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MORTE (MER)


rait difficile de les préserver longtemps de la corruption à laquelle ils tendent. » Les Arabes voisins de la mer Morte prétendent que l’apparition de l’asphalte est toujours précédée de commotions souterraines. Ainsi, , en 1834, à la suite d’un violent tremblement de terre, on en vit une grande masse échouer vers l’extrémité méridionale du lac. De même, après celui de 1837, des masses considérables, semblables à de petites iles, flottèrent sur les eaux, et de nombreux quintaux furent vendus à des marchands de Beyrouth et de Jérusalem. D’après les indigènes, le bitume découlerait, en outre, sur plusieurs points, des roches de la rive orientale. M. Lartel regarde ces gisements comme problématiques ou, en tous cas, peu considérables. Mais il a constaté, sur le bord occidental, plusieurs gisements de cette nature, entre autres, ceux auxquels Strabon, XVI, ii, 44, fait allusion, quand il parle de « roches distillant de la poix, aux environs de Moasada (Masada) ». Il a, en effet, remarqué, dans le lit de l’ouadi Sebbéh, qui limite au sud la colline de ce nom, des fragments d’asphalte, indiquant le voisinage d’un gisement de cette substance au milieu des calcaires dolomitiques crétacés dans lesquels est entaillé ce profond ravin. Cf. Bulletin de

un lambeau sénonien recommence à se montrer, mais il descend cette fois vers la mer Morte. El-Khadr marque donc le sommet d’un pli saillant ou anticlinal. À partir de Bethléhem, on suit constamment les couches peu épaisses du sénonien, lesquelles, rejetées par une série de cassures ou de plis brusques en échelons, arrivent ainsi à une altitude voisine de celle du niveau de la Méditerranée. Alors apparaît au-dessous, dominant le lac, une falaise de cénomanien, au pied de laquelle, contre le rivage, se montrent des dépôts disloqués, entremêlés d’asphalte et appartenant tous à l’époque quaternaire. Toute différente est la disposition du terrain sur la rive orientale. À part des ondulations locales de peu d’importance, les couches géologiques se rapprochent, en général, de la position horizontale. À la base, nous trouvons de très anciens tufs volcaniques, qui supportent un grès surmonté par un calcaire avec fossiles du carboniférien tout à fait supérieur. Sur ces couches, qui se relèvent vers le lac, s’appuie le grès de Nubie, invisible de l’autre côté, et supportant 600 mètres de marnes cénomaniennes horizontales, avec une couverture d’environ 100 mètres de sénonien, La stratification, sur les deux rives opposées, se prête donc bien à

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360. — Coupe géologique des montagnes de Juda, prolongée, à travers la mer Morte, jusqu’aux montagnes de Moab. D’après Blanckenhorn, dans la Zeitschrifl des Deutschen Palâstina-Vereins, t. xix, pi. m.

la Société géologique de France, 2e série, t. xxiv, p. 20 sq.

III. Origine et histoire. — Comment s’est formée cette mer que nous venons de décrire ? Son origine se ratlache-t-elle, comme on l’a cru souvent, à la catastrophe des villes maudites, Sodome et Gomorrhe ? Il y a là des problèmes intéressants à étudier. Disons tout de suite que le lac, au moins dans sa partie septentrionale, la plus profonde, préexistait à la destruction des cités bibliques. C’est là un fait incontestable et facile à prouver au point de vue géologique.

1° Formation géologique. — L’étude du terrain a été faite par des savants compétents, comme M. L. Lartet, dans le Voyage d’exploration à la mer Morte du duc de Luynes, Paris, t. iii, Géologie, p. 241-268 ; M. Max Blanckenhorn, Entslehung und Geschichte des Todlen Meeres, dans la Zeitschrift des Deutschen Palàstina-Vereins, Leipzig, t. xix, 1896, p. 1-59. Ce dernier surtout a bien mis en lumière l’origine et l’histoire de la mer Morte. Son travail a été analysé par M. de Lapparent dans la Bévue biblique, Paris, 1896, p. 570-574. Partons de la Méditerranée (fig. 360) et franchissons en ligne droite le dos d’âne que forment les montagnes de Juda entre la plaine et le lac Asphaltite. Malgré l’ascension constante, nous rencontrerons, jusqu’au point culminant d’El-Khadr (860 mètres d’altitude), qui domine Bethléhem (777 mètres), des assises de plus en plus anciennes. Ainsi, près de la côte, le sénonien sort de dessous les dépôts marins récents, mais il disparait quand on atteint 412 mètres, à Khirbet Zanû’a, l’ancienne Zanoé, pour céder la place à des couches plus anciennes, celles du cénomanien. Au haut du plateau,

l’idée d’une dislocation, postérieure au dépôt des couches crétacées et consistant en une traînée de plis brusques et de cassures, qui accompagnent le flanc oriental de l’anticlinal de Bethléhem. En effet, loin de se correspondre d’une rive à l’autre de la mer Morte, comme dans le cas où son bassin aurait été simplement creusé par érosion, les falaises occidentales et orientales du lac n’appartiennent pas au même niveau géologique, et c’est bien là la disposition générale des failles. La conclusion à tirer, c’est qu’il y a là quelque chose de fort analogue à l’effondrement d’une clef de voût „ une rupture survenue dans l’un des versants d’un jïli brusque qui tendait à se former.

On peut, d’après M. Blanckenhorn, distinguer six phases principales dans l’histoire de la mer Morte, depuis son origine jusqu’à nos jours. Vers la fin du pliocène, ce qui correspond à la première époque glaciaire de l’Europe, le lac, moins profondément encaissé qu’aujourd’hui, était beaucoup plus long. Il s’étendait au nord jusqu’au lac de Tibériade, et, grâce à l’extrême abondance des pluies, son niveau s’élevait un peu plus haut que celui de la Méditerranée. Sa largeur variait entre 5 et 25 kilomètres. On voit encore aujourd’hui un des dépôts qui se sont produits sur ses anciens bords et dont plusieurs coquilles sont identiques avec celles qui vivent actuellement dans les eaux douces de la Palestine. Il se trouve assez loin au sud, dans la vallée de l’Arabah, à Ain Abu Uéridéh, sur le flanc occidental du Samrat el-Fedân. Il se compose de couches horizontales de marne blanche, de sable et d’argile, renfermant un grand nombre de coquillages, qui appartiennent aux espèces. Melania tuberculala, Mull., et Melanopsis Saulciji, ,