étaient les interprètes. Cf. iv, 6. On a composé sur ce point des listes considérables. Voir Curtis, The Levitical Priest, 1877, p. 176-178 ; A. Scholz, Comment, zum Bûche des Proph. Bosea, p. xxxi-xxxii ; Sharpe, Hosea, 1884, p. 72-84, et aussi Hengstenberg, Authentie