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GÉRA.SÉNIENS (PAYS DES)


voit les restes de plusieurs temples, d’un théâtre, de thermes, etc., attestent son importance passée. On a cru que l’antique cité pouvait étendre sa domination sur un territoire considérable, de telle sorte que la « région des Géraséniens » eût atteint les bords mêmes du lac. Mais cette hypothèse tombe devant l’existence d’autres villes, voisines de la mer de Galilée, qui ne dépendaient en rien de Gérasa. Origène avait donc raison de dire que les évangélistes ne pouvaient penser à cette ville, qui ne saurait correspondre aux données du récit sacré. — 2° ra6ap7)vôv représente l’antique ViSapa (fig. 39-40), une dés places les plus importantes de la Pérée, et chef-lieu

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40. — Monnaie de Gadara.

    1. TIBERIQ KAIEAPI##


TIBERIQ KAIEAPI. Tète de Tibère, à droite. ^. TAAAPEIS. Têtede femme voilée et tourelée, à droite.

d’un district particulier, appelé la Gadaritide. Cf. Josèphe, Ant. jud., XIII, iii, 3 ; Bell, jud., IV, vii, 3. On la reconnaît aujourd’hui dans Umm Qeis, k dix kilomètres environ au sud-est de la pointe méridionale dij lac de Tibériade. La position est admirable ; les ruines sont également

EchelU

— Entrée d’un tombeau a Umm-Qeis. D’après Schumacher, Northern’Ajlûn, p. 71.

très belles. La vieille cité, assise sur une colline qui s’avance à l’extrémité septentrionale des monts de Galaad, pouvait facilement prolonger son territoire jusqu’au rivage. Sa nécropole est une des plus remarquables du pays, lies mieux conservés de ses tombeaux (fig.41, 42), creusés dans le roc, servent aujourd’hui d’habitation ; les démoniaques pouvaient donc y résider. Bon nombre d’auteurs voient dans Gadara la ville du récit évangélique. Il faut avouer cependant qu’elle est encore trop éloignée du lac, et que ses tombeaux ne peuvent être les « monuments » d’où s’échappèrent les possédés qui se présentèrent au Sauveur « aussitôt après sa sortie du bateau ». Marc, v, 2. Dans cette hypothèse, d’ailleurs, les démons auraient plus tôt fait de noyer les pourceaux dans le Hiéromax ou Schériat el-Menadiréh, presque aussi gros que le

Jourdain, et qui se trouvait forcément sur leur route.

— 3° C’est donc sur le rivage de la mer galiléenne qu’il convient de che<- ; her le lieu du miracle. Or, on a découvert près de l’ouadi Semak les ruines d’une localité appelée Kursi, Kersa ou encore Kursa. Cf. W. M. Thomson, The Land and the Book, in-8°, Londres, 1890, p. 375 ; J. Macgregor, The Bob Boy on the Jordan, in-8°, Londres, 1869, p. 422 ; G. Schumacher, Der Dscholan, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, Leipzig, t. ix, 1886, p. 340. Le mot Kursi, en arabe, signifie « siège », mais les habitants du pays ont pu altérer la prononciation primitive pour se rapprocher d’un terme connu et significatif, qui répond assez bien à la configuration du lieu. Kersa serait donc la Gergésa d’Origène et la Gerasa de certains voyageurs du moyen âge. Cette opinion est assez généralement adoptée maintenant. Cf. Wilson dans Smith, Dictionary of the Bible, 2e édit, Londres, 1893, t. i, part. II, p. 1099 ; C. Warren, dans J. Hastings, Dictionary of the Bible, Edimbourg, 1898, t. ii, p. 159-160.

Cependant le P. Lagrange, Bévue biblique, 1895, p. 519, croit qu’il est impossible de placer à Kursi-Kersa le lieu du miracle, et cela pour les raisons suivantes : 1° Kersa n’a jamais été une ville ; les ruines indiquent tout au plus un bourg. — 2° Il n’y a pas aux environs de nécropole, ni même de tombeaux isolés creusés dans le roc, qui puissent rendre l’impression du récit évangélique. Il y a bien, à l’orient de la ville, une grotte de 6 m 50 de long et de 4 m 50 de profondeur sur 2 m 80 de hauteur, creusée dans le flanc de la colline, mais elle ne présente aucun caractère sépulcral. — 3° Quoiqu’il y ait près de cette grotte une sorte de terrasse artificielle qui portait une tour d’environ 4 mètres de large sur 10 de long, les ruines de Kursi sont toutes sur le bord du lac, de sorte que les pourceaux descendant de la montagne auraient dû passer près de la ville et par conséquent auraient été aperçus, tandis que, dans l’Evangile, il faut aller prévenir les habitants. L’événement, dira-t-on, pouvait se passer à une certaine distance : mais au nord, l’ouadi Semak ferme l’horizon, au sud il n’y a certainement pas de grottes sépulcrales le long de la montagne, jusqu’à celles [de Qala’at ei-flosn], qui ne dépendent plus de Kersa. Ajoutons que Kersa, situé dans la plaine, ne peut être la Gergésa d’Eusèbe et de saint Jérôme, ou du moins le bourg situé sur la montagne, qu’ils décorent de ce nom… Kersa ne peut donc être le lieu du miracle ; il y a seulement à retenir que le nom pourrait bien, en effet, rappeler le pays des Géraséniens, car l’Évangile cite le pays et non la ville des Géraséniens. » Le savant auteur placerait plutôt la scène évangélique à une heure plus au sud, du côté de l’ouadi Fih. Là, à environ deux kilomètres de la rive, se trouve la colline de Qala’at él-Hosn, avec des ruines considérables. C’est l’emplacement d’une ville, la seule qui existât dans la région centrale de la rive orientale. Un peu au sud-ouest, à l’endroit nommé Halas, était la nécropole. Les tombeaux ne sont pas immédiatement sur le bord de la mer, mais saint Marc fait remarquer, v, 6, que le possédé « voyant Jésus de loin courut vers lui ». Le Sauveur se trouvait sur la voie qui longe le lac, devenue dangereuse, aune certaine distance de la ville. Les porcs paissant dans la montagne devaient eux-mêmes en être assez éloignés et sans doute du côté opposé à la cité, puisque les pasteurs s’enfuirent et vinrent prévenir les habitants. Matth., viii, 33. Il est possible également qu’un site voisin, Kuren Djéradéh, conserve comme Kersa, sous une forme altérée, le souvenir des Géraséniens. La partie centrale du lac devait donc porter ce nom, et la topographie moderne confirme ainsi l’Évangile. — On a cherché à concilier les textes et les opinions en disant que saint Matthieu parle de la région en général, saint Marc et saint Luc, d’un point particulier. Le pays serait indiqué par la ville la plus considérable, Gadara, dont le territoire, la Gadaritide, se