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MEULE

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des femmes qui manœuvraient la meule, Matth., xxiv, 41, et spécialement des esclaves. Exod., xi, 5. Le travail était fort pénible. Quand les Philistins eurent pris Samson, ils l’emprisonnèrent à Gaza et le mirent à la meule. Jud., xvi, 21. Isaïe, xlvii, 2, menace Babylone du même sort, quand il lui dit : « Prends les meules et mouds de la farine. » Jérémie constate que les jeunes hommes de Juda ont été mis à la meule par les Chaldéens. Lam., v, 13. — Saint Jérôme traduit ; dans ce dernier passage, le mot tehôn, « meule, s par impudice abusi sunt, les Chaldéens « ont indignement abusé des jeunes gens ». Cette traduction se réfère à un passage de Job, xxxi, 10, où il est dit : « Si mon cœur a été séduit par une femme…, que ma femme soit la meule, fithan, pour un autre, » c’est-à-dire qu’elle soit son esclave. Le verbe tâhan est pris dans un sens obscène par les Septante, la Vulgate, le Targum, etc., comme le grec (liXXstv. Cf. Théocrite, iv, 58. Ce sens peut convenir dans le passage de Job ; il est beaucoup moins probable dans celui de Jérémie. — Chez les anciens auteurs, le travail de la meule est toujours présenté comme propre aux esclaves et aux condamnés. Cf. Odyss., vii, 103 ; Théophraste, Char., 5 ; Aristophane, Nub., 1358 ; Callimaque, Del., 242 ; Térence, Andr., i, 2, 29 ; Phorm., ii, 3, 19 ; Plaute, Asinar., i, 1, 16 ; Epidic, i, 2, 42 ; Mercat., ii, 3, &2 ; Mostel., i, i, 16 ; Psenul., v, 3, 33 ; Pen., i, 1, 21, etc.

3° Les meules.se perfectionnèrent avec le temps, de manière à fournir, avec plus de facilité, un meilleur

275. — Moulin à bras de Pompéi.

D’après Baumeister, Denkrnaler des klassichen AUertums,

t. ii, p. 933.

travail. Les anciens avaient un moulin à bras, y_sipoIiûXti, Xénophon, Cyr., vi, 2, 31, mola manuaria ou trusatilis, Aulu-Gelle, iii, 3, 14, que l’on tournait. On en a découvert de nombreux spécimens à Pompéi, dans les boutiques des boulangers et il n’est pas de ruines de villes antiques où l’on ne trouve des débris de meules. La base du moulin de Pompéi (fig. 275) estformée d’une pierre surmontée d’une partie conique, la meta, d’environ deux pieds de haut. L’autre pièce de l’appareil affecte la forme d’un sablier ; c’est, le catillus. Sa partie inférieure emboîte le cône de. la meta ; la partie supérieure, évasée en entonnoir, sert de trémie pour le blé, qui descend par quatre trous percés à travers l'étranglement du catillus. Une barre de bois, s’insérant dans deux cavités ménagées de chaque côté de cette dernière pièce, permettait aux esclaves dé faire tourner le catillus sur la meta. Le grain, broyé par le frottement des deux pièces l’une sur l’autre, tombait en farine dans une rigole inférieure. Les Hébreux ne se sont pas servis communément d’appareils aussi perfectionnés. Cependant saint Matthieu, xxiv, 41, suppose deux femmes occupées à mettre en mouvement la même meule. Elles avaient un moulin fort analogue à celui qui est encore en usage en Orient, et qui est connu sous le nom de richd, à peu près comme les rêhâyîm de la Bible (fig. 276). Cf. Riehm, Handwôrterbuch des bibl. Alterlums, Bielefeld, 1894, t. ii, p. 1041. Ce moulin,

qu’on trouve dans tout l’Orient, se compose de « deux petites meules, larges de 58 à 60 centimètres, épaisses de 6 à 10. Celle de dessous est légèrement convexe, pour faciliter la chute de la farine. L’autre l’emboîte exactement. Au milieu de la meule supérieure, seule mobile,

276. — Moulin à bras. — À gauche, les deux meules superposées. A droite, au-dessous, meule inférieure ; au-dessus, coupe de la meule supérieure. D’après Riehm, Handwôrterbuch des bibli~ schen AUertums, 1894, t. ii, p. 1041.

est un assez large trou, traversé diamétralement par une petite pièce de bois ou de fer, percée elle-même d’un trou où s’engage le pivot de fer s'élevant au centre de la pierre inférieure. Le moulin est ordinairement posé à terre sur une peau : une ou deux femmes, accroupies l’une en face de l’autre, tournent la pierre supérieure par un manche de bois planté debout sur la meule et près du bord. Si deux femmes travaillent ensemble, l’une d’elles tourne de la main gauche et se sert de la droite pour mettre le grain dans le trou central, que le petit moyeu ne ferme pas entièrement (fig. 277). Les meilleurs moulins à main se fabriquent dans le Ledja, l’ancienne Trachonitide, avec la lave poreuse et relativement légère qui forme presque tous les rochers du pays. C’est unarticle d’exportation dans tout l’Orient ». JalUen, L’Egypte, Lille, 1891, p. 271, 272. La manœuvre du moulin, bien que longue et pénible, est invariablement confiée aux femmes. « Quoiqu’on ait cherché à établir quelques moulins à Jafla, la plupart du temps les habitants font eux-mêmes leur farine, en broyant le grain entre deux petites meules de lave que les femmes

277. — Bédouines tournant la meule. D’après une photographie.

tournent l’une sur l’autre au moyen d’une cheville de bois. Que dé fois n’ai-je pas vu des mères de famille, épuisées, manœuvrer ainsi sans relâche, pendant des heures entières, ces machines primitives et grossières, permettant à peine de moudre la farine nécessaire à la nourriture de leur mari et de leurs enfants ! Que de fatigues elles éprouvent pour avoir le pain d’une seule journée ! Jusqu’au moment où ces malheureuses pourront se reposer dans la paix de la tombe, elles seront condamnées à ce dur travail ! » Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris, 1884, p. 381. Le frottement d’une, meule sur l’autre produit un bruit continu. Dans sa prophétie contre Juda, Jérémie, zxv, 10, dit que le Sei-