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4091’JACQUES (ÉPITRE DE SAINT)

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Or ces Épltres de saint Paul, dont dépend celle de Jacques, ont étéécritesentre52et62. — 4.L’Épître aaussi d’évidentes attaches avec I Pet. (E. Vowincki, Die Grundgedanken des fakobusbriefes, in-8°, Gutersloh, 1899), et dès lors il y a entre les deux un lien de dépendance. Le tableau suivant montre ces diverses ressemblances :

a) Verbales.

Épître de saint Jacques. 1 Pet.

1, 1 : 81a<raop<x (appliqué aux chrétiens) i, 1.

I, 2 : 7tetpa<7[A0(… TtoixO.oi. i, 6.

I, 3 : xà ôox : (xiov û|j.<âv zf^s

rcioxsMç I, 7.

I, 18 ; v, 19 : àl-ffiua (in diquant le christianisme), i, 22.

I, 21 : 0virap ! a (souillure). iii, 21 : pûjroç.

I, 21 ; iii, 13 : npaOrr) ?… iii, 16.

I, 27 : « [JuavToc i, 4.

r, 27 : SottiXoç i, 19.

III, 13 : xair) ma.<npi<fé[.. iii, 2 : àYVïi ; 16 : àyaOï)

àvaurpoçT].

iv, 7 : Siâ60), o ; v, 8 (mot inconnu à saint

Paul).

iv, 8 : àyvi£siv xapSiaç… 1, 22 ; tyvyjii à la place de

xapSîaç.

iv, 11 : xaTO&aXsïv ii, 12 ; iii, 16.

V, 8 : yiyyixsv. IV, 7.

  • " b) Dans les idées.

I, 3 : Les tentations et les afflictions sont une

épreuve pour la foi i, 7.

1, 18 : La parole de vérité, moyen de régénération, i, 23.

m, 13 : Importance d’une bonne conversation, ii, 12.

îv, 1 : Les passions nous font la guerre ii, 11.

c) Dans les citations.

Jac, i, 10, 11 ; I Pet., i, 24, citent Is., xl, 6-8. v Jac, lv, 6 ; I Pet., v, 5, citent Prov., iii, 34. Jac, v, 20* ; I Pet., iv, 8, citent Prov., x, 12.

Il existe donc une dépendance entre les deux Épitres. Il est vrai que Davidson, Introduction, t. i, p. 286, fait dépendre Pierre de Jacques ; mais la plupart sont d’un avis contraire. La première Épître de saint Pierre étant au plus tôt de 60 ou 61, il est impossible de faire remonter l’Épltre de Jacques au delà de l’an 60. — On objecte contre cette solution que la situation des judéo-chrétiens auxquels l’Épître est adressée n’est pas celle des environs de l’an 60. On n’y fait aucune allusion aux discussions sur la valeur et la durée de la circoncision, l’autorité et la signification des lois rituelles, ni aux conditions dans lesquelles les Gentils convertis doivent être admis dans l’Église ; ces questions furent agitées au concile de Jérusalem. L’Épltre, qui n’en fait aucune mention, a dû donc être écrite, semble-t-il, antérieurement à ces discussions, avant que la prédication de saint Paul au milieu des Gentils eût appelé l’attention sur ces questions ; elle date donc probablement de l’an 45. Cf. Kitto, Cyclopxdia, t. ii, p. 461, 462. — Cette difficulté est sérieuse, mais elle n’est pas concluante : o) le caractère de l’Épltre s’opposait à ce que l’auteur s’occupât de telles questions ; au point de vue doctrinal, l’Épltre, comme nous l’avons vii, porte uniquement sur la nécessité des bonnes œuvres ; pour le reste, c’est une exhortation morale ; b) les destinataires sont des judéo-chrétiens ; or les questions en litige concernaient uniquement les ethno-chrétiens ; la différence des lecteurs rendait donc oiseux ce genre de discussions.

2° L’Épître n’a pu être écrite après l’an 70, époque de la destruction de Jérusalem. En effet : — 1. Rien n’y ressent l’agitation de cette époque ; pas un mot de la ré volte ni des horreurs du siège. — 2. Saint Jacques mourut en l’an 62 ; s’il est vraiment l’auteur de l’Épltre, comme nous le prouverons plus loin, on ne peut pas placer la date de la composition après l’an 62. — 3. Jac, v, 1, parait présager de grandes catastrophes ; peut-être avait-il en vue le siège et la destruction de Jérusalem, qu’il entrevoyait par l’esprit prophétique. — 4. La formule du serment, Jac, v, 12, est empruntée évidemment à Matth., v, 34-37 ; or, dans cette dernière formule, l’incise « ni par Jérusalem » suppose la ville encore existante. — 5. Enfin l’Épître fut écrite de Jérusalem, comme nous le montrerons bientôt ; saint Jacques en était évêque et la ville était encore debout. — Ceux qui assignent une date postérieure à notre Épître s’appuient : 1. sur les ressemblances qu’elle offre avec l’Épître aux Hébreux : l’une et l’autre citent l’exemple de Rahab, Jac, n, 25, etHeb., xi, 31 ; l’obéissance d’Abraham, Jac, ii, 21, et Heb., xi, 17 ; elles parlent de la foi morte, Jac, ii, 26, et des œuvres mortes, Heb., vi, 1 ; du fruit de la justice semé dans la paix, Jac, iii, 18, et du paisible fruit de la justice, Heb., xil, 11. Cf. Davidson, Introduct., t. i, p. 296. On en conclut que l’Épltre de Jacques a fait des emprunts à l’Épltre aux Hébreux, et, comme on suppose que cette dernière est de date tardive, on conclut que la première l’est aussi. — Mais ces hypothèses et ces conclusions ne sont pas fondées. Saint Jacques a pu emprunter directement les deux premiers exemples à l’Ancien Testament, Jac. ii, 25, et Jos., ii, 4 ; Jac, ii, 21, et Gen., xxii, 9-10 ; quant aux œuvres mortes et au fruit de justice, c’étaient des idées communes et courantes dans la primitive Église. — D’ailleurs dans le cas même^où l’on admettrait une dépendance entre les deux écrits, rien ne prouve que ce soit saint Jacques qui a emprunté à l’Épître aux Hébreux et non le contraire. — Enfin, alors même qu’il serait vrai que l’Épître de Jacques dépendît de l’Épltre aux Hébreux, notre opinion n’en subsisterait pas moins puisque l’Épître aux Hébreux a été écrite entre 6366 (col. 523). — 2. On a également prétendu, pour assigner une date tardive à l’Épître de Jacques, qu’elle contient des allusions à l’Apocalypse. Jac, i, 12, et Apoc, n, 10 ; Jac, ii, 5, et Apoc, ii, 9. — Le premier exemple, Jac, i, 12, semble plutôt être une allusion à Job, v, 17 ; les deux autres exemples sont trop vagues pour qu’on puisse y voir des allusions. — D’ailleurs, s’il y avait de vraies allusions, ce serait l’Apocalypse, composée sous Donatien, qui les aurait empruntées à l’Épître de Jacques. — 3. On a recours à des arguments plus futiles encore pour assigner à cette lettre une date plus récente. Elle ne respire nullement, dit-on, les temps apostoliques ; — le Christ y est à peine mentionné, et y est uniquement représenté comme le Juge du monde ; son rôle de Messie disparaît complètement ; — la foi est tantôt une science, Jac, ii, 14, tantôt une persévérance, Jac, 1, 6 ;

— l’auteur parle de la loi dans le style du IIe siècle, avec de l’enthousiasme pour la loi nouvelle ; — la religiosité a perdu tous les traits des temps primitifs ; elle n’est plus qu’une confiance en la bonté de Dieu, qui se traduit par la prière, et ne perd jamais l’espérance ; d’un autre côté l’accomplissement des commandements de Dieu, et l’exercice de la pure piété. Jac, i, 27 ; et., Julicher, Einleitung, p. 143. — Tous ces détails de critique interne ou portent à faux ou n’ont pas d’importance. Le Christ y est à peine mentionné ? Mais l’auteur se proclame son serviteur, i, 1 ; il indique à ses lecteurs quelle est la foi qu’ils doivent avoir en Jésus-Christ, ii, 1. — Où voit-on que la manière dont l’auteur parle de la loi soit celle du iie siècle ? Il n’y a aucune opposition dans la manière de concevoir la foi et d’en parler ; i, 6, l’auteur recommande la fermeté de la foi ; ii, 14, l’auteur prouve que la foi sans les œuvres est une foi morte, inefficace ; s’il parle spécialement de la confiance en Dieu, c’est que son but le réclamait ; nous avons déjà dit que l’Épître contient, outre sa thèse doctrinale,