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HÉBRAÏQUE (LANGUE)

autres fonctions, ils se placent au-dessus ou au-dessous de cette syllabe tonique, généralement au-dessus ou au-dessous de la consonne qui en marque le début. L’accent tonique est généralement sur la dernière syllabe du mot (qui est alors appelé milra), parfois sur la pénultième (le mot est alors dit mil‘ĕl), jamais sur l’antépénultième. — Les accents servent en outre à indiquer le lien logique de chaque mot avec la phrase tout entière, en marquant soit la connexion, soit la séparation des termes ; on distingue, à cause de cela, des « accents conjonctifs » et des « accents disjonctifs ». — De plus il y a deux systèmes d’accentuation, dont l’un est employé pour les livres regardés comme poétiques par les Massorètes (Psaumes, Proverbes, Job), l’autre pour les livres censés rédigés en prose. Les accents prosaïques sont au nombre de vingt-sept, les accents poétiques au nombre de dix-neuf. Il est inutile de les énumérer ici. — Les accents les plus importants sont les deux disjonctifs suivants : le Silluq ( –ֽ ) qui, joint au Soph-Pasuq (&nbsp ; ׃&nbsp ;), marque la fin du verset, et l’athnach Athnach, signe de cantilation< ! -- Cette police de caractères n’accepte pas le caractère Unicode de l’Athnach --> qui se met sous la tonique à la fin de la première moitié du verset.

II. Phonétique. — La phonétique est l’étude des propriétés des consonnes et des propriétés des voyelles.

I. propriétés des consonnes. — 1o Il faut distinguer d’abord plusieurs groupes de consonnes importants à signaler, à savoir : les gutturales (ע, ח, ה, א), les muettes (ת, פ, כ, ד, ג, ב), les faibles (י, ו, ה, א), les sifflantes (שׁ, שׂ, ץ, ס, ז), les dentales (ת, ט, ת), les liquides (ר, ן, ם, ל).

2o Les phénomènes généraux auxquels les consonnes hébraïques peuvent être sujettes sont : — 1. La commutation, en vertu de laquelle une lettre a été remplacée par une autre lettre du même organe ou assez homogène, par exemple dans עלץ, עלם, אלז, « être dans la joie, » גאל et געל, « racheter. » — 2. L’assimilation, en vertu de laquelle la consonne qui termine une syllabe se change en la consonne qui commence la syllabe suivante. Le cas le plus fréquent est l’assimilation de la consonne יִקָּטֵל : נ pour יִנְתָטֵל. L’assimilation n’a lieu d’ordinaire que dans le cas où la première consonne n’a pas de voyelle, mais un simple scheva quiescent ; quant à la seconde consonne, elle se redouble et prend le daguesch fort. — 3. La suppression des consonnes et plus particulièrement des faibles, אהוי, et des liquides, למנ. Elle a lieu soit au commencement des mots quand la consonne aurait un simple scheva mobile (גַּשׁ pour נְגַשׁ, impératif kal de נַגָשׁ), soit au milieu des mots surtout après une consonne munie du scheva mobile (יַקְטִיל pour יְהַקְטִיל, imparfait hiphil de קָטַל), soit à la fin des mots par exemple aux 3es pers. ptur. mas. des verbes (יִקְטְלוּ pour יִקְטְלוּן, imparfait kal de קָטַל), soit aux états construits pluriels des noms, où ים–ִ devient י–ֵ.i— 4. La transposition. On la remarque dans certains mots ; c’est ainsi par exemple que שִׂימְלָה et שַׂלְמָה ne diffèrent que par la transposition du ל et du מ et ont exactement le même sens. La transposition a lieu aussi dans certaines formes grammaticales, lorsque la conjugaison amène la juxtaposition d’une sifflante après une dentale préformante ; dans ce cas la sifflante passe avant la dentale et la forme הַשְׁתַּמֵּר remplace, à l’hithpahel de שָׁמַר, la forme normale הִתְשַׁמֵּר.i— 5. Surtout le redoublement, indiqué par le daguesch fort. Le redoublement est essentiel : quand une consonne devrait être écrite deux fois sans autre intermédiaire que le scheva simple quiescent, הִכְרַתִּי pour הִכְרַתְתִּי ; quand il y a assimilation, יִגַּשׁ pour יִנְגַּשׁ ; quand le redoublement est caractéristique d’une forme grammaticale soit dans la conjugaison du verbe (לִמֵּד de לָמַד), soit dans la dérivation des noms (גַּבּוֹר). Il est en revanche des cas où le redoublement n’a d’autre raison d’être que l’euphonie. On ne redouble pas les consonnes finales, ni certaines consonnes (notamment les sifflantes et נ, מ, ל, י, ו) munies du scheva simple.

3o Les lettres muettes, les gutturales et les lettres faibles donnent lieu à plusieurs remarques particulières : 1. Les muettes ont une double prononciation : un son primitif dur et rapide, et un son aspiré, plus doux et plus faible (on ne fait guère sentir la différence que pour le פ, dont la prononciation dure est p, dont la prononciation aspirée est ph). La prononciation dure, indiquée par le daguesch doux, s’est maintenue dans les muettes : au début des mots, quand ils commencent une phrase ou un membre de phrase, ou bien quand ils sont précédés d’un mot terminé par une lettre sans voyelle ; au commencement des syllabes dans le corps des mots, quand la syllabe précédente se termine par une consonne munie du scheva quiescent (יִרְפָּא, « il guérit » ) ; enfin toutes les fois que ces consonnes sont redoublées (le daguesch fort remplit alors une double fonction : il indique le redoublement et sert de daguesch doux). — 2. Les gutturales ont trois propriétés spéciales. — Leur dureté ne permet pas qu’on les redouble ; elles n’ont jamais de daguesch ; le ה et surtout le ח peuvent avoir un redoublement atténué que l’on appelle virtuel et qui exerce son influence sur le choix des voyelles qui les précèdent. — Leur prononciation rauque est inséparable d’une certaine association avec le son a ; de là vient que, toutes les fois que c’est possible, la voyelle a prend, devant les gutturales, la place des autres voyelles : זֶבַח pour זֶבֶח, « sacrifice. » Quand cette substitution répugne aux principes de la grammaire, on introduit, entre la voyelle et la gutturale, un a intermédiaire très bref, dit patach furtif, qui n’est pas même une voyelle proprement dite et qui se prononce avant la lettre sous laquelle il est inscrit : שָׁלוּחַ, Šâlua, pour שָׁלוּח. — Enfin lorsque ces consonnes n’ont qu’une semi-voyelle, on ne peut généralement les prononcer sans faire entendre un son plus caractérisé que celui du scheva simple mobile ; de là l’emploi des schevas composés avec les gutturales, אֱמֹר׃ pour אְמֹר ; et יַהֲרֹג pour יִהְרֹג ; même le scheva composé est remplacé par une voyelle proprement dite devant un scheva simple, יַהַרְגוּ pour יַהֲרְגוּ (chaque gutturale a une affinité particulière avec un scheva composé : א avec ֱ , i ה et ח avec ֲ ).{{{1}}} Toutefois la règle du scheva composé, absolue quand la gutturale est au début des mots et des syllabes (גָּאֲלָה, עֲמֹד), admet beaucoup d’exceptions quand la gutturale termine la syllabe (יַחְשֹׁב, שָׁלַחְתָּ). — Le ר est assimilé aux gutturales en tant qu’il ne peut pas se redoubler, et qu’il a quelque affinité pour le son a. — 3. Les lettres faibles ont ceci de particulier que leur articulation est, en certains cas surtout, très atténuée, très adoucie, et peut même, sous diverses influences, ne plus se faire entendre du tout ; dans ce dernier cas, les lettres faibles ne servent plus qu’à allonger les voyelles qui les précèdent. — L’א est l’esprit doux du grec ; il garde toujours cette articulation et reste lettre gutturale quand il est au début du mot ou d’une syllabe : אָמַר, ’âmar, « il a dit. » Il la garde même en certains cas, lorsque dans le corps du mot il termine une syllabe, נֶאְדַר. Mais l’א perd le plus souvent sa valeur de consonne à la fin des syllabes dans le corps du mot ; il la perd toujours quand il termine le mot lui-même. Dans ces deux cas il ne fait plus qu’allonger la voyelle