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MACPÊLAH

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du champ de Macpêlah, achetée d’Éphron le Héthéen. Gen., xlix, 29-30. Après avoir fait embaumer le corps à la manière égyptienne et avoir obtenu l’assentiment du pharaon, Joseph, accompagné de ses frères et d’une multitude d’Égyptiens, transporta le cercueil de son père à Hébron et le déposa dans la caverne de Macpêlah. Gen., l, 14.

2. Après avoir raconté la déposition de Jacob, l’Écriture ne prononce plus le nom de Macpêlah ; son souvenir est cependant une fois encore évoqué, par la mention de la sépulture de ce même patriarche et celle de ses fils, mais pour contredire, semble-t-il, le récit de la Genèse : c’est dans le Nouveau Testament, au livre des Actes, vii, 15-16. Dans ce passage, saint Etienne, parlant devant le grand conseil, s’exprime ainsi sur la sépulture de ces patriarches : « Jacob, dit-il, descendit en Egypte et [y] mourut ainsi que nos pères [les douze patriarches ] et on les transporta à Sichem et on les déposa dans le monument qu’Abraham avait acheté à prix d’argent des fils d’Hémor à Sichem. » Les suppositions faites par les commentateurs et les modifications proposées par eux ne résolvent pas la difficulté. Même en admettant qu’Abraham, à son passage à Sichem, ait acheté le champ situé près de cette ville, racheté par Jacob et où Joseph fut enterré plus tard, il reste toujours que Jacob a été déposé non à Sichem, mais à Hébron, à Macpêlah, et son nom au livre des Actes ne peut être changé pour un autre. La phrase demeurera toujours anormale pour nous ; pour être régulière et complète, selon notre mode de nous exprimer, elle devrait être formulée de cette manière : « Jacob et nos pères étant morts en Egypte, on les transporta à Hébron, où on les déposa dans le sépulcre qu’Abraham avait acheté à prix d’argent d’Éphron, fils de Heth, à Macpêlah ; quant à Joseph il fut déposé à Sichem dans la partie de la campagne achetée par Jacob des fils d’Hémor, â Sichem, » ou bien : « Jacob et nos pères étant morts furent déposés, le premier à Hébron… et les autres à Sichem… » Cf. Jos., xxiv, 32. La manière dont s’est exprimé saint Etienne est donc inexacte dans sa concision. — Quoi qu’il en soit de la forme logique de la phrase de saint Etienne, elle mentionne une tradition juive qu’on retrouve aussi dans Josèphe : la translation dans la terre de Chanaan des restes des onze frères de Joseph. Act., vii, 15-16. La concision du langage de saint Etienne ne laisse pas deviner s’il entend parler de Sichem ou d’Hébron ; mais c’est ce dernier endroit que désigne un de ses contemporains ou du moins de l’auteur du livre des Actes, l’historien Josèphe : « Les trères de Joseph, dit cet écrivain, moururent après avoir vécu heureux en Egypte et leurs corps furent transportés quelque temps après par leurs descendants et leurs fils à Hébron, où ils furent ensevelis. » Anl. jud., II, viii, 2. Cet historien avait déjà produit la même assertion dans son histoire de la Guerre de Judée, IV, ix, 7. Parlant d’Hébron il ajoute : « Les habitants d’Hébron racontent qu’Abraham, l’ancêtre des Juits, habita cette ville après avoir émigré de la Mésopotamie et que ses entants descendirent de là en Egypte ; on montre jusqu’aujourd’hui leurs monuments dans la même ville, construits d’un très beau marbre et d’un travail magnifique. » Un texte reproduit par Pierre Diacre, bibliothécaire du Mont-Cassin, et considéré par le professeur italien Gamurrini comme un fragment extrait de la relation du pèlerinage de sainte Sylvie d’Aquitaine, mentionne formellement à YAbramiri d’Hébron « les corps des onze fils de Jacob ». De lotis sanctis, t. clxxiii, col. 1115 ; édit. Gamurrini, Rome, 1887, p. 124-125. Saint Jérôme contredit cette tradition. Décrivant le pèlerinage de sainte Paule Romaine, après avoir conduit la sainte pèlerine an puits de Jacob près de l’ancien Sichem, il ajoute : » Et partant de là elle vit les tombeaux des douze patriarches. » Epist., cviii,

ad Eustochium, t. xxii, col. 889. Le saint docteur fait certainement allusion au tombeau de Joseph voisin du puits de Jacob. Les traditions locales juive, samaritaine et chrétienne indiquent le tombeau de Joseph près de Sichem, sans nommer les autres patriarches. Les rabbins ont toujours été d’accord pour assurer que les Israélites en quittant l’Egypte ont emporté avec eux les ossements des pères des tribus, mais ils diffèrent souvent pour désigner l’endroit où ces ossements ont été déposés. Cf. Carmoly, Itinéraires de la Terre-Sainte, Bruxelles, 1847, p. 151-152.

2° Monument élevé sur le tombeau des patriarches.

— 1. Un monument fut élevé à une époque ancienne au-dessus de la caverne de Macpêlah, qui renfermait les restes des patriarches. Josèphe atteste son antiquité quand, parlant des traditions du peuple d’Hébron par rapport à Abraham, il ajoute : « On montre jusqu’à maintenant leurs monuments dans cette ville, leurs monuments, t « |*vrififjieïoi, construits avec un très beau marbre et d’un travail magnifique. » Bell, jud., IV, IX, 7. « Évidemment, dit Victor Guérin, citant ces paroles, il ne s’agit pas ici de la grotte funéraire qu’Abraham acheta d’Éphron, grotte taillée dans le roc vif et que ne décorait certainement aucun marbre, mais, comme plusieurs critiques le supposent, entre autres F, de Saulcy, Josèphe désigne dans ce passage l’admirable enceinte du Haram d’Hébron, dont les blocs gigantesques sont d’une pierre qui imite la beauté du marbre ; entreautres par la régularité de ces assises et l’élégance de ses pilastres engagés, elle atteste un travail des plus remarquables. » Judée, t. iii, p. 223. Josèphe, en disant que ce monument existe « jusqu’à maintenant », (Jiéxp’toO vOv, témoigne par là même de son antiquité. Parla Hérode l’Ancien à qui on aurait pu être tenté d’en faire honneur est écarté ; Josèphe ne le lui attribue point dans l’énumération des diverses œuvres exécutées par ce prince. Il ne l’attribue pas davantage aux Asmonéens. On ne peut cependant croire l’historien juif quand il fait remonter à Abraham lui-même l’origine du monument. Ant. jud., 1, xiv. — Outre les deux points, l’antiquité du monument et son origine judaïque, Josèphe, dans ce passage, en affirme un troisième : la permanence du monument après toutes les destructions de la guerre de Judée. C’est, en effet, dans son histoire de cette guerre écrite à Rome plusieurs années après sa cessation, que l’auteur atteste : « on voit ce monument jusqu’aujourd’hui, » {lé^pt toO vOv… SetxviiToci.

2. De la subsistance après la guerre de Judée du monument dont parle Josèphe, sans doute il ne résulte pas que le monument actuel est le même ; toutefois deux cents ans après cet historien, vers le commencement du IVe siècle, on constate qu’un monument sépulcral, également remarquable, s’élevait encore sur le tombeau des patriarches à Hébron. Eusèbe de Césarée (265-c. 340) l’affirme positivement dans son Onomasticon . « Arbô : c’est Chébron… On y contemple le mausolée, xb (ivrifna, d’Abraham. » Au mot’Ap6&>, p. 54, ce mausolée (memoria), ajoute le pèlerin de Bordeaux en 333, est disposé en carré et fait de pierre d’une grande beauté. It inerarium, t. viii, col. 792. Cf. S. Jérôme, Onomastic, p. 55 ; De loc. et nominibus locorum hebraic., au mot Arboc, t. xxiii, col. 852 ; Epist., xlvi, t. xxii, col. 491. (Les Hébreux prétendaient alors, d’après une interprétation de Jos., xiv, 15, généralement abandonnée aujourd’hui, qu’Adam avait été enseveli à Macpêlah, qui devint ainsi après la sépulture de Jacob, le tombeau des Quatre [patriarches], d’où serait venu à Hébron le nom de Qarial-Arbé 1, « la ville des Quatre. » Ce sentiment semble avoir été accepté par saint Jérôme et suivi par un grand nombre d’autres après lui. Epist., cvth, 23, col. 862 ; Quest. in Gen., ibid., col. 978 ; cf. Hébron, t. hi, col. 561.)

Lorsque, vers l’an 570, le pèlerin de Plaisance, Anlo-