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LIVRE


en avoir entendu lire deux ou trois colonnes, déchira et jeta dans un réchaud allumé était certainement un rouleau et très probablement de papyrus. Jer., xxxvi, 21-23. Mais pour les écrits sacrés, regardés comme tels, il semble que l’usage le plus ancien ait exigé l’emploi de peaux travaillées. L’exemplaire de la Thora envoyé à Ptolémée Philadelphe par le grand-prêtre Éléazar était écrit en lettres d’or sur des peaux (SiçOépat) dont le pharaon admira la finesse et l’agencement. Josèphe, Antiq. jud., xii, 2. Du reste, cette coutume s’est maintenue jusqu’à nos jours, comme il est aisé de le constater par l’examen des livres liturgiques hébreux déposés dans les principales bibliothèques. — À proprement parler, la matière employée par les Juifs pour les rouleaux des synagogues n’était pas le parchemin, mais un cuir véritable que le Talmud appelle gevil (Sm) et la Mischna simplement peau (i"iy). Le parchemin leur était connu et ils en distinguent deux espèces, le qelaf (^b-) et le doxostos (dtddiddvj), mot évidemment dérivé du grec, mais d’une étymologie incertaine. On se sert du parchemin pour les phylactères et on peut s’en servir pour les megilloth. Sur les passages du Talmud relatifs à ces matériaux et sur les règles à suivre pour le choix et l’assemblage des peaux destinées à former un rouleau sacré, voir Blau, Studien zum althebr. Buchwesen, Strasbourg, 1902, p. 22-29.

3° Papyrus. — Bien que les papyrus les plus anciens parvenus jusqu’à nous ne remontent probablement pas

104. — Scribe accroupi Musée du Louvre

au delà de trois mille ans avant J.-C, nous pouvons affirmer avec certitude que le papyrus était connu bien auparavant. Le signe hiéroglyphique du rouleau de papyrus, ^h>, pour désigner le livre, la science et les idées abstraites, paraît aussi ancien que l’écriture elle-même et on le trouve représenté dans les peintures et les sculptures des époques les plus reculées. On voit au Musée du Louvre un scribe accroupi de la cinquième dynastie déroulant sur ses genoux un livre en tout pareil à ceux que les tombeaux égyptiens nous ont livrés (fig. 104). Ce n’est pas ici le lieu de décrire la fabrication du papyrus. Pendant de longs siècles l’Egypte en eut le monopole. Plus tard elle l’exporta dans le monde civilisé par l’intermédiaire des Phéniciens. La Grèce ne l’adopta qn’au vi siècle avant notre ère. Auparavant on écrivait peu en

pays grec. Les poésies se transmettaient oralement et il suffisait d’une copie d’Homère sur peau ou sur bois pour chaque école d’aèdes. Hésiode, d’après Pausânias, IX, xxxi, 4, était gravé sur plomb, comme on l’a dit plus haut. Les compositions en prose des logographes, des historiens et des philosophes, ne pouvant pas aisément s’apprendre par cœur, firent la fortune du papyrus. Au Ve siècle, il se vendait à Athènes, très cher encore, sous le nom de z « pfr) ; (papyrus non écrit) qu’il gardera. Après la fondation d’Alexandrie, l’exportation du papyrus prit une nouvelle extension et il devint d’un usage général pour toutes les œuvres littéraires. C’est ce qui explique l’erreur de Varron et de Pline qui en fixent la [découverte à cette époque. Une fois adopté par les peuples civilisés comme matière à écrire, le papyrus régna sans rival. Le parchemin, malgré ses incontestables avantages, ne réussit que très lentement à le détrôner. Pratiquement, jusqu’au iv « siècle de notre ère, tous les ouvrages littéraires sont écrits sur papyrus. Quand la récolte de papyrus était mauvaise en Egypte, le commerce de la librairie était en souffrance dans le monde entier. Pline, R. N., xiii, 13. Nous pouvons supposer avec grande probabilité que les originaux de tous, les livres du Nouveau Testament ont été écrits sur papyrus et c’est ce qui explique leur disparition rapide. Saint Paul prie Timothée de lui rapporter de Troade les livres et surtout les parchemins ((j.eu.ëpàvaç) qu’il y a laissés, II Tim., iv, 13 ; mais saint Jean, quand il parle de lettre à écrire, ne songe qu’au papyrus. II Joa., 12. Or, les rouleaux de papyrus s’usaient assez vite : on. regardait comme très anciens les rouleaux de deux ou trois cents ans. L’usure était bien plus rapide pour les volumes souvent déroulés, tels que les livres canoniques. Aussi n’est-il resté des manuscrits bibliques des trois premiers siècles de notre ère que de rares et courts fragments, échappés comme par miracle à la destruc tion du temps.

4° Parchemin. — Suivant la tradition, le parchemin est originaire d’Asie Mineure, comme le papyrus d’Egypte. Cette tradition, il est vrai, nous arrive escortée de détails controuvés. Au dire de Pline, qui s’appuie sur Varron, lorsque Eumène II (197-158 avant J.- C.), roi de Pergame, eut décidé la fondation d’une grande bibliothèque rivale de celle d’Alexandrie, Ptolémée, pris de

| jalousie, interdit l’exportation du papyrus sur les côtes asiatiques. Eumène fut donc obligé de se rejeter sur d’autres matériaux et de là naquit l’invention du parchemin. Pline, H. N. t xiii, 68. Saint Jérôme fait allusion à cette histoire, mais il substitue Attale à Eumène. Epist., vii, Ad Chromât., t. xxii, col. 339. Cependant le nom de parchemin, pergamena charta, évidemment emprunté au lieu d’origine, ne se rencontre pas, ce semble, avant un édit de Dioclétien de l’an 301. — Le perfectionnement ou, si l’on veut, l’invention attribuée aux rois de Pergame consistait en ceci : la peau au lieu d’être tannée, était d’abord débarrassée de ses poils, corrodée par la chaux, puis frottée et polie à la pierre ponce. — L’invention des Attales trouva d’abord peu de faveur auprès du public, des écrivains et des libraires. Le parchemin, fit concurrence aux tablettes de cire, mais non au papyrus, considéré toujours comme une matière noble, distinguée. Pas un des livres retrouvés à Herculanum, où ils étaient ensevelis depuis l’éruption de l’an 79 de notre ère, n’est en parchemin. Ce nouveau produit ne servit guère d’abord que pour les comptes, les brouillons, les. lettres familières, enfin pour les exemplaires qu’on voulait emporter en voyage. On l’employait aussi comme étui des rouleaux en papyrus (pœnuto, ?aivôlT|ç ou <paclo’vr ( ç) et comme étiquette extérieure (index, metnbranula, ffîlluëoî). Ce ne fut guère qu’au IVe siècle que l’usage en devint général. Pratiquement sa diffusion coïncide avec la victoire du christianisme et ce furent les chrétiens qui, les premiers, l’employèrent en grand pour les.