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CANON DES ÉCRITURES


concile In Trullo reçoit formellement le canon complet de Carthage. Un catalogue grec, publié par Cotelier, Patres apostolici, édit. Le Clerc, Amsterdam, 1724, t. i, p. 197, place les deutérocanoniques de l’Ancien Testament en dehors des soixante livres canoniques, en les désignant par ces mots : « Et ceux qui sont en dehors des soixante, » Kai ôo-a Ë ?a> tûv Ç’, et en les distinguant soigneusement de ceux qu’il appelle « apocryphes », àrcôxp-jça. Le catalogue stichométrique de Nicéphore, archevêque de Gonstantinople, les range sous le titre de « ceux qui sont contestés », âvTiXs’y’VTSi, mais il les distingue de la même manière des « apocryphes ». Nicephori Opuscula hisiorica, édit. G. de Boor, Leipzig, 1880, p. 132.

§ 7. Ecrivains des vin" et IX’. siècles. — Le V. Bède (673-735) commente Tobie et cite tous les deutérocanoniques. — Alcuin (723-801) donne deux fois en vers le canon complet des Écritures, Carm., vi, t. ci, col. 101, 731. — Rhaban Maur, évêque de Mayence (786-856), a commenté la plupart des livres deutérocanoniques. — Walafrid Strabon (-f vers 849), dans sa Glossa ordinaria, tout en rappelant la distinction de Rufin et de saint Jérôme entre les livres canoniques et les livres édiliants, les interprète tous sans distinction.

§ 8. Écrivains du Xe au xv> siècle. — La plupart admettent simplement et sans distinction tous les livres de l’Ancien Testament, comme Yves de Chartres († 1117), Décret., iv, 61, t. clxi, col. 276 ; Honoré d’Autun (f vers 1125), Gemma animse, iv, 118, t. clxxii, col. 736 ; Pierre de Rlois († 1200), De divis. et script. S. lib., t. ccvii, col. 1052 ; Gilles de Paris (f vers 1180), qui s’exprime ainsi (De num. lib. Utr. Test., t. ccxii, col. 43) :

styloque Dei digestus et editus orbi

Cunon Scripturas creditur esse sacrae. Qui tamen excipit hos : Tobi, Judith et M achabæos,

Et Baruch, atque Jesum, pseudographumque librum (la Sagesse) ; Sed licet excepti, tamen hos authentîcat usus

Kcclesite, iîdei régula, scripta Patrum.

Quelques-uns cependant, sous l’inlluence de ce qu’avait dit saint Jérôme, semblent attacher trop d’importance aux distinctions de ce Père. L’auteur de la célèbre Hisloria scholastica, Pierre Comestor († 1178), appelle « apocryphes » les livres de la Sagesse, de l’Ecclésiastique, de Judith, de Tobie et des Machabées ; mais il a soin d’ajouter que c’est « parce qu’on ignore quels en sont les auteurs », — ce qui est inexact pour l’Ecclésiastique, — et que « l’Église les reçoit parce qu’il n’y a pas de doute sur leur véracité ». Hist. schol., Prsef. in Jos., t. cxcviii, col. 1260. Rupert de Deutz († 1135), In Géra., iii, 31, t. clxvii, col. 318 ; Hugues de Saint -Victor († 1141), De scriptur.

et scriptor. sac, 6, t. clxxv, col. 15 ; Pierre le Vénérable, abbé de Cluny († 1185), s’expriment avec peu d’exactitude. Jean de Salisbury (1110-1180), Epist. cxiiii, t. cxcix, col. 126, s’égare complètement. Hugues de Saint-Cher (-ꝟ. 1263), Prol. in Jos., Opéra omnia, Lyon, 1669, 1. 1, p. 178, rappelle les distinctions de saint Jérôme, mais il admet néanmoins les deutérocanoniques comme vrais, quoiqu’il les place hors du canon :

Lex vêtus his libris (les protocanoniques) perfecte tata tenetur, Restant apocrypha, Jésus, Sapientia, Pastor, Et Machabæorum libri, Judith atque Tobias. Hi quia sunt dubîi, sub canone non numerantur, Sed quia vera canuut, Ecclesia suscipit illos.

Nicolas de Lyra (vers 1270-1340) partage la même opinion, de même que saint Antonin, archevêque de Florence (1389-1459), Ghron., i, 3, 5, 9, Lyon, 1586, 1. 1, p. 65, 85 ; Summa theolog., iii, 18, 6, Vérone, 1740, t. iii, p. 1043 ; Alphonse Tostat, évêque d’Avila (1412-1455), Cornm. in I Reg. In Prol. Gal., q. 27, 28, Opéra, Venise, 1728, t. xi, p. 19, etc. ; le cardinal Cajetan (1469-1534), Conim. in Eslh. x, 3, dans In omnes libros authenticos Scripturx comment., Lyon, 1639, t. ii, p. 400.

Malgré ces rares voix discordanles, la tradition de l’Église restait inébranlable. Toutes les Bibles du moyen âge contiennent les deutérocanoniques en même temps que les protocanoniques. Aussi le décret d’Eugène IV, promulgué au concile de Florence, en 1441, sur l’union des Jacobites, renferme-t-il « Tobie, Judith, Esther, la Sagesse, l’Ecclésiastique, les deux Machabées », comme le Pentateuque et les prophètes. Voir Theiner, Acta Conc. Trid., Agfam, 1874, t. i, p. 79. Luther, en rejetant ces livres, se sépara donc de la tradition, et le concile de Trente ne fit qu’affirmer ce qu’on avait toujours cru dans l’Église, malgré l’hésitation de quelques-uns, dans la promulgation de son Canon des Livres Saints, qui eut lieu le 8 avril 1546. Il contient les mêmes livres que les canons des conciles d’Afrique, du décret du pape Gélase, d’Innocent I er et du concile de Florence. Les Pères de Trente refusèrent d’établir aucune distinction réelle entre les protocanoniques et les deutérocanoniques, et leur décision mit fin aux discussions entre catholiques. Quoique les protestants refusassent de se soumettre à l’autorité du concile, ils continuèrent cependant à insérer les deutérocanoniques dans leurs éditions de la Bible. Les Sociétés bibliques ne les ont supprimés que depuis le commencement de ce siècle. Voir t. i, col. 1788. Nous allons résumer dans le tableau synoptique suivant les témoignages des anciens écrivains ecclésiastiques relatifs aux livres deutérocanoniques :

— Tableau des citations des deutérocanoniques de l’Ancien Testament dans les anciens écrivains ecclésiastiques.

Les citations précédées d’un point d’interrogation sont douteuses. — Le tiret indique l’absence de citations.

DiTES

ÉCRIVAINS

TOBIE

JUDITH i EST11ER

| X, 4 -XVI

SAGESSE

ECCLÉSIASTIQUE

BARUCH | DANIEL

i

MACHABÉES

Pape vers 01-101

S. Clément, pape.

/ Cor., 55, 59 ; I Cor., 55.

I Cor., 3, 27, etc.

I Cor., 9-10, 20, 60.

( ?)

Auteur de II Cor.

Il Cor., 16.

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Il Cor., 17. II Cor., 16.

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Doctr. Apotlol.

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II. - 6