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JESUS-CHRIST


simple filiation adoptive, comme celle qui convient aux serviteurs de Dieu, à des degrés plus ou moins élevés. Voir Fils de Dieu, t. ii, col. 2257. Les textes s’opposent à cette interprétation. Quand, par exemple, Pierre déclare au nom des Apôtres ce qu’il reconnaît en Jésus, . _ il prétend bien le mettre au-dessus de Jean-Baptiste, d’Élie, de Jérémie et des prophètes. Ainsi il l’appelle le Christ, et non pas seulement un fils de Dieu, comme pouvaient l’être ceux qu’on vient de nommer, mais « le Fils du Dieu vivant », 6 uiôç toO ©eoû. En approuvant sa réponse, le Sauveur évoque le souvenir, non seulement du Père qui est dans les cieux, mais de son Père à lui, 6 it*-ri)p (iou. Puis, il établit une sorte de parallèle entre la situation qu’il fait à Pierre et celle que Pierre lui a reconnue : Pierre aura dans l’Église un caractère unique, qui le mettra hors de pair, de même que Jésus-Christ a une filiation supérieure à toutes les filiations adoptives. Matth., xvi, 14-18. Les termes par lesquels est annoncée la naissance du Sauveur ne peuvent pas davantage se restreindre à une filiation adoptive. L’ange déclare à Marie que l’enfant qu’elle mettra au monde sera « Fils du Très-Haut » et « Fils de Dieu ». Luc., i, 32, 35. Si ces termes étaient isolés, on pourrait se demander s’il ne faut pas les entendre d’une filiation par adoption. Mais le contexte indique en quel sens autrement précis l’enfant sera Fils de Dieu. Il n’aura point de père sur la terre. Avis est donné à Marie que cette naissance sera l’œuvre du Saint-Esprit, du Très-Haut, Luc, 1, 35, et à Joseph que l’enfant à naître de Marie est du Saint-Esprit. Matth., i, 20. L’adoption divine suppose un être déjà existant, qu’elle élève à un degré de particulière et surnaturelle union avec Dieu. Mais ce que porte Marie est Yevv/)6èv èx IIvsû|jiaToç êcflov, « engendré par le Saint-Esprit. » Matth., i, 20. Or engendrer marque une filiation naturelle et non une filiation adoptive. Saint Jean, x, 24, 30, rapporte les paroles par lesquelles le Sauveur explique lui-même cette filiation : il est « Fils de Dieu » en ce sens que le Père et lui ne font qu’un. Si l’adoption établit des rapports d’intimité entre l’adoptant et l’adopté, elle n’établit pas l’unité entre l’un et l’autre. C’est donc une filiation naturelle que Notre-Seigneur revendique pour lui-même ; c’est cette filiation que comprennent les Juifs et les membres du sanhédrin, quand ils condamnent à mort Notre-Seigneur parce qu’il s’est fait Fils de Dieu. S’il ne se fût agi que d’une filiation adoptive, le Sauveur s’en serait expliqué nettement, il eût détrompé ses juges, et ceux-ci n’eussent pu lui tenir rigueur de s’attribuer une prérogative que chaque pieux Israélite pouvait revendiquer pour lui-même. Ceux qui refusent d’admettre la divinité de Jésus-Christ s’efforcent d’entendre dans ce dernier sens le nom de Fils de Dieu que lui donne l’Évangile. Cf. Soloweyczyk, La Bible, le Talmud et l’Évangile, p. 179-181. — 2. Il ne saurait être question d’une simple filiation d’ordre intellectuel, provenant de la connaissance de Dieu. Cette connaissance serait, dit-on, « la sphère dé la filiation divine, » seul genre de filiation auquel aurait prétendu le Sauveur quand il dit : « Personne ne connaît le Fils, si ce n’est le Père, et personne ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, et celui à qui il voudra bien le révéler. » Matth., XI, 27 ; Luc, x, 22. Cf. Harnack, Dos Wesen des Christenthums, p. 81. Qui ne voit que ce texte, même si on l’isole des autres textes synoptiques et de tous ceux de saint Jean, ne se prête nullement à une semblable restriction ? La teneur des termes y est telle que le Père est placé dans les mêmes rapports vis-à-vis du Fils, que le Fils vis-à-vis du Père. Si le Fils n’a qu’une filiation intellectuelle et par conséquent une divinité très improprement dite, la divinité et la paternité du Père ne sont pas d’un autre ordre, et dès lors c’est Dieu même qui disparaît. /II. les miracles. — 1° Leur variété. — Notre-Seigneur a opéré un très grand nombre de miracles. A plusieurs reprises, les Évangélistes signalent, sans entrer

dans le détail, des guérisons d’une fouie de malades et de possédés. Matth., iv, 23 ; viii, 16, 17 ; xii, 15 ; xv, 30, 31 ; Marc, i, 32-34 ; iii, 10-12 ; Luc, iv, 40, 41 ; v, 17 ; vi, 18-19 ; ix, 11. Saint Jean, XX, 30, termine son évangile en disant que Jésus-Christ « a fait beaucoup d’autres miracles » qui ne sont pas consignés dans son livre, et il ajoute hyperboliquement que le monde ne contiendrait pas les écrits que l’on rédigerait au sujet de ce qu’il a fait. Joa., xxi, 25. Le caractère miraculeux, surhumain et divin de ces actes n’est pas contestable. S’il en est quelques-uns qu’on a pu essayer, sans succès d’ailleurs, d’expliquer naturellement, la plupart ne sont même pas susceptibles d’une pareille tentative, et suffisent au but que se proposaient les Évangélistes en les racontant. Voir Miracle. Les miracles du Sauveur sont de différentes sortes. On peut distinguer : a) Les miracles sur les choses de la nature : ils sont au nombre de dix : 1° le changement de l’eau en vin à Cana, Joa., ii, 1-11 ; 2° et 3° les deux pêches miraculeuses, Luc, v, 1-11 ; Joa., xxi, 1-13 ; 4° la tempête apaisée, Matth.,-vm, 23-27 ; Marc, iv, 35-40 ; Luc, viii, 22-25 ; 5° la marche sur les eaux, Matth., xiv, 25-31 ; Marc, vi, 48 ; Joa., vi, 19 ; 6° le didrachme trouvé dans la bouche du poisson, Matth., x ,

23-26 ; 7° le figuier desséché, Matth., xxi, 18, 19 ; Marc, xi, 12, 14-20 ; cf> J. C. Goesgenius, De ficu maledicta, dans le Thésaurus de Hase et Iken, t. ii, p. 417-424 ; 8° et 9° les deux multiplications des pains, Matth., xiv, 1321 ; xv, 32-39 ; Marc, vi, 30-44 ; viii, 1-10 ; Luc, ix, 1017 ; Joa., vi, 1-13 ; 10° la transfiguration. Matth., xvii, 113 ; Marc, ix, 1-12 ; Luc, ix, 28-36 ; voir Transfiguration. — b) Les expulsions des démons du corps des possédés. Voir Démoniaques, t. ii, col. 1375. — c) Les guérisons de toutes sortes de maux. Voir Guérison, col. 360-361. — d) Les résurrections du fils de la veuve de Naim, Luc, vii, 11-17 ; de la fille de Jaïre, Matth., ix, 18-26 ; Marc, v, 22-43 ; Luc, viii, 41-56 ; de Lazare, Joa., xi, 1-45, et la propre résurrection du Sauveur lui-même. Matth., xxviii, 6. — e) Il convient aussi de tenir compte des miracles qui ont été opérés, sinon par Jésus-Christ personnellement, du moins à cause de lui, pour accréditer sa mission divine : les apparitions des anges à différentes époques de sa vie, Matth., i, 20 ; ii, 13, 19 ; iv, 11 ; xxviii, 2, 5 ; Marc, i, 13 ; Luc, I, 26-38 ; ii, 9, 10, 13, 15 ; xxii, 43 ; xxiv, 23 ; Joa., xx, 12 ; l’étoile des Mages, Matth., ii, 2 ; la voix du Père à son baptême, Matth., iii, 17 ; Marc, i, 11 ; Luc, iii, 22, à sa transfiguration, Matth., xvii, 5 ; Marc, ix, 6 ; Luc., ’ix, 35, et dans le Temple, Joa., xii, 28 ; l’apparition de l’Esprit-Saint sous forme de colombe, Matth., iii, 16 ; Marc, i, 10 ; Luc, iii, 22 ; Joa., i, 32 ; l’apparition de Moïse et d’Élie, Matth., xvii, 3 ; Marc, IX, 3 ; Luc, IX, 30 ; les ténèbres pendant que le Sauveur était en croix, Matth., xxvii, 45 ; Marc, xv, 33 ; Luc, xxiii, 44-45, cf. S. Kissling, De labore solis, laborante sole justitise, dans le Thésaurus de Hase et Iken, t. ii, p. 364-380 ; le déchirement du voile du Temple, Matth., xxvii, 51 ; Marc, xv, 38 ; Luc, xxiii, 45 ; le tremblement de terre et la fente des rochers, Matth., xxvii, 51 ; la résurrection et l’apparition de plusieurs morts. Matth., xxvii, 52, 53. Cf. do Broglie, Problèmes et conclusions de l’histoire des religions, Paris, 1885, p. 310351.

Leur signification.

a) On pourrait remarquer

d’abord que Notre-Seigneur opère ses miracles par sa propre initiative, en vertu d’une puissance qui réside en lui. Il n’a pas besoin de prier longuement comme Élie, III Reg., xvii, 19-22, ou comme Elisée, IV Reg., iv, 33-35, pour ressusciter un mort. Ce n’est pas au nom d’un autre que, comme les Apôtres, Act., iii, 6, il opère des guérisons. Agissant de cette manière, Notre-Seigneur prouve vraiment qu’il est Dieu, puisqu’il accomplit par lui-même des actes dont Dieu seul a la puissance. De ce qu’avant de ressusciter Lazare, il remercie son Père de l’avoir exaucé, comme il l’exauce toujours, Joa., xi, 41-