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JEROBOA.M


1. JÉROBOAM I". Il était fils de l’éphraïmite Na-’bath, de Saréda, et avait pour mère Sarva. Saloraon remarqua son heureux naturel et son adressent le nomma chef des corvées que les hommes des tribus d’Éphraïm et de Manassé avaient à exécuter pour le compte du roi. Voir Corvée, t. ii, col. 1032. C’est en cette qualité qu’il surveillait les travaux de la construction de Mello à Jérusalem. Témoin du mécontentement général qu’excitaient dans toute la nation les dépenses exagérées et les entreprises incessantes de Salomon, il manifesta ses sentiments et n’eut garde de réprimer les murmures de ceux qu’il commandait. Un jour qu’il sortait de Jérusalem, il se rencontra avec le prophète Ahia. Celui-ci, ayant divisé son manteau neuf en douze parts, dit à Jéroboam au nom du Seigneur : Il y a dix parts pour toi et une pour le fils de Salomon. Je ne lui ôte pas tout, à cause des promesses que j’ai faites à David ; mais Salomon m’a abandonné pour servir des dieux étrangers. Quant à toi, si tu m’es fidèle, j’affermirai ta maison comme j’ai affermi celle de David. Voir Ahia, t. i, col. 291. Par cette intervention de son prophète, Dieu autorisait l’opposition qui s’élevait contre Salomon ; seulement s’il se plaignait du prince devenu idolâtre, c’était contre le prince trop exigeant que murmurait le peuple. Ainsi assuré de toutes les approbations, Jéroboam n’eut pas la patience d’attendre que la mort de Salomon amenât une solution qu’Ahia n’avait promise que pour ce moment. À la première occasion, « il leva la main contre le roi, » c’est-à-dire excita contre lui une révolte. Il ne réussit à rien, parce que son action était prématurée. Aussi dutil se dérober par une prompte fuite au châtiment qui le menaçait. Il se rendit en Egypte auprès du pharaon Sésac et y demeura jusqu’à la mort de Salomon. Sésac ou Scheschonq accueillit favorablement le fugitif, et même, d’après le texte grec, III Reg., xii, 24, lui donna en mariage Ano, sœur ainée de Thékémina, sa propre épouse. Cette attitude de Sésac vis-à-vis de Salomon, qui avait lui-même épousé une princesse égyptienne, peut surprendre au premier abord. Mais il faut se rappeler que la princesse épousée par Salomon était fille d’un roi de la xxi « dynastie, probablement Psioukhânnit ou Psousennès II. Sésac commençait la xxii « dynastie. Il n’était pas de famille royale, mais avait épousé une femme de sang royal et était devenu, sous le précédent pharaon, le premier fonctionnaire de l’Egypte. Il avait même uni son fils aîné à une fille de Psioukhânnit. Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. ii, 1897, p. 738, 769, 772. Il n’est pas étonnant cependant que Sésac ait eu d’autres idées politiques que son prédécesseur, auquel il ne tenait que par alliance.

A la mort de Salomon, en 975 (ou 938, d’après la chronologie assyrienne) Jéroboam se hâta de revenir d’Egypte. Les Septante, qui insèrent un très long morceau entre les versets 24 et 25 de III Reg., xii, sur les événements qui se produisirent alors, et sur d’autres que le texte hébreu raconte ailleurs, disent que Jéroboam demanda à Sésac de l’envoyer en Palestine, et qu’il se rendit à Sarira, dans la montagne d’Éphraim, avec sa femme Ano. On sut son retour, et les mécontents l’envoyèrent chercher et le mirent à la tête de la dépulation qui alla demander à Roboam d’adoucir le joug que son père avait fait peser sur la nation. Quand le jeune roi eut au contraire imprudemment menacé de l’aggraver, le peuple se révolta et la plus grande partie des Israélites se séparèrent de la maison de David et prirent Jéroboam pour roi. Il ne resta à Roboam que la tribu de Juda et celle de Benjamin qui, aux portes mêmes de Jérusalem, ne pouvait guère se soustraire à la domination de la capitale. Roboam songea tout d’abord à prendre les armes pour soumettre les rebelles ; mais le prophète Sémeia lui intima l’ordre de n’en rien faire, « t chacun demeura en paix de son côté. Ce schisme

était lamentable, car il affaiblissait et divisait les forces de la nation, surtout à une époque où elle allait voir se dresser en face d’elle les deux grandes puissances conquérantes du vieux monde, l’Assyrie et l’Ég5pte. Mais les infidélités de Salomon l’avaient appelé comme un châtiment nécessaire. Dans les vues de la Providence, c’était d’ailleurs un moyen de préserver plus sûrement les traditions religieuses de la nation, en diminuant le nombre de leurs dépositaires. De plus, le nord devait garantir, pendant la durée de son existence, le royaume du sud contre les invasions assyriennes. Voilà pourquoi le Seigneur s’opposa à la tentative armée de Roboam. Voir Roboam.

Jéroboam fit deSichem et de Phanuel, lII Reg., xii, 25, dans les montagnes d’Éphraim, les places de résistance de son nouveau royaume d’Israël. Malheureusement, au schisme politique il ajouta un schisme religieux. Dans sa pensée, son peuple eût fini par retourner à l’obédience de Roboam, s’il eût continué à aller offrir ses sacrifices à Jérusalem, dans la maison du Seigneur. Il fabriqua donc deux veaux d’or comme symboles de Jéhovah et les érigea aux deux extrémités de son rojaume, l’un à Béthel, à la frontière méridionale, l’autre au nord, à Dan. Voir Veau d’or. C’était l’installation officielle de l’idolâtrie, en contradiction formelle avec les conditions posées par Dieu à Jéroboam, quand Ahia lui annonça son règne futur. III Reg., xi, 38. En d’autres endroits, des édicules idolâtriques s’élevèrent. Voir Hauts-lieux, col. 449-452. Les lévites disséminés à travers les dix tribus refusèrent de se prêter au service de ces nouveaux sanctuaires. Fidèles au culte du Seigneur, ils se replièrent en masse dans la tribu de Juda, afin de pouvoir continuer à se consacrer au service du Temple. Le roi d’Israël fut donc obligé d’en venir à l’institution d’un nouveau sacerdoce, qu’il recruta indistinctement dans toutes les tribus qui lui obéissaient. Il établit aussi des solennités nouvelles, le quinzième jour du troisième mois et le quinzième du huitième mois, afin d’empêcher son peuple de se rendre aux solennités de Jérusalem. L’apostasie ne fut pourtant pas universelle. Beaucoup d’Israélites de toutes les tribus gardèrent leur fidélité à Jéhovah et continuèrent à venir offrir leurs sacrifices à Jérusalem au Dieu de leurs pères. II Par., xi, 16.

Dieu envoya des avertissements à Jéroboam. Un jour qu’il offrait l’encensa l’autel de Béthel, un prophète vint lui annoncer qu’un descendant de David tirerait vengeance de cette idolâtrie, et, en preuve de sa parole, il déclara que l’autel allait se briser et les cendres tomber à terre. Jéroboam étendit la main pour faire saisir l’audacieux ; mais son bras fut paralysé et il n’en put recouvrer l’usage qu’à la prière du prophète. Puis l’autel se brisa et les cendres tombèrent sur le sol.

Abia, fils de Jéroboam, tomba ensuite malade. Le roi envoya sa femme consulter le prophète Ahia, au sujet de cette maladie. Averti par Dieu, celui-ci, quoique aveugle, et malgré le déguisement de la reine, la reconnut et lui annonça la mort de son fils et les malheurs qui allaient fondre sur la maison de Jéroboam, à cause de son apostasie et des péchés qu’il faisait commettre par le peuple. L’enfant mourut. Jéroboam n’en persista pas moins dans la ligne de conduite qu’il avait adoptée. III Reg., xi, 26-xiv, 20.

Le pharaon d’Egypte ne resta pas indifférent à ce qui se passait en Palestine. La cinquième année du règne des deux princes, Sésac monta d’Egypte à Jérusalem, incapable 8e se défendre contre lui, et pilla le trésor du Temple et le trésor royal. Il n’est dit nulle part que Jéroboam ait excité le monarque égyptien à venir attaquer Roboam, mais cela est très probable. En tous cas, si l’instinct de domination qui animait Sésac, et l’occasion favorable qui se présentait pour le satisfaire, suffirent à déterminer le pharaon, son intervention ne fut pas pour déplaire au roi d’Israël. Le texte sacré, III Reg., xiv, 30, dit qu’il y eut toujours guerre entre les deux