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JOSEPH

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rent la tunique de Joseph, et l’ayant trempée dans le sang d’un chevreau, l’envoyèrent à leur père. Jacob, ayant reconnu la tunique de Joseph, s’écria : a. Une bête féroce a dévoré mon fils, une bête a dévoré Joseph. » Il déchira ses vêtements, se couvrit d’un cilice et pleura son fils fort longtemps. Gen., xxxvii, 25-34. Arrivés en Egypte, les Madianites vendirent Joseph à Putiphar, eunuque du Pharaon et chef de sa garde. Gen., xxxvii, 36 ; xxxix, 1. C’est la traduction exacte de l’hébreu, soi 1 hattabbâhim (Septante : àpxif.âY €l P 0V î « chef des cuisiniers ; » Vulgate : magister militum, « chef des soldats » ). Cf. IV Reg., xxv, 8 ; Dan., ii, 14. Désormais l’Egypte sera le théâtre où s’exercera l’action de Joseph. Cf. Act., vii, 9. II. Joseph en Egypte.

i. date de son arrivée en Egypte. — On peut affirmer avec certitude que Joseph arriva en Egypte du temps des rois Hyksôs, XVe dynastie : ainsi on ne peut contester l’exactitude du témoignage de Jean d’Antioche : 'E6a<jt>eu<jav èv Aîyû’SFtM xai oi xaXoû[j.5voi noniiveç, Fragm., 39, dans Muller, Histor. Grsec. fragm., t. iv, p. 555. Ces rois Hyksôs, de l’égyptien hiq Saousou, « chef, roi des pillards, des voleurs, » dont les Grecs ont tiré Hyksôs, Hykoussôs appliqué au peuple, etpar suite Trotiiiveç, « pasteurs, « étaient d’origine étrangère et asiatique. Champollion, Lettres à M. de Blacas relatives au musée royal égyptien de Turin, in-8°, Première lettre, Paris, 1824, p. 57 ; Rosellini, Monumenti storici, t. i, p.175-178 ; Brugsch, Geschichte Aegypten’s, in-8°, Leipzig, 1877, p. 173-174 ; Ed. Meyer, Geschichte des alten Aegyptens, in-8°, Berlin, 1887, p. 205 ; Maspero, Histoire ancienne, Paris, 1897, t. ii, p. 54, note 4. Ces rois Hyksôs avaient dû hériter en Egypte du domaine royal tel qu’il était vers la fin de la xiv » dynastie ; ils devaient donc exercer une domination immédiate sur le Delta entier d’Avaris à Sais, de Memphis à Bouto. Les monuments trouvés à Tanis et à Bubaste prouvent assez clairement que la partie orientale du Delta était sous leur autorité immédiate ; le reste est démontré par le passage de l’inscription de Stabel-Antar où la reine Hâtasou dit qu’elle « releva les monuments détruits au temps où les Àmou 1= Saousou] régnaient sur la terre du nord ». Golénischeff, Notice sur untexte hiéroglyphique du Stabel-Antar, dans le Recueil de travaux, 1881, t. iii, p. 2-3. — Mais quel était le roi alors régnant et dont Joseph eut à expliquer les songes ? Une tradition assez ancienne affirme que Joseph arriva en Egypte sous un roi appelé Apho phis ; cette tradition nous a été conservée par George Syncelle : nâui erv|i.TOcp(ôv/]Tai Sti ètcI’AtptSçetoç *ip !  ; ev’Iw^tp ttjç AïfûitTou. Chronogr., édit.Dindorꝟ. 1829, p. 115. C’est sans doute l’un des Apôpi des textes égyptiens, et probablement le second, le plus célèbre, celui qui restaura les monuments des Pharaons thébains et qui grava son nom sur les sphinx d’Aménemhât III, ou sur les colosses de Mîrmasaou. Le même historien va jusqu’à dire que les Hébreux arrivèrent enÉgyptel’anl7d’Apophis. Ibid., p. 201. Sur la valeur de ces données chronologiques, cf. Erman, Zur Chronologie der Hyksôs, dans la Zeitschnft fur agyptische Sprache, 1880, p. 125-127 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., Paris, 1896, t. ii, p. 98-99.

n. joseph dans LA maison de putiphar. — Les bénédictions de Dieu accompagnèrent Joseph dans la maison de son maître ; tout lui réussissait heureusement ; aussi gagna-t-il la confiance de Putiphar qui lui livra le gouvernement de sa maison. Joseph fut une source de bénédictions et de prospérité pour la maison de son maître. Gen., xxxix, 2-5. La situation de Joseph dans la maison de Putiphar répond très bien aux coutumes égyptiennes. En Egypte toutes les familles riches avaient un intendant pour gérer leurs affaires : très souvent on voit ces fonctionnaires représentés sur les fresques, surveillant tout ce qui se rapporte à l’agriculture, au jardinage, à la pêche, aux récoltes. « Les hôtels des différentes administrations se pressaient dans l’enceinte avec

leurs directeurs, leurs régents, leurs scribes de toute classe, leurs gardiens, leurs manœuvres qui portaient les mêmes titres que les employés correspondants des administrations d’État : l’Hôtel Blanc, l’Hôtel de l’Or, le Grenier, étaient parfois chez eux, comme chez Pharaon, le double Hôtel Blanc, le double Hôtel de l’Or, le double Grenier. Les plaisirs ne différaient point à la cour du suzerain ou à celle de son vassal : la chasse au désert, la chasse au marais, la pêche, l’inspection des travaux agricoles, les exercices militaires, puis les jeux, les chants, la danse, sans doute aussi les longues histoires et les séances de magie, jusqu’aux contorsions des bouffons attitrés et aux grimaces des nains. » Maspero, Histoire onc., Paris, 1895, 1. 1, p. 298-299, description de la maison d’un seigneur égyptien. — La Genèse, xxxix, 6, fait cette réflexion : « En sorte qu’il (Putiphar) n’avait d’autre soin que de se mettre à table et de manger. » Cette réflexion est tout à fait égyptienne ; en Egypte le seigneur se déchargeait en effet de tout sur le nombreux personnel de sa domesticité. — Bientôt Joseph fut soumis à une grande épreuve. L’Écriture nous dit qu’il <c était beau de visage et très agréable ». La femme de Putiphar s’éprit de passion pour lui et lui fit de coupables propositions. La conduite de cette femme répond à ce que nous savons des mœurs de l’Egypte ancienne, les femmes n’étaient pas des modèles de moralité ; elles s’abandonnaient assez facilement au vice. Yigouroux, Ibid., p. 39-40. Le Papyrus Harris, n° 500, nous a conservé un’vivant souvenir de scènes analogues, pl. xii, lig. 2-11 ; pl. xiii, lig. 3-8 ; cf. Maspero, Études égyptiennes, in-8°, Paris, 1879, t. i, p. 243-249, Erman, Aegypten und àgyptisches Leben in AUerthum, Tubingue, 1885, p. 518-519 ; Maspero, Histoire anc, 1897, t. ii, p. 503-506. — Joseph repousse les avances de la femme de son maître, elle revient à la charge : même résistance énergique de la part de Joseph. Un jour enfin Joseph se trouvant seul dans la maison, la femme de son maître le prend par le manteau et le sollicite au. crime ; le jeune Hébreu indigné s’enfuit en lui laissant son manteau entre les mains. L’Égyptienne, outrée de dépit, l’accuse auprès des gens de sa maison et auprès de son mari ; celui-ci, irrité, fait saisir Joseph et le jette en prison. Mais le Seigneur était avec Joseph ; c’est pourquoi il lui fit trouver grâce devant le gouverneur de la prison, lequel lui remit le soin et la garde de tous ceux qui y étaient enfermés. Gen., xxxix, 6-23.

III. josepe en prison.

Joseph fut d’abord traité avec dureté. Ps. Civ (hébreu, cv), 17-18. Il arriva, on ne sait pas combien de temps après, que deux eunuques du Pharaon, son grand échanson et son grand boulanger, offensèrent leur maître et furent jetés dans la même prison que Joseph. Les gens au service du Pharaon étaient aussi nombreux que variés ; c’était une véritable hiérarchie ; le Papyrus Hood et un autre document du British Muséum nous en ont conservé la liste. Cf. Brugsch, Die Aegyptologie, in-8°, Leipzig, 1891, p. 211-227 ; Maspero, Éludes égyptiennes, 1888, t. ii, p. 1-66. On nous parle de « l’inspecteur des fabricants des cheveux du roi », Mariette, Les Mastabas, in-î°, Paris, 1891, p.250, 446, 447 ; du « directeur des fabricants des cheveux du roi », E. et J ; de Rougé, Inscriptions hiéroglyphiques recueillies en Egypte, 2 in-4°, Paris, 1879-1880, pl. lx ; du « directeur de ceux qui font les ongles du roi », Mariette, Ibid., p. 283-284 ; du « directeur des huiles parfumées du roi et de la reine », Mariette, Ibid., p. 298 ; des « cordonniers royaux », Maspero, Ibid., t. ii, p. Il ; du « directeur des étoffes du roi », Mariette, Ibid., p. 185 ; du « directeur du linge blanc », Mariette, Ibid., p. 252 ; des « blanchisseurs royaux », Maspero, Les contes populaires, ^’édit., Paris, 1889, p. 2 ; des « . chefs des musiciens et préposés aux divertissements du roi ». Mariette, Ibid., p. 154-155. — Plus considérable encore était le personnel occupé à l’alimentation du roi : « Le personnel de bouche dépas-