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MORALE — MORÉH


l’idéal du bien avec une fidélité minutieuse et servile à la Loi, cette loi « qui n’amena rien à la perfection ». Heb., vii, 19. Tout se résumait pour eux dans une obéissance scrupuleuse à la Loi, en vue d’une récompense prochaine que devait leur assurer le Messie temporel qu’ils imaginaient. C’était vraiment le zèle de la Loi, non le zèle religieux et désintéressé des Machabées,

I Mach., ii, 27, mais un zèle qui n’était plus conforme à la sagesse. Rom., x, 2. De là les pratiques dont l’observance méticuleuse cevait conduire le vrai Juif à la perfection : le sabbat avec ses multiples conditions, la pureté et l’impureté légales, les marques extérieures de religion, phylactères, prières rituelles, etc., la distinction entre les aliments, etc. « C’était un formidable fardeau qu’une fausse légalité faisait peser sur les épaules du peuple. Matth., xxiii, 4 ; Luc, xi, 46. Rien n’était abandonné à la liberté individuelle, tout était placé sous le joug de la lettre. À chaque pas, à chaque mouvement, l’Israélite zélé pour la Loi devait se demander : Qu’est-il ordonné ? Pour aller et venir, pour le travail d’état, pour la prière, pour le repas, à la maison ou dehors, de l’heure la plus matinale jusqu’à la plus tardive, de la jeunesse à la vieillesse, un formalisme mort et mortel lui imposait sa contrainte. Une saine vie morale ne pouvait se développer sous un pareil faix. Au lieu d’obéir à une impulsion intérieure, c’est surtout du dehors qu’elle recevait la règle qui la faussait. Pour celui qui prenait celle-ci au sérieux, la vie était un supplice continuel. Car, à tout instant, il était en danger de transgresser la loi, d’autant plus qu’à cause du formalisme extérieur dont il dépendait, il était souvent dans l’incertitude d’avoir réellement satisfait à la loi. D’autre part, l’orgueil et les ténèbres étaient presque inévitables chez celui que la connaissance et la réglementation de la loi érigeaient en maître.

II pouvait se dire qu’il avait satisfait au devoir, parce qu’il n’avait rien négligé et avait accompli toute justice. Mais il n’en est pas moins certain que cette justice des scribes et des pharisiens, Matth., v, 20, qui regardait de haut les pécheurs avec d’orgueilleuses pensées à l’égard de Dieu, Luc, xviii, 9-14, et faisait pompeusement parade de ses œuvres aux yeux du monde, Matth., vi, 2 ; xxiii, 5, n’était ni vraie ni agréable à Dieu. » Scbûrer, Geschichte des jûdischen Volkes ini Zeit J. 67., Leipzig, t. ii, 1898, d. 495, 496. Tel était l’idéal moral substitué à celui des prophètes et des pieux Israélites par les docteurs qui ont précédé immédiatement la promulgation de l’Évangile.

8° Dans l’Évangile. — Avec le Nouveau Testament, les lumières et les grâces se multiplient : la morale devient en conséquence plus élevée, d’une pratique plus difficile, et toutefois, à raison des exemples, des mérites et des secours spirituels venant de Jésus-Christ, plus universellement connue, comprise et suivie, non plus seulement parmi le peuple juif, mais chez les nations qui peuplent le monde entier. Il y a progrès au point de vue de l’élévation des préceptes, de l’esprit intérieur qui doit en inspirer la pratique, du nombre et de la diversité des âmes qui en font la règle de leur vie. Cf. S. Irénée, Adv. hœres., iv. 11, 37, 38, t. vii, col. 1002-1003, 1103-1109. La morale évangélique, tout en s’élevant beaucoup plus haut que celles qui l’ont précédée, part pourtant du même principe naturel, le Décalogue. L’Église, interprète de la pensée du Sauveur et de son Évangile, n’apporte que. deux modifications, moins à la lettre qu’à la disposition du Décalogue. Pour les Hébreux, le premier précepte commandait de considérer Jéhovah comme le seul Dieu, et le second défendait de faire des images taillées ou peintes pour les adorer. Sous la loi évangélique, le péril de l’idolâtrie est écarté et les deux anciens préceptes peuvent être réunis en un seul, qui commande l’amour et le culte-de Dieu. Par contre, le dixième précepte du Décalogue est décomposé en deux, sous la loi évangélique, afin de réprouver distinc tement les désirs contraires à la chasteté et ensuite ceux qui sont contraires à la justice. « Au peuple grossier que conduisait Moïse, il fallait interdire par un précepte spécial l’idolâtrie ; il n’était pas opportun d’entrer dans trop de détails sur les péchés de pensée. Au peuple chrétien, il n’est plus nécessaire de défendre l’idolâtrie extérieure ; en revanche, il faut pénétrer plus avant dans le cœur. Ainsi la nouvelle division est justifiée. » De Broglie, Confér. sur l’Idée de Dieu dans VA. T., Paris, 1890, p. 178-190. Ainsi le progrès s’accuse jusque dans la formule des préceptes élémentaires.

IV. Les codes de la morale. — 1° La morale mosaïque est codifiée dans le Pentateuque, dont les quatre derniers livres ont précisément pour but de formuler les préceptes imposés aux Hébreux. Voir Pentateuque. Ces préceptes sont rappelés incidemment dans les autres livres de l’Ancien Testament, et surtout dans les écrits des prophètes. Certains autres livres, les livres poétiques et sapientiaux, s’occupent encore davantage de morale et entrent souvent dans le détail des devoirs naturels ou positifs. Voir Écclésiaste (Le livre de l’), t. ii, col. 1537 ; Ecclésiastique (Le livre de l’), t. ii, col. 1550-1553 ; Job, t. iii, col. 1575 ; Proverbes, Psaumes, Sagesse. — 2° La morale évangélique est beaucoup moins codifiée que celle de Moïse. Le discours sur la montagne en résume les points principaux qui avaient besoin d’être mis en relief au regard de la loi ancienne. Matth., v-vii ; Luc, vi, 20-49. Mais les autres préceptes sont épars à travers les écrits des évangélistes. Sur l’ensemble de cette morale, voir Jésus-Christ, t. nr, col. 1486-1487. Dans leurs ÉpUres, les Apôtres rappellent l’enseignement moral du Sauveur ou touchent à d’autres points passés par lui sous silence. Voir t. ii, col. 870, 991, 1861 ; t. iii, col. 75, 550, 1097, 1198. Mais ces documents écrits ne présentent la morale évangélique ni dans son ensemble, ni d’une manière didactique et complète. C’est par voie d’enseignement oral que les Apôtres, et par conséquent l’Église, ont reçu mission d’apprendre aux hommes à garder tout ce que le Sauveur a commandé. Matth., xxviii, 20. — Consulter aussi, au sujet de la morale, les articles qui traitent des vertus, Aumône, t. i, col. 1244 ; Charité, Chasteté, t. ii, col. 591, 624 ; Humilité, t. iii, col. 777 ; Miséricorde, t. iv, col. 1130 ; etc., et ceux qui traitent des vices et des péchés, Adultère, Avarice, Blasphème, 1. 1, col. 242, 1285, 1806 ; Colère, Fornication, Fraude, t. ii, col. 883, 2314, 2398 ; Gourmandise, Ignorance, Incontinence, Ingratitude, Injustice, Ivresse, t. iii, col. 281, 837, 870, 877, 878, 1048 ; Luxure, Moquerie, t. iv, col. 436, 1258, etc.

H. Lesêtre.
    1. MORASTHI##

MORASTHI, MORASTHITE (hébreu : ham-Môrasfî ; Septante : 6 MtopaiÔiÔiiî ; 6 M(i>pa<r8ét ; Vulgate : de Morasthi, Jer., xxvi, 18 ; Morasthites, Mich., i, 1), originaire de Morasthi ou plutôt, selon le nom hébreu, de Moréscheth-Gath. C’était la patrie du prophète Michée. Jer., xxvi, 18 ; Mich., i, 1. Voir Moréscheth-Gath.

    1. MORÉH##

MORÉH (hébreu : Môréh ; Vaticanus : Jud., vii, 1 ; Mwpat ; Alexandrinus : ’Aêûp ; les mêmes manuscrits traduisent ce mot par ijd/*)Xr|, Gen., xii, 6, et Deut., xi, 30 ; la Vulgate le rend par illustris, Gen., xir, 6 ; intram et leadens procul, Deut., xi, 30 ; excehus, Jud., vii, 1), nom d’un chêne avec son territoire et d’une colline. — L’étymologie et la signification de Môréh sont incertaines. Le copiste du texte samaritain a lii, Deut., xi, 30, masfâ’, « observatoire. » La version samaritaine a traduit, Gen., xiii, 6, et Deut., xi, 30, par liazûbdli, « vision. » La Peschito qui en fait l’équivalent de mamré (Mombré), Gen., xii, 6, et Deut., xi, 30, ainsi que l’arabe, Gen., xii, 6, y voit une « élévation », Ramthâ’. Jud., vu, 1. Ainsi les traducteurs semblent laire dériver Môréh, tantôt de ydrâh, « jeter, fonder, élever, arroser, instruire, » tantôt de rd’âh, « voir, » ou d’autres racines