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MARIAGE

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conjugale les règles de l’Évangile. — 1° La loi chrétienne du mariage. — 1. Saint Paul flétrit les docteurs qui prohibent le mariage. I Tim., iv, 3. Les Esséniens professaient l’aversion du mariage. Josèphe, Ant. jud., XVIII, i, 5. En dehors de la Palestine, la réprobation du mariage faisait partie de la doctrine de la gnose alors â ses débuis. Les faux docteurs prétendaient, comme plus tard Saturnin et Basilide, que le mariage et la génération étaient des œuvres de Satan. Cf. S. Irénée, Adv. heures., i, xxiv, 2, t. vii, col, 675, et le pseudo-Ignace, Epist. ad Philadelp., 6, t. v, col. 829. Ces hérétiques ne s’abstenaient d’ailleurs du mariage que pour se livrer aux pires immoralités. L’Apôtre rappelle la loi évangélique sur l’indissolubilité abolue du mariage. Rom., va, 2, 3 ; I Cor., vii, 10, 11. Il ne permet qu’une exception à la règle : quand, dans un mariage, l’une des deux parties est chrétienne et l’autre infidèle, si cette dernière ne consent pas à vivre en paix, s’en va et se marie avec un autre, la partie chrétienne recouvre sa liberté et peut de son côté contracter un nouveau mariage. I Cor., vii, 1 2-15. Voir t. ii, col. 1453. Cf. M. Rossallus, De sententia Pauli I Cor., vii, 42-47, dans le Thésaurus de Hase et Iken, Leyde, 1732, t. ii, p. 798-809. En dehors de ce cas, le mariage ne cesse pas d’exister validement. À la manière dont s’exprime l’Apôtre, « je dis, non le Seigneur, » on conclut généralement qu’il conseille, mais qu’il n’ordonne pas au fidèle de rester avec l’infidèle. Les motifs pour lesquels la cohabitation est souhaitable sont la possibilité de convertir l’infidèle et l’intérêt qu’il y a à sauver les enfants. Mais ce sont là deux résultats souvent problématiques, auxquels il n’est pas toujours sage de sacrifier la liberté et la paix que Dieu veut assurer à ses serviteurs. Cf. Cornely, In I epist. ad Cor., Paris, 1890, p. 179-188. — 2. Saint Paul laisse à tous la plus grande liberté à l’égard du mariage. Il conseille’aux non-mariés et aux veufs de rester tels qu’ils sont, v-pourvu que leur abstention n’implique aucun blâme contre le mariage et ne se propose pour but que la pratique delà continence chrétienne. I Cor., vii, 26-28. Les parents sont donc parfaitement libres de marier leur fille, s’ils le jugent bon, et la veuve, bien que plus heureuse dans l’état où elle se trouve, peut se remarier, si tel est son désir. I Cor., vii, 36-40. Il en est cependant auxquels l’Apôtre recommande formellement le mariage ; ce sont les célibataires, les veufs et surtout les jeunes veuves qui se sentent incapables de garder la continence en dehors de l’état de mariage. I Cor., vii, 2, 8, 9 ; I Tim., v, 14. Il suit de là que les secondes noces sont permises, quelquefois même désirables. Toutefois, comme elles supposent en général une certaine incapacité de résister aux désirs charnels, saint Paul défend d’admettre au nombre des évêques, des diacres et des veuves employées au service de l’Église, des personnes qui ont été mariées plus d’une fois. I Tim., iii, 2, V& ; v, 9. — 3. Une grave infraction à la loi du mariage s’était produite à Corinthe. Un chrétien avait épousé la femme de son père, c’est-à-dire une femme prise en secondes noces par son père. Cf. Lev., xvhi, 8. Cette union allait contre les prescriptions mosaïques et surtout contre les convenances naturelles les plus élémentaires. Saint Paul n’hésita pas à excommunier le coupable. I Cor., v, 1-15.

2° La vie chrétienne dans le mariage. — 1. Tout en honorant le mariage comme une institution divine et nécessaire, l’Apôtre constate qu’il opposé généralement un obstacle à la vie parfaite. La femme mariée s’inquiète du monde et s’occupe de plaire à son mari. I Cor., vii, 34. On ne peut l’en blâmer. Mais il y a là un attrait d’ordre inférieur qui, joint aux tribulations de la vie de famille, rend l’étal de mariage moins désirable que le célibat chrétien. D’ailleurs la vie est courte ^’il ne faut donc pas s’absorber dans les soins temporels ; « que ceux qui ont des épouses soient comme n’en ayant pas, » c’est-à-dire qu’ils De laissent pas les soucis conjugaux prévaloir contre les

exigences ou même les convenances du service de Dieu. I Cor., vii, 29. — 2. L’Épitre aux Hébreux, xiii, 4, demande « que le mariage soit honoré et le lit nuptial sans souillure ». Saint Paul explique qu’en vertu du mariage, le mari se doit à sa femme et la femme à son mari, de sorte que le corps de chaque conjoint appartient, non à lui-même, mais à l’autre conjoint, lequel du reste n’est autorisé à s’en servir que pour les fins voulues de Dieu. Cette mutuelle servitude ne peut être interrompue que temporairement, par consentement réciproque et en vue d’un avantage spirituel, comme la prière. Encore faut-il revenir au plus tôt à la vie commune, pour se garantir contre la tentation. I Cor., vii, 3-5. — 3. D’autres devoirs s’imposent encore aux époux. Le mari doit aimer sa femme, Eph., v, 25 ; Col., iii, 19, la nourrir et en prendre soin. Eph., v, 29. La femme doit être soumise à son mari, Eph., v, 22-24 ; Col., iii, 18, le respecter, Eph., v, 33, et l’interroger à la maison pour s’instruire des choses de la foi. I Cor., xiv, 35. Saint Pierre recommande aussi aux femmes d’être soumises à leurs maris, afin de ramener à Dieu ceux qui en seraient éloignés ; il veut qu’elles gardent en tout la modestie et le calme, sous le regard de Dieu, Il exige que les maris se montrent intelligents dans l’honneur qu’ils doivent à leurs femmes, plus faibles qu’eux physiquement, mais leurs cohéritières au point de vue de la grâce et du salut. I Pet., iii, 1-7. — 4. Dans ces textes, il n’est point fait d’allusion directe au caractère religieux et sacramentel du mariage chrétien. Saint Ignace, Epist. ad Polycarp., 5, t. v, col. 724, dit qu’il est convenable que les époux ne s’unissent qu’avec l’avis de l’évêque, pour que les mariages soient selon le Seigneur et non réglés par la passion. Il ne connaît pas de rite particulier transmis par les Apôtres pour la célébration du mariage chrétien. Les premiers fidèles contractaient donc leur union à la manière de^ Juifs, ou même avec les formes légales en vigueur dans l’empire, en excluant toutefois ce qui pouvait avoir un caractère païen. Les mariages romains se contractaient d<> trois manières : par l’usage, en cohabitant pendant un an et un jour ; par contrat, quand les parties se liaient en simulant une vente, et par une cérémonie religieuse appelée confarreatio. Cette dernière forme ne pouvait être employée par les époux chrétiens, à cause de ses rites idolâtriques. Chez les Grecs, la célébration du mariage comportait également des actes idolâtriques dont ne pouvait s’accommoder la foi chrétienne. Cf. Rich, Dict. des antiq. grecques et romaines, trad. Chéruel, Paris, 1873, p. 186, 396 ; Fustel de Coulanges, La Cité antique, Paris, 7e édit., p. 43-45. Malgré l’absence de l’intervention ecclésiastique, saint Paul attribue au mariage chrétien d’importants effets de grâce. Comme le baptême et la pénitence, le mariage a le caractère de guérison et de préservation ; il contient dans de justes limites les instincts sensuels, en leur accordant la satisfaction à laquelle ils ont droit, I Cor., vii, 8, 9 ; I Tim., v, 14, en empêchant ainsi le péché, en coupant court à la tentation, I Cor., vii, 5, et en soumettant la chair à une discipline morale qui contribue à sanctifier un état dans lequel la nature tend toujours à avoir la première place. I Cor., vii, 5 ; Heb., xiii, 4. Le mariage chrétien devient aussi un moyen de sanctification, puisque l’épouse doit se sauver en engendrant des enfants, sans cesser pour cela de pratiquer les vertus chrétiennes. I Tim., ii, 15. Dans ces conditions, le mariage, qui sert à édifier, à compléter et à perpétuer l’Église, doit nécessairement recevoir d’elle l’appui et la bénédiction d’une grâce spéciale. Cf. Dôllinger, Le christianisme et l’Église, trad. Bayle, Paris, 1863, p. 510-512. Sur le mariage, sacrement de la loi nouvelle, voir Dictionnaire de théologie, au mot Mariage.’III. SYMBOUSUEDB MARIAGE CHRÉTIEN. — 1° DaDS le

Nouveau Testament, le Sauveur prend facilement le titre d’époux et fait représenter sous la figure du mariage son