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QABACUG


revint dans son pays qu’après l’éloignement des Chaldéens, qu’il y mena une vie agricole et qu’il y mourut deux ans avant l’édit de retour, en 538. S. Ëpiphane, t. xliii, col. 409. Cf. S. Isidore de Séville, De ort. et ob. Patr., 47, t. lxxxhi, col. 145. Le récit, en un point, coniirme l’extrait de Daniel sur l’Habacuc discophore dont parle du reste une tradition orientale très répandue, mais il ne regarde pas notre prophète. Il fut enseveli dans son champ, et son tombeau se voyait, du temps d’Eusèbe, à Ceila ou, plus exactement, entre Ceila et Gabata, non loin d’Éleuthéropolis. Ses restes furent trouvés par Zébennios, évêque de cette ville au vie siècle. Disons cependant que la tradition juive nomme plutôt Huqqoq en Nephthali. Hormis le fait raconté Dan., xiv, 32-38, qui ne touche pas probablement à notre prophète, tous ces récits sont incertains, incohérents, et la critique, même la plus raffinée, ne sait en général où se prendre dans ces légendes. Voir Frz. Delitzsch, De Habacuci prophetse vita atque mtate, Leipzig, 1842, et S. R. Driver dans le Dictionary of the Bible de J. Hastings, Edimbourg, 1899, t. ii, p. 272. Cf. W. Farrar, The minor Prophels, p. 159-174. II. Le livre du prophète.

Analyse.

La prophétie,

massa’, onus, « fardeau, » cf..L. Reinke, p. 63, s’ouvre brusquement par une plainte : Jusqu’à quand crierai-je sans être écouté ? La violence et l’oppression augmentent. L’inique prévaut. La loi est morte, i, 1-i. — Réponse de Dieu : Qu’ils regardent au loin. Il va exercer sur eux, de leur vivant, un jugement qu’ils ne croiraient pas, s’il leur était raconté : voici que je fais lever les Chaldéens, sauvage nation, avide de ce qui n’est pas à elle, plus légère que le léopard, plus rapide que le loup du soir, race terrible sans autre droit qu’elle-même, — elle viendra pour détruire et ravager : ni rois, ni princes, ni villes ne l’arrêteront, elle emportera tout, puis elle s’exaltera, alors elle excédera et elle dira : ma force est mon dieu.ꝟ. 5-11. Le prophète effrayé intercède pour le peuple menacé : Dieu, vous êtes le Dieu de l’alliance (mn>) qui ne se rompt pas, l’Élohim d’Israël, le Saint qui ne doit pas vouloir que le peuple saint périsse. Donc, nous ne mourrons pas. Le Chaldéen n’a pas été fait si fort pour détruire absolument. D’ailleurs, l’œil divin est trop pur pour souffrir l’impie et le laisser dévorer en somme plus juste que lui. Israël est comme le poisson qui n’a pas de chef : le Chaldéen l’enlève à l’hameçon, le ramasse dans son filet. U triomphe. Il sacrifie à son filet, il offre de l’encens à ses rets. Cf. y ll b. En sera-t-il toujours ainsi ? Est-ce logique ?ꝟ. 12-17. — Il se relire en lui-même, en sa conscience de prophète, et attend que Jéhôvah lui réponde, ii, .1. Jéhovah lui répond et lui enjoint d’écrire très lisiblement la prédiction de la ruine, lente à venir mais inévitable, du Chaldéen. Le décret prophétique est rédigé par manière de proverbe :

Voici, elle [l’âme du Chaldéen] s’est enflée, elle manque de rec-Pour le juste. [Israël], il vivra par sa foi. [titude ;

L’orgueil sera la mort du Chaldéen, la foi, la vie d’Israël, y. 2-4. Leꝟ. 5 paraphrase 4°. Le Chaldéen est pris du vin d’orgueil, d’un orgueil qui monte, monte, s’annexant peuples sur peuples. Mais ceux-ci, en un môsâi, « proverbe » de cinq strophes, chantent à l’envi sa ruine, qui est leur vengeance prédite. Les strophes énoncent chacune un malheur distinct pour un crime distinct. — 1. Malheur à qui s’approprie ce qui ne lui appartient pas, il sera dépouillé par les survivants, à cause du sang versé et de la violence faite à la terre, à la ville et à ses habitants, ꝟ. 6 c -8. — 2. Malheur à qui cherche par une opulence mal acquise à se rendre inaccessible aux coups du sort, il sera atteint par la confusion méritée par ses oppressions et ses crimes, ꝟ. 9-11. — 3. Malheur à qui bâtit de somptueux édifices et des villes superbes avec l’injustice et du sang, c’est pour le feu et le néant qu’il aura fait travailler, et en fin de compte la connaissance de Jéhôvah remplira toute la terre, ꝟ. 12-14. —

4. Malheur à qui a traité les peuples avec le dernier mépris, plus grande encore sera sa honte et son ignominie : € Bois, toi aussi, et qu’on voie ta nudité » pour avoir si honteusement raillé et les hommes et les choses. y. 15-17. — 5. Malheur à qui fait des idoles et les invoque : « il n’y a pas de souffle à l’intérieur. »ꝟ. 17-19. — Transition. Pour Jéhovah, « celui qui est, s il habite dans son ciel ; que toute la terre fasse silence devant lui.ꝟ. 20. Il va exercer le jugement et opérer la délivrance. Habacuc, plein d’effroi à ces révélations, le prie d’abréger les délais et de joindre la miséricorde à « l’œuvre » de colère, iii, 2 hc. Une vision grandiose est la réponse à cette prière. — 1. Le Dieu saint vient par le sud, par Theman et Phâran : sa gloire, son cortège, les effets de sa présence : les peuples tremblent et se dissolvent sous son regard, les montagnes originelles s’affaissent et s’écroulent, ꝟ. 3-7. — 2. Il vient a) pour juger les impies, les Chaldéens et 6) pour sauver son peuple. Il le dit symboliquement d’abord, ꝟ. 12, puis en termes explicites :

Tu sors pour sauver ton peuple,

Pour sauver ton [peuple] Christ.

Tu frappes le faite de la maison de l’impie ;

Tu mets à nu son fondement jusqu’au ras du sol.

Tu perces de tes traits la tête de ses princes,

Ils se précipitent comme un tourbillon pour me disperser :

Leur joie est de celui qui dévore le juste en secret.

Tu te fais un chemin dans la mer,

Et tes chevaux traversent la boue des grandes eaux. ꝟ. 13-15.

Il revient encore sur l’effroi que cette vision terrible lui inspire, ꝟ. 16 (16 b très difficile et altéré peut-être), vision à laquelle il ajoute quelques autres traits, ꝟ. 17. Mais il s’y mêle un vif sentiment de joie et de confiance en Dieu, qui est sa force et son libérateur, ꝟ. 18, 19, héb.

Division.

Le petit écrit se partage en deux parties,

iii et m. — Première partie. 1. Plainte du prophète, i, 1-4 ; — 2. Réponse de Dieu : prophétie de l’invasion des Chaldéens, ꝟ. 5-11 ; — 3. Prière du prophète qui cherche à conjurer l’extermination dont Israël est menacé, ꝟ. 12-17 ; — 4. Attente ferme d’une réplique de Dieu, ii, 1 ; — 5. Révélation d’une des lois du gouvernement théocratique, ꝟ. 2-5 ; — 6. Ruine et destruction des Chaldéens annoncée, conformément à cette loi, dans une série de cinq « malheurs » ou Vse répondant à cinq grands crimes distincts : a) ambition insatiable, y. 6-8 ; — b) avidité criminelle et effort pour se mettre hors de toute atteinte, ꝟ. 9-11 ; — c) oppression des peuples et extorsions pour élever de superbes monuments, y. 12-14 ; — d) humiliation et mépris des nations soumises, y. 15-17 ; — e) idolâtrie absurde et vaine, ꝟ. 18-20. — Deuxième partie. 1. Prière du prophète afin de hâter l’heure du salut et de faire entrer la pitié dans le châtiment, m, 2 ; — 2. Jugement et délivrance. Théophanie, y. 3-7. But et fin de cette apparition divine, exprimés par symbole et figure et ensuite en termes exprès, ꝟ. 7-16 ;

— 3. Conclusion. Joie et confiance du prophète en la force de Jéhovah sauveur, ꝟ. 17-19.

Intégrité critique.

L’école critique s’est beaucoup

occupée du texte. Voyons rapidement comme elle l’a jugé. Tout d’abord, quelques-uns disent que I, 1-4, doit s’entendre des Chaldéens : c’est eux qui sont 1’« impie qui prévaut », ꝟ. 4e, et Israël, le juste qui souffre violence. Giesebrecht, Seitrâge zur Erklârung des Jesaias, Leipzig, 1897, p. 196,. Certainement, s’il en est ainsi, i, 5-11, n’est pas à sa place, il faut ou le mettre avant i, 1-4, ou le regarder comme inauthentique ou interpolé. Le mettre avant i, 1-4, est arbitraire et rien n’y oblige. Le tenir pour inauthentique ou interpolé est « non pas dénouer la difficulté, mais la trancher ». Donc, il n’est pas vrai que 1, 5-Il ne soit pas à sa place et, partant, que i, 1-4 s’entende des Chaldéens. — R n’est pas. plus vrai qu’il doive s’entendre des Assyriens. K. Budde, dans les Studien und Kriliken, 1893, p. 383, et dans. YExpositor, mai 1896, p. 372, le prétend. Selon lui, i,