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INJUSTICE — INNOCENTS (SAINTS)


les Idumeens, adu., 10, et les Tj riens, Ezech., xxviii, 48 ; c)iez les accusateurs de Susanne. Dan., xiii, 53. Le pharisien orgueilleux trouve que tous les autres hommes sont injustes. Luc, xviii, 11. Le maître de la vigne rappelle aux ouvriers de la première heure qu’il ne commet pas d’injustice en ne leur donnant qu’un denier. Matth., xx, 13. L’injustice par excellence a été la condamnation de Notre-Seigneur. I Pet., ii, 23. Voir Fraude, t. ii, col. 2398.

Les conséquences.

Malheur à qui « bâtit sa maison

par l’injustice ! 1er., xxii, 13. L’injuste sera traité comme il le mérite, Col., iii, 25 ; son injustice retombe sur lui, Ps. vil, 17 ; elle ne peut le sauver, Eccli., viii, 8, ni l’affermir, xil, 3 ; il en mourra. Ezech., iii, 19. Dieu ne peut le supporter. Ezech., iii, 20. Malheur aussi à celui qui justifie l’injuste ! Is., v, 23. Dieu ferme la bouche à l’injustice. Ps. gvi, 42. Le juste implore son secours contre elle, Ps. lxx, 4 ; cxxxix, 2, 5, et Dieu le lui accorde. Ps. eu, 6 ; cxxv, 3 ; cxlv, 7. L’injustice fait encore que la prépondérance passe d’une nation à l’autre, Eccli., x, 8 ; aussi les rois l’ont en horreur, parce que la justice seule affermit leur trône. Prov., xvi, 12.

Les conseils.

Il faut éviter de laisser l’injustice

habiter sous sa tente, Job, xi, 14, c’est-à-dire de l’exercer, Job, vt, 29, 30 ; Jer., xxii, 3. On ne doit pas frayer avec l’injuste, Prov., iii, 31, ni même employer l’injustice pour la cause de Dieu. Job, xiii, 7. On ne peut s’appuyer sur les richesses qui sont le fruit de l’injustice, Eccli., v, 10 ; il faut au contraire les employer à se ménager des amis dans le ciel. Luc, xvi, 8, 9. Quand on a commis l’injustice, le jeûne et la prière ne servent de rien si l’injustice persévère. Is., lviii, 4, 6 ; Eccli., xxxv, 5. Saint Paul conseille aux Corinthiens de supporter quelques injustices, plutôt que d’aller plaider devant

des juges païens. I Cor., vi, 7, 8.

H. Lesêtre.
    1. INNOCENTS (SAINTS)##


INNOCENTS (SAINTS), nom qu’on donne aux enfants de Bethléhem et des environs dont Hérode le Grand ordonna le massacre. Matth., ii, 16-18.

I. Historique.

Hérode avait demandé aux mages, de repasser par Jérusalem pour lui donner des nouvelles du roi nouvéau-né, mais sur l’ordre de Dieu, ils ne le firent point. Hérode irrité, pour que le rival qu’il redoutait ne pût lui échapper, expédia des émissaires avec ordre de tuer tous les enfants de Bethléhem et des hameaux et localités qui en dépendaient, depuis l’âge de deux ans et au-dessous. Il n’eût pas été nécessaire d’englober tous les enfants depuis l’âge de deux ans et au-dessous dans le massacre, puisqu’il n’y avait pas certainement deux ans que Jésus était né. Certains commentateurs ont conclu de ce passage que l’étoile avait peut-être apparu aux mages un certain temps avant leur départ d’Orient, mais il est plus croyable que dans l’aveuglement de sa fureur, Hérode prit toutes les précautions possibles pour réussir dans le coup qu’il préméditait ; en portant la limite jusqu’à l’âge de deux ans, il était convaincu qu’aucun enfant n’échapperait, et que « le roi des Juifs » lui-même périrait dans le massacre. Les émissaires d’Hérode accomplirent ponctuellement l’ordre qu’ils avaient reçu, mais Jésus fut sauvé. Matth., n, 13-14. — Quant au nombre des enfants victimes de la cruauté d’Hérode, on ne peut l’évaluer que d’un manière approximative, par les lois qui régissent le mouvement des populations dans tous les pays. La liturgie éthiopienne et le ménologue grec ont fortement exagéré en adoptant le nombre de 144000 ; o’est une fausse interprétation du texte de l’Apocalypse, xiv, 1, que l’Église fait réciter le jour de la fête des saints Innocents, le 28 janvier (Bréviaire romain, Répons de la première leçon du premier nocturne) ; certains Pères aussi sont tombés dans l’exagération. Ainsi saint Justin déclare qu’Hérode ordonna de tuer tous les enfants de Bethléhem, Dial. cum Tryph., a. 78, t. vi, col. 660 ; Origène

| affirme également qu’Hérode fit massacrer tous les enfants de Bethléhem et des environs. Cont. Cels., i, 61, t. XI, col. 772. — À l’époque d’Hérode, Bethléhem et ses environs devaient compter tout au plus deux mille habitants, cf. Mich., t, 2 ; régulièrement il nait une moyenne de trente enfants par an pour chaque millier d’habitants ; la moitié appartient au sexe féminin ; il reste donc quinze enfants du sexe mâle ; en défalquant la moitié, qui devient la proie de la mort, nous avons sept ou huit enfants ; pour deux ans, nous pouvons compter de quatorze à seize enfants ; c’est là le nombre probable et approximatif des victimes d’Hérode. — Nous ignorons complètement le genre de mort des saints Innocents ; l’Évangile se contente de dire qu’Hérode « ayant envoyé, tua », àîrocrrEiÀaç âvellev. Matth., ii, 16.

II. Accomplissement de la prophétie.

Saint Matthieu II, 16-17, ajoute. : « alors s’accomplit ce qui avait été dit par le prophète Jérémie, disant : Une voix a été entendue à Rama, des pleurs et des sanglots incessants, Rachel pleurant ses fils et ne voulant pas être consolée parce qu’ils ne sont plus. » L’Évangéliste applique ici au sens, figuré la prophétie de Jérémie, xxxi, 15. Au sens littéral, le passage de Jérémie se rapporte à la déportation des Juifs en Chaldée, après les triomphes de Nabuchodonosor. Le terrible monarque avait amené la chute du royaume de Juda, et transporté ses enfants en captivité au delà de l’Euphrate. Nous savons que Rachel avait été enterrée dans le chemin qui conduit à Bethléhem, appelée autrefois Éphrata. Gen., xxxv, 19. Voir Rachkl. Les enfants de Benjamin, emmenés en captivité, ne durent pas passer loin de ce chemin et des ossements de Rachel. Jérémie suppose qu’à ce spectacle, Rachel sortit de son tombeau, poussant des cris et des gémissements, comme une mère à qui on arrache ses fils. — Par une extension du sens, la prophétie de Jérémie, en la prenant dans le sens typique et figuratif, s’accomplit une seconde fois à l’époque du massacre des Innocents. Dans la pensée de l’Évangéliste, Rachel personnifia toute » les mères de Bethléhem qui avaient été frappées dans leurs plus tendres affections, sur les victimes du cruel Hérode.

III. Véracité du récit évangélique.

La plupart des exégètes rationalistes ont nié ou du moins contesté la véracité du récit évangélique. Leur principal argument est que les historiens anciens, et tout particulièrement Josèphe qui raconte les moindres détails de la vie d’Hérode, ne font aucune mention du massacre des Innocents. — 1° Le massacre des saints Innocents s’accorde très bien avec le caractère sanguinaire d’Hérode : Josèphe s’exprime ainsi sur le compte du despote : « Quand on prend en considération les châtiments et les injustices dont il se rendit coupable à l’égard de ses. sujets et de ses plus proches, quand on se rappelle l’inexorable dureté de ses procédés, il est impossible de ne pas le déclarer un monstre, dépassant toute mesure. » Ânt. jud., XVI, v, 4 ; cf. aussi XVII, vi, 6 ; viii, 1. — 2e Le massacre des Innocents était un événement presque insignifiant pour les historiens de l’antiquité ; quelquesenfants tués dans un village obscur de la Judée ne devaient pas avoir une grande influence sur la marche des. événements, ni poser au premier rang parmi les actes, politiques d’Hérode ; il a pu donc passer inaperçu à la plupart des historiens. — 3° 1} n’est pas sûr qu’il ne se soit conservé aucun souvqpir de cet événement dans les historiens. Josèphe raconte un fait qui ne manque pas d’avoir une certaine ressemblance avec le massacre des-Innocents ; il dit qu’Hérode fit tuer tous ceux des membres de sa domesticité, qui s’étaient déclarés pour les Pharisiens, lesquels annonçaient que le gouvernement d’Hérode cesserait, que sa postérité serait privée de la royauté, et qu’une autre branche la remplacerait, Ant. jtid., XVII, il, 4 ; sa haine et ses soupçons n’épargnèrent même pas ; ceux qui lui étaient le plus chers. Ibid., XVI, vui, 3. C£.