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JEAN (ÉVANGILE DE SAINT)


puisque Jésus ne meurt que parce qu’il le veut bien. /// section. — Manifestation de la gloire de Jésus dans son triomphe sur ses ennemis, xix, 38-xxi, 23. — 1° Joseph d’Arimathie et Nicodeme se déclarent ouvertement ses disciples et ensevelissent honorablement son corps, xix, 38-42. — 2° Ressuscité d’entre les morts, Jésus apparaît à Marie-Madeleine, aux disciples, en l’absence de Thomas et en sa présence, xx, 1-31. — 3° Il se montre aux disciples sur le lac de Tibériade et constitue Pierre le chef suprême de tout son troupeau, xxi, 1-23.

m. épilogue. — Témoignage que le récit est véritable et incomplet, xxi, 24-25.

VII. Caractère historique.

Quelle que soit l’opinion qu’ils professent sur l’authenticité du quatrième Évangile, les critiques rationalistes contemporains diminuent grandement son autorité historique, et ils refusent de le tenir pour une source authentique et pure de la vie de Jésus. Ils font ressortir les différences qui existent entre lui et les trois Synoptiques, non seulement dans les faits racontés, dans le cadre tout autre de l’histoire de Jésus, mais surtout dans la manière de concevoir et de présenter Jésus lui-même. Dans le quatrième évangile, Jésus est transfiguré systématiquement, idéalisé ; c’est le Verbe fait chair, agissant pour prouver sa divinité et dissertant subtilement sur ses relations avec le Père. Au lieu des enseignements simples, clairs et naturels qu’il donne dans les Synoptiques, on met sur ses lèvres des discours dont le ton, le style, les allures, les doctrines n’ont rien de commun avec le sermon sur la montagne et. les paraboles adressées aux foules de la Palestine. Un livre qui contient de tels enseignements mystiques ne peut être l’œuvre d’un compagnon de Jésus. Ce n’est plus une histoire, c’est un exposé de philosophie religieuse sous forme d’histoire ; ou bien, si c’est une histoire, c’est une histoire telle que la comprenait un alexandrin du second siècle. Telle est la forme sous laquelle se présente la question dite « johannine ». Comment un témoin oculaire des faits, un disciple immédiat du Sauveur, a-t-il été amené à présenter l’histoire et la doctrine de son Maître sous une forme aussi différente des Synoptiques, tout en demeurant conforme à la réalité des faits et des enseignements ? — L’explication de ces divergences, qui sont réelles, mais ne vont jamais jusqu’à la contradiction, se trouve principalement dans le but que se proposait l’apôtre. Saint Jean raconte la vie de Jésus et rapporte ses discours, non dans leurs propres termes, mais dans leur fond ; il raconte des faits dont les autres Évangélistes n’ont pas eu l’occasion de parler ; il s’occupe spécialement des événements qui ont eu lieu à Jérusalem et qui sont passés sous silence par les synoptiques (voir Jésus-Christ, IV, iv) ; il rapporte les discours du Sauveur dans leur sens complet, tels qu’il les a entendus, tels qu’il lésa saisis, et tels que son ami divin les lui a fait comprendre dans ses confidences intimes, de sorte que la doctrine est la doctrine du Maître, reproduite fidèlement par le disciple sous l’action de l’Esprit-Saint. Écrivant à la fin de sa carrière apostolique et dans un but déterminé, pour démontrer la divinité de Jésus, il groupe les faits et les paroles qui vont à son dessein ; sans rien leur enlever de leur réalité objective et historique, il présente un Christ réel et vivant, mais glorieux et divin dans son humanité même. Knabenbauer, Comment, in Ev. secundum Joannem, Paris, 1898, p. 27-53 ; Fontaine, Les infiltrations protestantes et le clergé français, in-12, Paris, 1901, p. 144-169. VIII. Style.

Au point de vue de la disposition générale du plan, le quatrième évangile est une œuvre savamment conçue et habilement exécutée. Il a été coulé d’un jet et directement composé en vue du but à atteindre, pour démontrer la divinité de Jésus-Christ. Les laits et les discours s’enchaînent, s’expliquent les uns les autres et se complètent dans une magnifique unité. Ils sont ordonnés de façon à montrer comment la foi en

Jésus s’est établie progressivement dans les cœurs droits et quelles ont été, d’autre part, l’incrédulité et l’obstination des Juifs infidèles. La langue originale a été certainement le grec, ce grec post-classique, qui était parlé et écrit au I er siècle de notre ère. Saint Denjs d’Alexandrie, dans Eusèbe, H. E., vii, 25, t. xx, col. 704, a loué sa correction sous le rapport des expressions et l’absence de barbarismes, de solécismes et même d’idiotismes A ce dernier point de vue, le jugement de l’évêque d’Alexandrie a été manifestement influencé par le dessein d’opposer le style du quatrième Évangile à celui de l’Apocalypse. Quoiqu’il soit plus pur que dans l’Apocalyse, ce style a néanmoins, pour la construction de la phrase, un cachet juif bien marqué. Il est d’une extrême simplicité. Au lieu d’employer les périodes dans lesquelles se complaisait le génie grec, saint Jean énonce ses pensées, à la manière des Hébreux, en sentences brèves et détachées, en phrases simplement juxtaposées, et non reliées par des conjonctions ou des pronoms relatifs. Cette simplicité de construction des phrases ne nuit pas toutefois à l’effet de l’exposition. Non seulement la richesse et la profondeur des pensées compensent la simplicité de la phrase, mais encore leur opposition se manifeste dans la structure extérieure, et l’antithèse produit souvent le parallélisme. Les propositions brèves se succèdent d’une façon presque rythmée. La même idée est aussi fréquemment répétée en termes identi ques ; certains mots abstraits, tels que Çuiq, QôvaTo ;, àX^6eia, irXfipwjia, ôptapTia, etc., sont d’usage courant avec une signification symbolique. Tous ces caractères donnent au style du quatrième évangile une physionomie propre et une profonde originalité. Kaiser, De speciali Joannis aposloli grammatica, culpa negligentise Hberanda ; Davidson, Introduction to thestudy of theN. T., t. ii, p. 462 ; Westcott, Introduction to the study of the gospels, 5e édit., p. 260 ; Luthardt, Das johanneisclie Evangelium, t. i, p. 14-62. IX. Commentateurs.

Au temps des Pères.


1. Chez les Grecs. Pour réfuter le gnostique Héracléon, Origène a composé ses Commentark in Evangelium secundum Joannem, en trente-deux tomes, dont dix étaient déjà perdus à l’époque d’Eusèbe, H. E., VI, 24, t. xx r col. 577, et dont il ne reste plus que neuf avec quelques fragments, t. xiv, col. 21-829, Une nouvelle édition a été publiée par Brooke, The commentary of Orxgen on St. John’s gospel, 2 in-8°, Cambridge ; 1896. Saint Chrysostome a prononcé quatre-vingt-huit Homiliee in Evangelium Joannis, t. lix, col. 23-482. Les commentaires de Théophylacte, t. cxxiii, col. 1133-1347 ; t. cxxiv, col. 10-317, et d’Euthymius, t. cxxix, col. 1107-1501, sont en. grande partie des extraits des homélies de saint Chrysostome. Saint Cyrille d’Alexandrie a fait un Commentarius in Joannis Evangelium, t. lxxiii-lxxiv, col. 9-756. Nonnus a publié en hexamètres grecs une Paraphrasis Evangehi secundum Joannem, t. xliii, col. 749-920. La Catena Patrum grsecorum in S. Joannem, éditée par Cordier, Anvers, 1630, contient des commentaires de Théodore de Mopsueste, t. lxvi, col. 727-786V d’Apollinaire de Laodicée, d’Ammonius, etc. Cramer a édité, Oxford, 1844, une autre chaîne, reproduisant d’autres citations des Pères grecs. Voir t. ii, col. 484. Theodori Mopsuesteni Commentanus in Evangelium D. Johannis, a J. B. Chabot editus, in-8°, Paris, 1897., t. I (texte syriaque). — 2. Chez les Latins, saint Augustin a expliqué au peuple d’Hippone le quatrième Évangile : Tractatus cixiv in Evangelium Joannis, t. xxxv, col. 1379-1976. Le vénérable’Bède les a résumés : Evan~ gelii Joannis expositio, t. xcii, col. 635-938. Saint Patère, t. lxxix, col. 1073-1086, et Alulfe, ibid., col. 1239-127<V ont recueilli dans les œuvres de saint Grégoire le Grand les explications le plus souvent allégoriques de. quelques, passages du quatrième Évangile.

Au moyen âge.

Saint Bruno d’Asti a composé

des Commentaria in Evangelium Joannis, t. clxv, caL.