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ÉLISA — ELISABETH


bien fragile le fondement de cette hypothèse, « qu’aucune preuve et aucune tradition ne justifient, et où [les auteurs ] ont été guidés par l’idée fausse qu’Élischàh devait être en dehors de Yâvân, qui embrasse tous les Grecs. » Fr. Lenormant, Les origines de l’histoire, Paris, 1884, t. ii, 2e part., p. 35. — 2° Moins acceptable encore est celle qui veut voir Carthage dans Élisa, parce que la légendaire fondatrice de cette ville est appelée Élissa en même temps que Didon. C est la conjecture qu’émet, avec un point d’interrogation, Fried. Delitzsch, Wo lag das Parodies ? Leipzig, 1881, p. 250. « Quarth-Iladaschth ou Carthage, dit encore justement M. Fr. Lenormant, loc. cit., était une fille de Kéna’an. Jamais l’idée ne serait venue à un Phénicien ou à un Hébreu de la ranger parmi les enfants de Yâvân. » — 3° La majorité des commentateurs reconnaît ici la population de la Grèce européenne, ce qui est plus conforme à la tradition. Mais encore à quelle tribu spéciale faut-il remonter ?

Si l’on regarde’ElUâh comme un nom indigène, que les Phéniciens n’ont pas forgé, et dont il faut chercher la source dans la nomenclature géographique ou ethnographique de l’ancienne Grèce, on trouvera trois termes auxquels les exégètes l’ont comparé : ’EXXâ ; , "H).( ; et AioXeïc — J. D. Michælis, Spicilegium geogr. Hebrseorum, Goettingue, 17(38-1770, t. i, p. 79, prend le premier terme de comparaison ; mais les lois de la linguistique s’opposent à ce sentiment. La forme la plus ancienne de "EMr)vsç est EeXXof. Dans la forme postérieure Hellên, Vs initial primitif s’est changé en ii, et le thème s’est développé par l’addition d’un n final. Une transcription aussi vieille que celle de la Bible conserverait nécessairement la sifflante du début, qui appartenait à la racine originaire, sal ou sel. — S. Bochart, Phaleg., lib. iii, cap. iv, Cæn, 1646, p. 176, se reporte à’HXt ; du Péloponèse, mais la forme première de’HXeîoi est FaXeîFot, avec double digamma ; celle de FccXeIoi était si bien consacrée par la tradition dans l’usage local, que, jusqu’au milieu du i" siècle avant l’ère chrétienne, la légende des monnaies des Éléens reste FAAEIQN. La transcription sémitique devrait donc présenter un vau correspondant au digamma initial’, ce qui n’existe pas. — Il est donc plus conforme à la philologie de rapprocher’Elîsâh de AîoXieù ; , pluriel AloXtéeç, AioXiet ;  ; forme primitive : AîoXieFù ; , pluriel AtoXtéFe ; . La transcription phénicohébraïque est d’autant plus acceptable qu’elle a pu se faire sur une forme AÎXieFùc, AÎXieùç, où Yo était tombé, comme on l’observe dans aïXoupo ; , pour aî<SXoupoç, et dans la comparaison de aïva> avec aïovim. Cf. A. Knobel, Die Vôlkertafel der Genesis, Giessen, 1850, p. 81. La correspondance de’ElUâh avec AîXieFù ; est tout à fait analogue à celle de la transcription égyptienne du nom des Achéens, A-qa-y-va-sa, avec son prototype’Ax « iFb ; , devenu ensuite’A^aid ; .

Les Éoliens sont une des deux divisions des Hellènes proprement dits, opposés aux Ioniens, quand, dans les populations de la Grèce, on ne distingue que des Doriens, des Éoliens et des Ioniens. La tradition généalogique plus habituellement répandue compte chez lés Hellènes propres ou Grecs occidentaux trois branches : .Éoliens, Doriens et Achéens. Dans ce sens restreint, les Éoliens sont un peuple qui a eu pour berceau la Thessalie, où la légende fait régner leur père Aiolos. De là ils s’étendirent sur l’Eubée, sur la Béotie, et enfin sur l’Étolie, où ils trouvèrent déjà établis les Étoliens et les Éléens. Quelques tribus pénétrèrent également dans le Péloponèse. Les Phéniciens, qui ne durent avoir de relations qu’avec les côtes de la Grèce, et ne purent, en Macédoine et en Thessalie, connaître que la population du littoral, c’est-à-dire les Éoliens, en étendirent le nom, altéré dans leur propre langue, à toute race protohellénique ou dorienne qui s’était mêlée avec les Éoliens. Cette extension eut lieu d’ailleurs dans la bouche et les traditions des Grecs eux-mêmes, « Et l’auteur du tableau ethno graphique du chapitre x de la Genèse était ainsi autorisé à appliquer, comme il l’a manifestement fait, l’appellation de’ElUâh = AioXiiec à toutes les populations de la Grèce européenne, à l’ensemble des Hellènes proprement dits, à une époque où les Doriens n’étaient pas encore descendus de leurs montagnes sur le terrain où s’étendent ses connaissances géographiques, et peut-être n’avaient pas encore constitué leur individualité spéciale, distincte de celle des Éoliens. » F. Lenormant, Les origines de l’histoire, t. ii, 2e part., p. 43.

M. J. Halévy, Recherches bibliques, Paris, t. i, 1895, p. 260-264, précise davantage la question. Pour lui, ’Elisdh représente, en particulier, une contrée spéciale du Péloponèse, la Laconie. D’abord, le parallélisme, intentionnellement établi par l’auteur sacré entre les deux premiers fils de Javan, Élisa et Tharsis d’un côté, et Céthim (Chypre) et Dodanim ou Rodanim (Rhodes) de l’autre, montre qu’il ne faut pas chercher dans ceux-là de grands pays continentaux, mais des lies, tout au plus des péninsules, que les anciens englobaient d’ordinaire dans cette dénomination. Ensuite l’identité d’'EliSâh avec la Laconie résulte de l’abondance en coquilles de pourpre qui rendit ce pays célèbre dans toute l’antiquité, ce à quoi fait allusion Ézéchiel, xxvii, 7. Quant au nom lui-même, il doit être emprunté à une ville maritime importante de la Laconie propre. Il doit en outre représenter un dérivé ethnique du nom indigène de cette ville, ce qui résulte de la forme des deux dernières personnifications : Céthim (hébreu : Kittîm) et Dodanim (hébreu : Dôdânim et Rôdànim), qui sont les pluriels des noms ethniques Ki(tyi et Rôdâni, tirés l’un de K^-uov, et l’autre de’PiSSoç. Voir Céthim, col. 466, et Dodanim, col. 1456. Ainsi’ElUâh est un nom ethnique dérivé de la ville de "EXo ; en Laconie. Les fréquents rapports des Phéniciens avec cette cité maritime ont été constatés dans ces derniers temps par les inscriptions phéniciennes et grécochypriotes découvertes dans l’Ile de Chypre. On connaissait déjà des ex-voto voués par les Phéniciens à Apollon Amycléen. Des trouvailles récentes y ont ajouté le culte d’Apollon d’Hélos, ’AitiXXwv’EXsi-niç, nxSs *]un ou Dn>nbN *|W-|, en dialecte’AireiXov’EXd-criç ou 'AXa<ria>Tï]< ; . De ces deux formes ethniques dérivées d’Hélos, l’une, ’EXeiTTic, se rapproche beaucoup de la forme classique et est rendue en phénicien par whn, avec élision du sigma final ; la seconde, populaire, revêt la physionomie jadis entièrement inconnue de’AXaaiMTï] ; , dont la transcription littérale en caractères sémitiques serait DniDiN ou wivttrbN. Le fait que la transcription phénicienne le rend par Dirnbx, avec un ii, hé, au lieu de d, samech, montre seulement qu’au ive siècle avant notre ère la lettre s placée entre deux voyelles se réduisait, dans le dialecte chypriote, à une faible aspiration. Le nom hébreu niibb », ’ElUâh, anciennement rra’bN, ’ElUdf, s’est donc développé sur la base de’AXaffiwcfa :  ; ) — (w) n’itfbN, ’Alaèiôf(&).

L’altération consiste, d’une part, dans le rejet de la sifflante finale, ur, i, après la dentale, ii, t ; de l’autre, dans la métathèse subie par la voyelle i. — La discussion, on le voit, repose uniquement sur la comparaison des mots. C’est une base fragile assurément ; mais c’est la seule que possède la science actuelle, dont nous avons donné

les derniers résultats.

A. Legendre.
    1. ELISABETH##

ELISABETH, nom de deux femmes, une de l’Ancien, l’autre du Nouveau Testament.

1. ELISABETH (hébreu : ’ËlUéba’, « dont le serment est Dieu ; » Septante : ’EX « raêé8), épouse d’Aaron. Exod., vi, 23. Elle était fille d’Aminadab, de la tribu de Juda, et mère de Nadab, Abiu, Éléazar, Ilhamar. Elle était sœur de Naasson, chef de la tribu de Juda dans le désert du Sinaï. Exod., vi, 23 ; Num., ii, 3.