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JACOB

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    1. JACOB##

JACOB, nom d’un patriarche et du peuple issu de lui, ainsi que de deux autres Israélites. Le nom de Jacob se retrouve sous la forme I-qu-bu dans un contrat assyrien de la 18e année du roi Darius. Voir aussi Jacques.

1. JACOB (hébreu : spy>, quelquefois aipy », Ya’àqôb ; Septante : ’Iax<âo), lils d’Isaac et de Rébecca. Il vint au monde en tenant d’une de ses mains le talon (npy, ’âqêb) de son frère jumeau Ésau, ce qui lui fit donner par sa mère le nom de Jacob, c’est-à-dire « [celui qui] tient par le talon, qui supplante ». Gen., xxv, 25 ; cf. xxvii, 36 ; Ose., xii, 3. Sa vie se passa tour à tour dans le pays de Chanaan, dans la Mésopotamie, de nouveau en Chanaan et enfin en Egypte.

I. De la naissance de Jacob a son départ pour la Mésopotamie. — Dieu avait prédit à Rébecca, dès avant la naissance de ses deux fils, qu’ils seraient les pères de deux peuples et que la postérité de l’alné serait soumise à celle du plus jeune. Gen., xxv, 22-23. Cf. Ose., XII, 3. Lorsque les deux enfants eurent atteint l’âge d’homme, une circonstance fortuite prépara les voies à l’accomplissement de cette prédiction divine. Un jour qu’Ésau revenait de la chasse [exténué de fatigue, il demanda à son frère de lui donner un plat de lentilles que celui-ci avait préparé pour lui. Jacob le lui abandonna à condition qu’Ésaû lui céderait son droit d’aînesse en échrnge de ce service ; il exigea même que cette cession, à laquelle Ésau avait consenti, fût confirmée par serment. Gen., xxv, 29-34. Ce transfert du droit de primogéniture ne pouvait toutefois être valable sans l’autorité d’Isaac ; les privilèges du droit d’aînesse étaient attachés à la bénédiction paternelle, et c’est cette bénédiction qui devait nécessairement confirmer, au profit "de Jacob, l’abandon de ce droit par Ésau. Aussi Rébecca, dont Jacob était le fils préféré, Gen., xxv, 28, épiait-elle le moment favorable pour la lui assurer. Or, un jour, elle entendit le vieux patriarche ordonner à Esaû d’aller à la chasse et de lui préparer un repas après lequel il le bénirait. Elle en prévint aussitôt Jacob et se hâta de tout disposer pour qu’Isaac fût amené à ratifier le marché conclu autrefois entre ses deux fils. Elle revêtit Jacob des habits de son frère et lui couvrit le cou et les mains de peaux de chevreaux, afin qu’Isaac, devenu presque aveugle, pût croire en le touchant qu’il touchait Ésaû dont la peau était velue. Puis elle lui remit les aliments soigneusement choisis et préparés par elle et qu’il devait apporter à son père. Jacob s’était refusé d’abord à ce stratagème dans la crainte que sa supercherie, si elle était découverte, n’attirât sur lui la malédiction paternelle au lieu de la bénédiction qu’on voulait lui faire surprendre ; mais rassuré par Rébecca, il se présenta à Isaac en se donnant pour jisau, il l’invita à manger du gibier qu’il venait, disait-il, de chasser et le pria de le bénir ensuite. Isaac manifesta son étonnement d’un si prompt retour ; Jacob répondit en attribuant à Dieu l’heureux succès de sa chasse. Cependant le vieillard restait défiant, parce que la voix de son interlocuteur lui paraissait être. celle de Jacob ; il voulut donc le toucher pour s’assurer qu’il était bien Ésaû, il l’interrogea même encore, et Jacob répéta son mensonge, car c’est bien ainsi et à bon droit que ce langage est communément qualifié, malgré ce qu’ont pu en dire pour le disculper plusieurs anciens avec saint Augustin. Serm. iv, De Jacob et Esau, xxii, t. xxxviii, col. 45 ; De mendac, v, t. xi, col. 491. Là-dessus^ le patriarche mangea et but ce que son fils lui offrait ; ensuite, l’ayant embrassé, il lui donna cette bénédiction solennelle qui le constituait l’aîné de la famille et « le seigneur de ses frères ». Ésaû, qui avait autrefois montré tant d’indifférence pour son droit d’aînesse et l’avait vendu avec une si coupable légèreté, fut rempli de douleur et outré de colère lorsqu’il apprit, à son retour, ce qui venait de se passer. Voir ÉSAù, t. ii,

col. 1910-1911. II ne parla de rien moins que de tuer son frère dès qu’Isaac serait mort. Ces menaces déterminèrent Rébecca à éloigner pour un temps son enfant de prédilection. Elle ne voulait pas d’ailleurs que Jacob, à l’exemple d’Ésau, épousât une femme de Chanaan. Ce fut ce dernier motif qu’elle fit valoir auprès d’Isaac pour le décider à envojer Jacob en Mésopotamie, afin qu’il y prit une épouse dans la famille de Laban. Gen. xxvii, 1-xxvin, 2.

Isaac envoya donc Jacob en Mésopotamie chez Laban, son oncle, frère de Rébecca ; mais il voulut, avant de se séparer de lui, confirmer en la renouvelant la bénédiction qu’il lui avait déjà donnée. Gen., xxviii, 3, 4. Le Seigneur allait ratifier à son tour l’acte d’Isaac et montrer ouvertement que le patriarche n’avait fait qu’exécuter le dessein divin, déjà révélé à Rébecca, c’est-à-dire l’élection de Jacob, à l’exclusion d’Ésaù, comme héritier des promesses messianiques. Mal., i, 2 ; Rom., ix, 11-13. Cette manifestation céleste eut lieu à Luza, dans la région même où Abraham avait autrefois élevé un autel au Seigneur. Gen., XII, 8. C’est la seule halte mentionnée par la Bible dans le récit du voyage de Jacob de Bersabée à Haran. Voulant passer la nuit en cet endroit, il prit une des pierres qui s’y trouvaient, la mit sous sa tête et s’endormit. Il vit alors en songe une échelle posée sur la terre et dont l’extrémité touchait au ciel, et, le long de l’échelle, des anges qui montaient et descendaient, tandis que le Seigneur se tenait au-dessus et lui parlait. Il se révéla à lui comme Jéhovah, le Dieu d’Abraham et d’Isaac ; il lui donna, ainsi qu’à ses descendants, la propriété de la terre sur laquelle il dormait et il lui assura une postérité innombrable, en laquelle seraient bénies toutes les nations de la terre, cf. Gen., xxii, 18 ; il lui promit enfin de le protéger toujours et de le ramener dans le pays de Chanaan. Jacob se trouva saisi à son réveil d’une religieuse terreur. Il dressa la pierre sur laquelle il avait dormi et, répandant de l’huile sur le sommet en manière de consécration, l’érigea en monument. Il fit de plus, afin de témoigner sa reconnaissance pour cette vision et pour les bienfaits que Dieu devait lui accorder à l’avenir, le triple vœu d’honorer plus que par le passé Jéhovah comme son Dieu, de donner à cette pierre et à ce lieu le nom de Béthel ou maison de Dieu, et d’offrir au Seigneur la dîme de tous les biens qu’il aurait reçus de lui. Gen., xxviii, 10-22. Voir Bétyle, t. i, col. 1765.

II. Jacob en Mésopotamie.

Immédiatement après la vision de Béthel, la Genèse nous montre Jacob parvenu au terme de son voyage. Tandis que, arrivé dans le voisinage de Haran, il interrogeait au sujet de Laban des pasteurs qui stationnaient auprès d’un puits (fig. 195), Rachel, fille de Laban, arrivait précisément avec son troupeau. Jacob s’empressa d’ouvrir le puits, quoique l’heure ne fût point encore venue, et de faire boire les brebis de Rachel ; il se fit ensuite connaître à elle. Laban, à qui sa fille avait couru apporter la nouvelle de l’arrivée de Jacob, vint aussitôt recevoir le fils de sa sœur avec les démonstrations de la plus vive amitié et l’emmena dans sa maison. Gen., xxix, 1-14*.

Lorsqu’un mois se fut écoulé depuis l’arrivée de son neveu, il lui dit : « Devez-vous, parce que vous êtes mon parent, me servir gratuitement ? Dites-moi quel salaire vous désirez ? » Or Laban avait deux filles : Lia l’ainée, dont les yeux étaient chassieux (hébreu : « faibles » ), et Rachel, beaucoup plus belle. Jacob avait déjà conçu pour la plus jeune de ses cousines une grande affection. Il offrit donc à Laban sept ans de service pour avoir la main de Rachel. Sa demande fut agréée et, en conséquence, à la fin de la septième année, on célébra le mariage, avec de grandes réjouissances. Mais le soir, quand le moment vint de conduire à Jacob son épouse voilée, Laban substitua Lia à Rachel. Aux reproches que lui fit le lendemain son gendre, il répondit en alléguant