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LÉVI (TRIBU DE)


les ancêtres de celui-ci avaient été « les serviteurs de la maison de Pharaon », I Reg., ii, 27, formule qui n’est jamais appliquée à Israël dans son ensemble. Sous le coup de l’aversion dont furent l’objet les fils de Lévi par suite du crime de Sichem, ils se tournèrent peut-être plus que les autres Israélites vers les habitants de l’Egypte et acquirent dans ce commerce une culture plus élevée, une certaine connaissance de la religion égyptienne, ce qui ne les empêcha pas d’être les ardents défenseurs de leurs traditions religieuses. « Ainsi Lévi se préparait à prendre la direction spirituelle des autres tribus. Lorsque, après les jours d’oppression, l’heure de la délivrance sonna, ce fut un lévite qui fut choisi pour sauver ses frères de la servitude et pour leur donner leur organisation religieuse, principe de leur unité et de leur future puissance. Les lévites furent tous désignés pour remplir, au sein de la nation nouvelle, les fonctions de ministres du culte ; ils restèrent attachés au service de Jéhovah, dont ils avaient assuré le triomphe. Les analogies que l’on a signalées entre divers éléments des institutions rituelles des Hébreux et des Égyptiens s’expliqueraient très bien par les circonstances que nous venons d’exposer. » A. van Hoonacker, Le sacerdoce lévilique, Londres et Louvain, 1899, p. 309.

III. Division : Prêtres et Lévites. — La tribu de Lévi a compris de tout temps deux groupes distincts de ministres sacrés : les prêtres et les lévites proprement dits. Les premiers appartenaient exclusivement à la famille d’Aaron, les seconds se rattachaient aux autres descendants de Lévi. Voici, du reste, d’après Exod., vi, 16-25, un arbre généalogique qui fera mieux comprendre ce que nous dirons à ce sujet :

Lévi

1. Gèrson, 2. Caath, 3. Mérari.

4. Amrsm, 2. Isaar, 3. Hébron, 4. Oziel.

I

1. Marie, 2. Aaron,

I

3. Moïse.

1. Nadab, 2. Abiu, 3. Eléazar, 4. Ithamar. 1. Gersam, 2. Eliézer.

Phinéès.

Le sacerdoce existait même avant la vocation de la tribu de Lévi. Déjà, au moment de l’exode, Aaron est associé à Moïse, dont il est le porte-voix. Exod., iv, 14. Là, il est appelé « le lévite », titre qui nous le représente comme le chef de l’ordre lévitique. Plus tard il est convoqué par Dieu sur le Sinaï avec ses deux premiers fils, Nadab et Abiu, en compagnie de Moïse et des 70 Anciens. Exod., xxiv, 1, 9. Si Nadab et Abiu se trouvent ici associés à leur père, c’est qu’ils sont considérés comme partageant ses fonctions et sa dignité. Il est probable même que les na’ârê benè Ysrâ’êl, « les jeunes gens » ou « les serviteurs des fils d’Israël », qui, en cetle circonstance, jp. 5, offrent les sacrifices, sont, non pas les fils aînés des familles ou en général « des jeunes gens », mais les ministres du culte constitués parmi les enfants d’Israël, regardés comme s les serviteurs du peuple » dans la célébration du service religieux. Il est vrai qu’Aaron et ses fils ne sont pas encore solennellement consacrés. Mais leur investiture solennelle, Exod., xxviii-xxix, est motivée par l’institution du sanctuaire et l’organisation des cérémonies qui devaient s’y accomplir ; elle ne prouve pas qu’Aaron ne fut pas, avant sa consécration, attaché au service de Jéhovah. Le même motif s’applique au choix et à la consécration des Lévites, destinés a être les aides des enfants d’Aaron.

Les deux groupes lévitiques étaient, comme nous le verrons, nettement distingués par leurs attributions, et

jamais la classe inférieure, quelle qu’ait été sa situation à telle ou telle époque de l’histoire, n’a pu s’élever à la hauteur de l’autre et se confondre avec elle. Cependant la communauté d’origine devait parfois occasionner une certaine obscurité, le mot lévite désignant, dans son acception générale, la tribu tout entière, et, dans son sens restreint, une catégorie spéciale de ministres sacrés. C’est pour cela que, dans quelques livres de l’Écriture, la distinction entre les deux ordres n’est pas aussi bien marquée que dans d’autres. Dans les Nombres, par exemple, le titre de prêtre est réservé aux fils d’Aaron, Num., iii, 3 ; x, 8 ; xvi, 37, 39, etc. ; les lévites « leur sont donnés » comme ministres inférieurs, iii, 6-10 ; ils ne peuvent toucher les vases du sanctuaire sous peine de mort, le soin de les envelopper pour le transport n’appartient qu’aux prêtres, iv, 15, 19, 20 ; Dieu dit à Aaron : « J’ai pris pour vous du milieu des entants d’Israël les lévites vos frères, pour être un don à Jéhovah, afin qu’ils le servent dans le ministère du tabernacle ; mais toi et tes fils avec toi, gardez votre sacerdoce à l’égard de tout ce qui concerne l’autel, etc. », xviii, 6, 7. Dans le Deutéronome, au contraire, le lévite, c’est le membre de la tribu de Lévi, sans détermination ultérieure et sans aucune notion d’infériorité ; le prêtre, c’est le lévite en tant qu’investi du droit à l’exercice des fonctions saintes. Deut., x, 8, 9 ; XII, 12, 18, 19 ; xviii, 3-8. On trouve des expressions comme celle-ci : Kôhânîm ha-leviyyîm, « les prêtres lévites, » Deut., xviii, 1 ; la Vulgate a mis la particule conjonctive, « les prêtres et les lévites, » mais ni le texte massorétique ni les Septante ne la portent, ce qui est conforme à la terminologie habituelle du Deutéronome. Il ne faudrait cependant pas conclure de là que le Deutéronome ignore la distinction entre les fils d’Aaron et les autres membres de la tribu. On remarque, du reste, que, même dans les livres où la distinction est le plus clairement marquée, le mot lévite est parfois employé dans son sens général, sans détermination précise ; ainsi Num., xxxv, 2, 6, 8 ; Jos., xiv, 4 ; xxi, 8.

Les Paralipomènes présentent à la fois les deux caractères que nous venons de constater dans le Pentateuque. D’un côté, la ligne de démarcation est nettement tracée entre prêtres et lévites au point de vue de l’origine. Ceux-ci sont parfaitement distingués de ceux-là dans une énumération des douze tribus avec leurs chefs respectifs : « Les Lévites avaient pour chef Hasabias, fils de Camuel, et les Aaronides, Sadoc. » I Par., xxvii, 17. Il en est de même pour les attributions spéciales à chacun des deux groupes. Cf. I Par., vi, 48, 49 (hébreu, 33, 34) ; XVI, 39, 40 ; xxiii, 13, 28, 20, etc. Voir ce que nous disons plus bas : Fondions. D’un autre côté cependant, malgré ces titres distinctifs, les deux ordres semblent parfois se confondre sous la plume de l’auteur. Ainsi les Lévites sont aussi bien que les prêtres « saints, saints à Jéhovah » >.II Par., xxiii, 6 ; . xxxv, 3 ; ils exercent comme eux le ministère sacré (Sùrêf) « devant l’arche, dans la maison de Jéhovah, envers Jéhovah lui-même ». I Par., xvi, 4, 37 ; xxvi, 12 ; xv, 2. Il semble, d’après I Par., ix, 32, que ce sont des lévites de la famille de Caath, non pas des Aaronides, qui doivent renouveler chaque semaine les pains de proposition, fonction que la Loi réservait aux prêtres. Les lévites et « les prêtres lévites » sont confondus, II Par., v, 4, comme « porteurs de l’arche », du tabernacle, des meubles sacrés qu’ils introduisent dans le nouveau temple ; cependant, au *. 7, ce sont les prêtres qui placent l’arche dans le saint des saints. Dans la description d’une Pâque solennelle, célébrée sous le règne d’Ézéchlas, II Par., xxx, 15, l’auteur, parlant des prêtres et des lévites, dit qu’  « ils offrirent des sacrifices dans la maison de Jéhovah ». Il ajoute plus loin, ji. 23, que les lévites « mangèrent durant la solennité, pendant sept jours, immolant des victimes pacifiques et louant Jéhovah le Dieu