Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome IV.djvu/409

Cette page n’a pas encore été corrigée

783 MARIE, MÈRE DE DIEU 784

En cours Marije, vil-vm (Evangelia apocrypka, 2e édit., Tischendorf, Leipzig, 1876, p. 1W7, 117-179), racontent qu’en accomplissement du vœu fait par ses parents, Marie fut conduite au Temple à l’âge de trois ans, qu’elle en monta seule les degrés, y fit son vœu de virginité et y demeura pour être élevée avec les autres vierges. Là elle jouit des visites quotidiennes des anges et de visions divines. Quand elle eut atteint sa quatorzième année, le grand-prêtre voulut la renvoyer dans sa famille pour qu’elle se mariât. Mais elle objecta son vœu. Le grandprêtre embarrassé consulta le Seigneur, puis fit venir les jeunes gens de la famille de David et promit Marie pour épouse à celui dont la verge fleurirait et sur laquelle le Saint-Esprit se reposerait en forme de colombe. Joseph fut l’heureux privilégié. Cette légende est adoptée par saint Grégoire de Nysse et saint Germain de Constantinople, dans leurs sermons cités plus haut. Le Coran, xix, 16, parle aussi de Marie née de parents très âgés, s’éloignant ensuite de sa famille du côté de l’Orient et prenant en secret un voile pour se couvrir. L’auteur du Christus patiens, faussement attribué à saint Grégoire de Nazianze, t. xxxviii, col. 244, écrit également d’après la même légende. — 2° En fait, les enfants mâles premiers-nés avaient seuls à être présentés au Temple, parce qu’ils appartenaient de droit au Seigneur. Exod., Xiil, 2, 12. Pourtant, il n’est nullement étonnant que les parents de Marie, surtout s’ils habitaient à Jérusalem près du Temple, aient eu la pieuse pensée d’y présenter leur enfant, pour remercier le Seigneur de la leur avoir donnée à la suite de longues prières, s’il faut en croire les apocryphes. Cette démarche se conçoit encore mieux de la part de Marie. Les paroles qu’elle adressera bientôt à l’ange : « Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d’homme ? » Luc, i, 34, indiquent qu’elle avait consacré à„ Dieu sa virginité par un vœu exprès. Cf. S. Augustin, De sancta virginit., i, 4, t. XL, col. 398. Il est possible qu’elle ait fait ce vœu à un âge très Rendre, surtout si le développement de son intelligence et de sa conscience a, par la grâce de Dieu, devancé les lois de la nature, ainsi que plusieurs Pères l’admettent pour saint Jean-Baptiste, d’après Luc, I, 41. Cf. Tertullien, De carne Christi, 21, t. ii, col. 788 ; S. Ambroise, De fide, iv, 9, 113, t. xvi, col. 639 ; S. Cyrille de Jérus., Catech., iii, 6, t. xxxiii, cot. 436, etc. Cependant on ne peut rien affirmer de précis à ce sujet, et l’argument en vertu duquel Notre-Seigneur n’a dû refuser à sa mère aucun des dons naturels ou surnaturels qui dépendaient de sa munificence filiale, est un argument a priori, dont l’application doit être réglée par l’enseignement ou la pratique de l’Église. Or, dans sa liturgie, l’Eglise admet le fait de la présentation de la Sainte Vierge au Temple, mais elle se tait et sur l’âge de Marie quand elle accomplit cet acte et fit son vœu, et sur les dons naturels et extranaturels dont elle fut gratifiée. — 3° L’éducation de Marié dans le Temple, affirmée par les apocryphes, est assez problématique. Nulle part la littérature juive ne mentionne la coutume d’élever des jeunes filles dans le Temple. Voir Éducation, t. ii, col. 1595. Josèphe, Bell, jud., V, v, 5, décrit par le détail les locaux dont se composait l’édifice sacré ; aucun n’est indiqué comme destiné à recevoir des jeunes filles. Cf. Reland, Antiguitates sacrée, Utrecht, 1741, p. 52-54 ; Schûrer, Geschichte des jûdischen Volkes im Zeit J. C, Leipzig, t. ii, 1898, p. 262-279, 325. Sans doute, le jeune Joas fut élevé dans l’ancien Temple jusqu’à l’âge de sept ans. IV Reg., XI, 3. Mais il était roi et ce séjour lui était imposé par les circonstances. Quant aux jeunes filles « enfermées », que l’attentat sacrilège d’Héliodore faisait courir de tous côtés, II Mach., iii, 19, rien ne fait supposer qu’elles habitassent le Temple. Autour du parvis des prêtres, il est vrai, il existait des salles qui avaient une double entrée, l’une par l’intérieur de ce parvis, et l’autre par la grande cour des gentils. Les femmes pouvaient ainsi accéder au moins dans la partie de ces salles qui se trouvait en dehors de l’enceinte sacerdotale. C’est apparemment dans’l’une de ces salles que plus tard Marie et Joseph trouvèrent l’enfant Jésus au milieu des docteurs. Luc, ii, 46. Y avait-il des chambres au-dessus de ces salles, ou d’autres locaux en dehors des cours du Temple, pour y recevoir des jeunes filles, et les élever ? Rien n’autorise à l’affirmer. Dans sa description de la vie de la Sainte Vierge avant l’annonciation, saint Ambroise, De virgin., II, ii, 9, 10, t. xvi, col. 209, 210, suppose expressément que Marie vivait dans la maison de ses parents. La maison de sainte Anne était séparée du Temple par une route et par le Birket Israël, piscine qui avait quarante mètres de largeur. Voir t. iii, col. 1348, et le plan, col. 1326. Rien, n’était donc plus facile à la jeune enfant que d’être conduite et ensuite de se rendre elle-même dans la maison du Seigneur pour y prier. Ainsi faisait, à cette époque même, Anne la prophétesse, qui « ne s’éloignait pas du Temple et servait Dieu jour et nuit dans les jeûnes et les supplications », Luc, ii, 37, sans qu’on soit en droit d’en conclure qu’elle habitait dans le Temple même. Cf. Corn. Jansénius, Tetrateuchus in sanct. J. C. Evang., Louvain, 1699, p. 484 ; Knabenbauer, Evang. sec. Luc, Paris, 1896, p. 138. Une basilique fut bâtie par Justinien sur l’esplanade de l’ancien Temple en l’honneur de la Sainte Vierge. Elle prit le nom de Sainte-Marie la Neuve, pour qu’on ne la confondît pas avec l’église de la Nativité. Par la suite, on l’appela l’église de la Présentation, quand on voulut localiser en cet endroit le séjour de Marie dans le Temple. C’est maintenant la mosquée el-Aksa. Cf. V. Guérin, Jérusalem, p. 362 ; Liévin, Guide de la Terre Sainte, t. i, p. 447. — 4° La présentation de la Sainte Vierge est mentionnée officiellement pour la première fois comme objet de fête dans une constitution de Manuel Comnène, en 1166. D’Orient, la fête s’introduisit à la cour papale d’Avignon, en 1371. Sixte IV en institua l’office, un siècle plus tard, et Sixte V en étendit la célébration à toute l’Église, en 1585. Cf. Kellner, Heortologie, p. 155, 156. La liturgie ecclésiastique de cette fête ne garantit officiellement que le fait même de la présentation de Marie, en négligeant tous les détails consignés dans les apocryphes. Voir Gosselin, Instructions sur les principales fêtes de l’année, 3 in-12, Paris, 1880, t. iii, p. 360-385.

v. les fiançailles.

1° Les jeunes filles juives se mariaient très jeunes. Elles étaient nubiles dès l’âge de douze ans et demi. Suivant les circonstances, on attendait plus ou moins pour les marier. Les fiançailles précédaient et se célébraient suivant un certain cérémonial. A partir de ce moment, la fiancée appartenait légalement à son fiancé, bien que la cohabitation ne commençât qu’au mariage, ordinairement postérieur d’un an aux fiançailles. Voir Fiançailles, t. H, col. 2230-2232. Marie fut fiancée à Joseph, qui était son parent. Voir Joseph (Saint), t. iii, col. 1670. Il est possible que la Sainte Vierge, dont on connaît une sœur, mais à laquelle aucun frère n’est attribué, ait été une héritière, comme le donne à penser son voyage à Bethléhem à l’époque du recensement, et qu’en conséquence elle ait été obligée de se marier avec un homme de sa tribu. Num., xxxvi, 6. Mais la loi ne l’obligeait pas à épouser un parent et même elle excluait formellement certains degrés de parenté. Voir Mariage, col. 760. Cette union fut donc le résultat d’un choix probablement fait, suivant la coutume, par les parents de saint Joseph.

2° On peut se demander comment se concilient en Marie le vœu de virginité et le consentement aux fiançailles. Sans-doute, la Sainte Vierge comptait bien que Dieu, qui lui avait inspiré son vœu, interviendrait providentiellement pour en assurer l’exécution »