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JACQUES D’ÉDESSE — JACQUES DE SARUG


d’Antioche qui traitent explicitement ou incidemment de nombreux sujets scripturaires, et la légende des Réchabites que nous avons éditée : Les fils de Jonadab, fils de Réchab, et îles les Fortunées, Paris 1899. Les descendants de Réchab, d’après cette légende, habitent dans une lie au milieu de l’Océan. Voir Réchabites.

IV. Son Hexaméron.

Le commencement de la Genèse avait déjà offert à plusieurs écrivains grecs un cadre commode pour y placer toutes leurs connaissances scientifiques ; Jacques d’Édesse, à l’imitation sans doute de Jean Philoponus d’Alexandrie, fut le premier qui introduisit ce genre chez les Sj riens ; son Heiaméron, commentaire sur les six jours de la création, servit de modèle à Moïse bar Képha, Emmanuel bar Schahharé, Jacques de Bartela, etc. Il est conservé dans quatre manuscrits : à Lyon (ms. daté du 8 mars 837), à Leyde, à Glasgow et à Paris (ce dernier est fragmentaire). Il a été étudié par l’abbé P. Martin, dans le Journal asiatique, 1888, t. xi, p. 155-219, 401-490, et par M. Hjelt : Etudes sur l’Hexaméron de Jacques d’Édesse, notamment sur les notions géographiques contenues dans le 3e traité, Helsingfors, 1892. Il est divisé en sept traités : 1° de la première création intellectuelle et incorporelle des puissances célestes et angéliques ; 2° de la création du ciel et de la terre et de tout ce qu’ils renferment, c’est-à-dire de la seconde création, corporelle et matérielle, des quatre éléments différents : la terre, l’eau, l’air et le feu ; 3° de la terre, qui sortit des eaux, apparut sèche et fut adaptée à la demeure de l’homme par l’ordre de Dieu ; des mers, des golfes, des îles, des lacs, des fleuves, des montagnes célèbres et grandes ; des semences, des racines et des arbres que Dieu fit pousser sur la terre ; 4° des astres que Dieu créa dans le firmanent des cieux ; 5° des animaux et des reptiles, que Dieu fit naître dans les eaux, et des oiseaux, qu’il fit également de la nature de l’eau ; 6° des animaux domestiques et sauvages, et des reptiles de la terre ; 7° de l’homme que Dieu créa à son image et qu’il constitua comme un autre monde, grand et merveilleux, dans ce petit monde. On trouve, çà et là, des citations de l’Écriture, faites d’après la revision de Jacques d’Édesse, et quelques détails personnels à l’auteur. On apprend en particulier, qu’au moment où il écrivait le cinquième traité, il avait soixante et quinze ans, et comme une autre note nous apprend qu’il mourut (en 708) pendant qu’il écrivait le septième traité, et que Georges, évêque des Arabes, son correspondant et ami, dut terminer son œuvre, il s’ensuit que Jacques d’Édesse naquit en 633, et non vers 640, comme on avait cru pouvoir le conclure d’un autre synchronisme donné par Bar Hébræus. — On a démontré depuis, que la géographie de Jacques d’Édesse était empruntée à Ptolémée, mais cet Hexaméron n’en demeure pas moins un tableau fidèle et intéressant des connaissances scientifiques chez les Syriens au vire siècle, qui eut grande influence sur la littérature postérieure.

V. Ses commentaires.

En sus de ce grand travail sur le commencement de la Genèse, Jacques d’Édesse composa encore des commentaires et des scolies sur l’Ancien et sur le Nouveau Testament qui sont cités parles auteurs postérieurs, par Jacques (Denjs) Bar Salibi, par Bar Hébræus et par le moine Sévère ; quelques-unes de ces scholies ont été publiées dans l’édition romaine des œuvres de saint Éphrem, t. iet n ; d’autres l’ont été par Philips d’après les mss. de Londres, add. 14483 et 17193 : Scholia on sonie passages of the Old Testament by Mar Jacob, Londres, 1864, et par Nestlé, Jacob von Edessa uber den schem hammephorasch, und andere Gottestament dans la Zeitschrift der deutschen morgent ândischen Geseltschaft, t. xxxii, 1878, p. 465. — On trouve aussi de nombreuses questions relatives à la Sainte Écriture dans ses lettres, encore inédites pour la plupart et contenues dans le manuscrit de Londres add. 12172. L’une a été publiée par M. Schroder dans

la Zeitschr. der deustch. morg. Gesellsch., 1870, t. xxiv, p. 261-300. Jacques d’Édesse montre que deux homélies sur la création attribuées à Jacques (de Sarug) sont l’œuvre d’un faussaire et même d’un hérétique. Deux autres l’ont été par M. Wright, Journal of Sacred Literature, 4e série, t. x, p. 430-461. Jacques y répond aux questions posées par son correspondant sur Gen., xv, 13 ; sur l’écriture avant Moïse ; sur la femme éthiopienne mentionnée Num., xii, 1 ; sur Job, ii, 6 ; sur Béhémoth ; sur Zacharie mentionné Matth., xxiii, 35 ; sur les auteurs des psaumes ; sur divers hérétiques, etc. Enfih nous avons commencé une édition des lettres de Jacques d’Édesse à Jean le Stylite en publiant, dans la Revue de l’Orient^ chrétien, suppl. trim. J900, la Lettre de Jacques d’Édesse à Jean le Stylite sur la chronologie biblique et la date delanaissance du Messie ; dans cet écrit, Jacques apprend à son correspondant que l’ancienne chronologie biblique est artificielle, on l’a obtenue en additionnant les dates données par la Bible et, comme ces dates diffèrent avec les versions et les exemplaires, il n’y a pas deux chronologistes qui soient d’accord ; d’ailleurs Eusèbe s’est trompé de trois ans dans le comput des rois de Syrie, et la naissance de N.-S. doit être placée l’an 309 et non l’an 312 de l’ère des Séleucides. — Jacques d’Edesse a encore composé d’autres écrits dont nous n’avons pas à nous occuper ici. — Voir Assémani, Bibl. orient., t. i, p. 468 ; t. ii, p. 335 ; Rubens Duval, La litt. syriaque, Paris, 1899, p. 70-71, 77, 376-378.

F. Nau.

    1. JACQUES DE SARUG##


7. JACQUES DE SARUG, théologien et poète syrien, né à Kourtam, sur l’Euphrate, probablement dans le district de Sarug, vers 451, mort à Balnan, principale ville du même district, le 29 novembre 521. Il fut longtemps périodeute (chorévêque) de Haura (Havra’), et fut nommé évêque de Batnan (ville qui, plus tard, fut appelée Sarug) en 519, à l’âge de 68 ans.

C’est par ses poèmes surtout que Jacques de Sarug excita l’admiration des Syriens. Il fut appelé « la flûte du Saint-Esprit, la harpe de l’Église orthodoxe, le docteur de la vérité, la colonne spirituelle ». Ses homélies métriques étaient au nombre de 760 (alias 763) et soixante-dix scribes étaient, dit-on, occupés à les copier, sans parler de ses autres ouvrages : lettres, interprétations, instructions, hymnes et cantiques. « Le Saint-Esprit, qui l’avait choisi, dit l’un de ses biographes, lui donna de révéler les mystères et les arcanes des Livres Saints. Il expliqua tout l’Ancien et le Nouveau Testament, et ses explications éclairent l’esprit de tous les sages. » Ces explications ne sont cependant pas des commentaires proprement dits, mais sont contenues dans des homélies métriques qui ont pour objet divers passages de la Bible. La première composition qui attira l’attention sur Jacques fut une homélie sur le char d’Ézéchiel. L’homélie qui nous reste sous ce titre ne renferme pas moins de 1400 vers. Cette prolixité est le défaut principal de Jacques de Sarug.

Il consacra sa vie à l’étude et se tint éloigné des polémiques religieuses qui agitaient alors l’Orient. Il ne tut donc pas poursuivi et exilé par Justin I er comme le furent Sévère d’Antioche, Philoxène de Mabbug et Paul d’Édesse. D’ailleurs le mystère de l’union (des natures divine et humaine en N.-S. ne faisait pas l’objet direct des homélies de Jacques de Sarug, ou du moins le manque de précision des termes employés permettait d’interpréter en sens divers les passages qui avaient trait à l’Incarnation ; aussi la doctrine de Jacques fut-elle longtemps regardée comme catholique. Cette thèse a été soutenue par Assémani, Matagne, Bickell, Abbeloos et Lamy. Néanmoins, Jacques était aussi réclamé par les monophysites, et l’abbé P. Martin a montré que ses sympathies avaient été pour ces hérétiques, et qu’il doit être rangé parmi les adversaires du concile de Chalcédoine. Cf. P. Marlm, Un évêque poète au V et au ri’siècle, ou Jacques de Sa-