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HERMENEUTIQUE


Mais il est évidemment nécessaire que tes deux conditions soient vérifiées et qu’il y ait accord réellement unanime dans une interprétation réellement doctrinale. Cf. Revue biblique, t. ix, 1900, p. 140-141.

Quant à l’autorité des Pères comme exégètes, écoutons Léon XIII : « La pensée des mêmes Pères doit encore être fort estimée, quand c’est à titre de docteurs, pour ainsi dire privés, qu’ils traitent de ces mêmes vérités. Car, non seulement ils sont recommandables par leur science de la doctrine révélée, et par leur connaissance de bien des choses utiles pour l’intelligence des livres des apôtres ; mais Dieu lui-même a aidé par de très amples grâces de lumière ces hommes aussi distingués par la sainteté de leur vie que par leur amour de la vérité. Par conséquent, l’exégète regardera comme son devoir, et de s’attacher respectueusement à leurs traces, et de profiter, par un choix intelligent, de leurs travaux. Qu’il ne croie cependant point que par là même la voie lui soit fermée, et qu’il ne puisse, pour une juste cause, pousser plus loin ses recherches et ses commentaires. .. L’exégète aura également soin de ne pas négliger ce que les mêmes Pères ont expliqué dans un sens allégorique ou autre semblable, surtout quand de telles interprétations découlent du sens littéral et s’appuient sur l’autorité de beaucoup d’entre eux. Car l’Église a reçu des apôtres cette manière d’interpréter, et l’a elle-même approuvée par son exemple, comme on le voit dans sa liturgie : non point que les Pères aient prétendu démontrer formellement par là les dogmes de la foi ; mais ils avaient appris par expérience combien cette méthode était fructueuse pour nourrir la vertu et la piété, s Encycl. Providentissimus Deus, t. i, p. xxiii. S’agit-il des interprétations, non plus doctrinales, mais scientifiques, que les Pères ont données de l’Écriture dans les matières des sciences naturelles, le souverain pontife observe justement qu’il n’est pas nécessaire « de soutenir toutes les opinions émises par chacun des Pères et des exégètes postérieurs. Ces hommes ont subi l’influence des opinions qui avaient cours de leur temps, en expliquant les passages des saintes Écritures qui font allusion aux choses naturelles, ils ont pu mêler à la vérité des jugements qu’on n’accepterait pas aujourd’hui. Aussi, faut-il soigneusement mettre à part, dans leurs interprétations, les points qu’ils donnent réellement comme touchant à la foi ou comme étroitement unis à elle, ainsi que les vérités qu’ils présentent d’un consentement unanime ; car « sur tout ce qui n’appartient pas au domaine de la foi, les saints ont eu le droit, « comme nous l’avons dit, d’émettre des avis différents », selon la pensée de saint Thomas, In Sent., ii, dist. II, q. I, a. 3°. Voir t. i, p. xxix.

Sur l’autorité exégétique des Pères : ouvrages catholiques : B. Germon, De veterum hæreticorutn codice eccl. corrupto, Paris, 1713, p. 558 ; F. Bonaventure, chartreux, De optima melhodo legendi Ecclesise Patres, Augsbourg, 1756 ; A. J. Dorsch, De auctoritate SS. Ecclesise Patrum, Mayence, 1781 ; Fessler-Jungmann, Jnstitutiones patrôlogiæ, Inspruck, 1890, t. i, p. 48^50. Ouvrages protestants : Daillé, De usu Patrum, Genève, 1666 ; Whitby, De S. Scripturse interpretatione secundum Patrum comment., Londres, 1714 ; C. Alétophile, De S. Script, atque antiq. eccl. in theologia usu et auctoritate, Iéna, 1735 ; Ribovius, De oeconomia Patrum, Gcettingue, 1748 ; Rœsler, De varia disputandimethodo vet. eccl., Tubingue, 1784 ; J. G. Rosenmùller, De traditione hermeneutica, Leipzig, 1786.

3’règle : Dans les passages dont le sens n’est pas défini par l’Église, l’exégète catholique « suivra l’analogie de la foi et prendra comme règle suprême la doctrine catholique’telle que la fixe l’autorité de l’Église s. Enc. Providentissimus Deus, t. i, p. xxii. — Léon XIII ajoute aussitôt la raison théologique et l’emploi de cette règle, t En effet, dit-il, Dieu étant simul tanément l’auteur des Livres Saints et de la doctrine confiée à l’Église, il est impossible qu’une légitime interprétation tire de ceux-là un sens opposé en quelque manière à celle-ci. Par où l’on voit qu’il faut rejeter, comme inepte et fausse, toute interprétation de laquelle il résulterait que les auteurs inspirés seraient, d’une façon quelconque, en contradiction soit entre eux, soit avec l’enseignement de l’Église. » Le nom d’analogie de la foi, emprunté au texte grec, Rom., xii, 6, désigne la convenance et l’harmonie des dogmes entre eux, en vertu desquelles ils se soutiennent, s’éclairent et se défendent mutuellement. Saint Augustin, Dedoct. christ., m, 2, n. 2, t. xxxiv, col. 65, y faisait déjà appel. On pourra distinguer l’analogie de la foi biblique ou l’accord des vérités contenues dans l’Écriture, et l’analogie de la foi catholique, ou l’accord de ces mêmes vérités avec celles que contiennent la tradition et l’enseignement ecclésiastique. Afin de maintenir cet accord, l’interprète catholique n’admettra aucune explication qui serait contraire soit à un autre passage de la Bible, soit avec la doctrine révélée, telle que l’Église la propose ; il la tiendra pour fausse, car la vérité ne saurait être opposée à la vérité. La règle de l’analogie de la foi aura donc généralement sur l’exégèse une influence plutôt négative que positive ; elle écartera les erreurs et les contradictions de doctrine. Quoiqu’une interprétation ne soit pas véritable, par le seul fait qu’elle est conforme à l’analogie de la foi, cette règle peut cependant diriger parfois l’exégète, surtout dans l’explication des passages doctrinaux obscurs. C’est pourquoi, conclut Léon XIII, l’exégète catholique « doit avoir le mérite de posséder à fond l’ensemble de la théologie et d’être versé dans les commentaires des saints Pères, des docteurs et des meilleurs interprètes ». Voir t. i, p. xxii.

II. Principaux traités d’herméneutique sacrée. — L’antiquité chrétienne n’a pas eu ; à proprement parler, de traités spéciaux, exposant les lois de l’interprétation de la Sainte Écriture. Dans leurs écrits exégétiques ou homilétiques, les Pères se bornaient à énoncer, à l’occasion et en passant, quelqu’une des règles qu’ils appliquaient pour comprendre et exposer la parole divine. Certains écrivains cependant ont groupé diverses observations qui sont une sorte d’ébauche d’herméneutique sacrée. Citons Origène, De principiis, iv, 8-27, t. xi, col. 356, etc. ; le donatiste Tichonius, Liber de seplem regulis, t. xviii, col. 15-66 ; S. Augustin, De doctrina christ., t. IV, t. xxxiv, col. 15-122 ; Junilius, De partibus divines legis, t. II, t. lxviii, col. 15-42 ; cf. Kihn, T.heodor von Mopsuestia und Junilius Africanus, Fribourg-, en-Brisgau, 1880, p. 465-528 ; Adrien, Eiffayiofri eïç Taç fleiat fpaçâç, t. xcviii, col. 1273-1311, édit. et traduction allemande par F. Gôssling, Berlin, 1887, p. 69-135 ; cf. t. i, col. 241 ; Cassiodore, De institutione divinarum litterarum, t. lxx, col. 1105-1150 ; cf. t. ii, col. 337-338 ; au moyen âge, Raban Maur, De clericorum institut., iii, 8-15, t. cvii, col. 384-392 ; Hugues de Saint-Victor, Erudit., didascal., t. V, t. clxxvi, col. 789-798. Pour les Pères et écrivains latins, consulter l’Index scripturarius, vm, de la Patrologie latine, t. ccxix, col. 7984. C’est à l’époque de la Réforme du xvie siècle que se multiplièrent les traités spéciaux d’herméneutique. Cependant, au XVe siècle, Jean Gerson avait déjà donné, d’excellents principes d’interprétation dans ses Proposi-’tiones de sensu litterali Scripturse sacr se ; Opéra, Paris, 1606, t. i, p. 515. Nous grouperons séparément les ouvrages postérieurs selon qu’ils ont été composés par des catholiques ou des protestants.

Traités catholiques.

Santé Pagnino, Isagoges

seu introductionis ad sacras litteras liber unus, Lyon^ 1528, 1536, puis avec Isagogse ad sacras litteras et ad mysticos Scripturse sensus, Lyon, 1536 ; Cologne, 1543 ; voir t. ii, col. 1480. Ambroise Catharin, Claves duse ad aperiendas intelligendasve sac. Script, perquam neces-