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MARIE-MADELEINE


ments. Cf. Sepp, La vie de N.-S. J.-C, trad. Ch. Sainte-Foi, Paris, 1861, t. i, p. 461-463.

2° Au Calvaire. — 1. Marie-Madeleine n’était pas au nombre de ces femmes qui se lamentaient en suivant Jésus conduit au Calvaire ; ces femmes en effet étaient de Jérusalem et Notre-Seigneur leur parla comme à des mères de famille. Luc, xxiii, 27-29. Mais elle se tenait au pied de la croix, quand le Sauveur parla à sa mère et à saint Jean. Joa., xix, 25. Comme toutes les autres, elle restait debout, stabant, et non dans cette attitude tourmentée et désespérée que les peintres lui ont prêtée si souvent. Il ne convenait pas que son dévouement pour le divin Maître crucifié se départit alors de cette réserve dont la fermeté courageuse de Marie lui donnait l’exemple.

— 2. Quand Jésus eut expiré, elle se mit respectueusement à dislance, avec les autres femmes, pour contempler le solennel et douloureux spectacle que présentait le Calvaire. Malth., xxvii, 55, 56 ; Marc, xv, 40, 41 ; Luc, xxm, 49. — 3. Elle assista pieusement à la sépulture hâtive du Sauveur, sans que rien n’indique qu’elle y ait pris part. Mais elle regarda attentivement où l’on plaçait le corps du divin Maître, Marc, xv, 47 ; Luc, xxm, 55, et quand la pierre eut été roulée à l’entrée du sépulcre, elle s’assit à côté. Matth., xxvii, 61. Avant le commencement du sabbat, c’est-à-dire avant l’apparition des étoiles, le vendredi soir, elle dut s’en retourner à la ville, pendant que les autres femmes préparaient déjà des aromates et des parfums, pour compléter l’ensevelissement du Sauveur. Luc, xxiii, 56.

3° Au sépulcre du ressuscité. — 1. Au soir du sabbat, après l’apparition des étoiles qui marquait le commencementd’une nouvelle journée, Marie-Madeleine et lesautres femmes achetèrent des aromates, pour aller ensuite achever l’ensevelissement, et avant la fin de la nuit, elles partirent pour le sépulcre où elles arrivèrent quand il faisait à peine jour. Matth., xxviii, 1 ; Marc, xvi, 1, 2 ; Luc, xxiv. 1 ; Joa., xx, 1. — 2. Quand elles furent auprès du sépulcre, elles virent que la pierre qui en fermait l’entrée avait été roulée de côté. Voir Jésus-Christ, t. iii, col. 1477. Elles entrèrent alors et furent consternées en constatant que le corps ne s’y trouvait plus. Luc, xxiv, 34. Aussitôt Marie-Madeleine tira la conclusion qui lui paraissait s’imposer, et, revenant à la hâte vers les apôtres Pierre et Jean, elle leur dit, comme parlant en son nom et en celui de ses compagnes : « Ils ont enlevé le Seigneur du sépulcre et nous ne savons pas où ils l’ont . placé. » Joa., xx, 2. Elle ne désigne que vaguement les auteurs de l’enlèvement, car elle ne sait si ce sont des amis ou des ennemis. Pierre et Jean partirent aussitôt et constatèrent que le sépulcre était vide. Joa., xx, 3-10. — 3, Marie-Madeleine, qui les avait suivis, resta après leur départ à pleurer debout près du monument. Bien qu’elle le sût vide, elle s’inclina à un moment, par un instinct bien naturel, afin de regarder encore par la porte surbaissée. Elle vit alors deux anges vêtus de blanc, assis sur la banquette funéraire, l’un à la tête et l’autre aux pieds. Ils lui dirent : « Femme, pourquoi pleures-tu ? » Elle répondit : « Ils ont enlevé mon Seigneur et je ne sais où ils l’ont mis. ; Puis, se retournant, elle vit Jésus, debout devant elle ; mais, au lieu de le reconnaître, même quand illui dit : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » elle le prit pour le jardinier, dont la présence s’expliquait mieux que toute autre à pareille heure, et elle lui « lit : s Seigneur, si tu l’as enlevé, dis-moi où tu l’as mis et je le prendrai. » Elle est si pleine de la pensée du Sauveur enseveli qu’elle ne le désigne même pas nommément. Jésus lui dit alors ces simples mots : « Marie ! » — « Maître ! » s’écria-t-elle aussitôt en se retournant tout à fait vers lui, et elle se jeta à ses pieds pour les embrasser et le retenir. Mais Jésus reprit : (i-r) âmou (iou. Joa., xx, 17. La Vulgate traduit : noli me tangere, « ne me touche pas. » D’autres traduisent autrement, parce qu’ils ne s’expliquent pas comment le Sauveur défendrait à

Marie-Madeleine de le toucher, alors qu’il le permet aux saintes femmes, Matth., xxviii, 9, et qu’il le commande à saint Thomas. Joa., xx, 27. Le verbe grec, tZircu, disent-ils, est comme un fréquentatif de la racine âç, « toucher, » il indique un contact prolongé, intensif, et signifie « ajuster, attacher, se saisir d’une chose », d’où le substantif ôiinià, * attache. » Cf. Bailly-Egger, Dict. grecfrançais, Paris, 1895, p. 255, 2202. D’après eux, le sens du » grec est donc : « Ne t’attache pas à moi, » ne me traite pas comme si tu ne devais plus être séparée de moi, comme si tu étais appelée à me suivre là où je vais. — Le Seigneur ajouta qu’il n’était pas monté vers son Père avec son humanité, que par conséquent il n’apparaissait pas encore pour prendre avec lui ceux qui étaient ses amis. Il commanda enfin à Marie-Madeleine d’aller dire à ses frères : « Je monte vers mon Père et votre Père, mon Dieu et votre Dieu. » Joa., xx, 11-17. Cette apparition est indiquée par saint Marc, xvi, 9, en ces termes : « Ressuscité le matin du premier jour de la semaine, il apparut d’abord à Marie-Madeleine, de laquelle il avait chassé sept démons. » — 4. Marie-Madeleine s’acquitta de son message et dît aux disciples : « J’ai vu le Seigneur et voici ce qu’il m’a dit. » Joa., xx, 18. Ceux-ci étaient dans la désolation et dans les larmes ; mais loin d’ajouter foi aux paroles de Marie-Madeleine et des autres saintes femmes, ils prirent leurs affirmations pour des inventions d’esprits en délire. Marc, xvi, 10, 11 ; Luc, xxiv, 10, 11. Les deux disciples d’Emmaùs font allusion à ces récits des femmes, mais sans y croire. Luc, xxiv, 22-24. Les Évangélistes ne parlent plus ensuite de Marie-Madeleine. — 5. Il est très vraisemblable qu’elle assista aux principales manifestations de Notre-Seigneur en Galilée et ensuite à son ascension. Elle devait être aussi au nombre des femmes qui se trouvaient dans le cénacle avec la Sainte Vierge et qui reçurent le Saint-Esprit à la Pentecôte. Act., i, 14 ; ii, 3. Mais son nom n’apparaît plus dans les Livres Saints.

IV. Identité des trois Marie. — 1° Diversité des opinions. — 1. Les Pères ne sont pas tous du même sentiment sur la question des trois Marie. Clément d’Alexandrie, Pœdag., ii, 8, t. viii, col. 430, n’en admet qu’une. Origène, In Matth., xxxv, t. xiii, col. 1721, fait de la pécheresse de saint Luc, des Marie de saint Matthieu et de saint Marc, et de la Marie-Madeleine de saint Jean, trois personnes différentes. Il est suivi par Théophylacte, Euthymius, Sévère ou Servius dans la Catena Lucm, vii, t. i, col. 775, etc. Les Constitutions apostoliques, m, 6, t. i, col. 769, et saint Jean Chrysostome, Hom., lxii, 1, t. viii, col. 342, distinguent nettement entre la pécheresse et la sœur de Lazare. Tertullien, De pudicit., xi, t. ii, col. 1001, les identifie. Saint Ambroise, In Luc, ri, 14, t. xv, col. 1672, regarde la non-identité comme possible, mais il ajoute que la pécheresse a fort bien pu devenir une femme plus parfaite. Saint Hilaire, In Ps. cxxil, 5, t. ix, col. 748, est pour la distinction. Saint Jérôme, Interpret. Origen. in Cant., Hom. i et ii, t. xxiii, col. 1123, 1130 ; In Matth., iv, 26, 7, t. xxvi, col. 191, sans doute sous l’influence d’Origène, admet que les deux onctions ont été faites par deux femmes différentes. Saint Augustin tantôt croit à l’identilé, De consens. Evang., l, 79, t. xxxiv, col. 1155, et tantôt hésite à l’affirmer. In Joa., xlix, 11, t. xxxv, col. 1748. L’auteur du Sermo xxxv, ad frat. in eremo, inséré dans ses œuvres, t. XL, col. 1298, bien que postérieur à ce Père, affirme catégoriquement que Marie la pécheresse est la sœur de Marthe et qu’à la résurrection elle est devenue « l’apôtre des apôtres ». Saint Grégoire le Grand, In Ezeck., i, 8, 2 ; Hom. in Evang-, ii, 33, 1, t. lxxvi, col. 854, 1239 ; Epist., xxv, t. lxxvii, col. 877 ; Expos, in I Reg., iv, 3, 13, t. lxxix, col. 243, est invariablement pour l’identité des trois Marie. Saint Bernard partage le même avis, Serm. ni Dont, vi post Peut., 4 ; Serm. m in Assumpt. B. M., 2 ; Serm. iv in Dedic. Eccles., 3, non cependant