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ÉGYPTIENS (ÉVANGILE DES) — EL


pris dans la géhenne du feu fait penser à une doctrine très contraire à la métempsycose, que nous avons vu reprocher à l’Évangile des Égyptiens. Il se pourra donc que la Secunda démentis ait cité un évangile apocryphe d une certaine valeur ; mais cet évangile n’est pas l’Évangile des Égyptiens. Quant à ce dernier, il convient d’y voir une compilation apocryphe, sans valeur comme tradition évangélique, fiction égyptienne hérétique des environs de 150, loin d’y trouver, comme M. Harnack, une tradition parallèle aux évangiles synoptiques et dont la rédaction pourrait remonter à la fin du I er siècle. Pour l’hypothèse de M. Harnack, qui voit dans les Logia du papyrus de Benhésa, découvert par MM. Grenffell et Hunt, en Egypte (1897), des extraits de l’Évangile des Égyptiens, elle ne paraît pas fondée. A. Harnack, Geschichte der altchristlichen Litteratur, t. i, Leipzig, 1893, p. 12, et t. ii, 1897, p. 612 ; Batiffol, Anciennes littératures chrétiennes, la littérature grecque, 2 a édit., Paris, 1898, p. 38 ; Revue biblique, 1897, p. 501-515.

P. Batiffol.

    1. EICHHORN Jean Gottfried##

EICHHORN Jean Gottfried, exégète rationaliste allemand, né à Dorenzimmern le 16 octobre 1752, mort à Gœttingue le 25 juin 1827. D’abord professeur de langues orientales à l’université d’Iéna, en 1775, il passa, en 1788, à celle de Gœttingue. Il imagina l’explication naturelle des miracles et fut l’un des pères du rationalisme allemand. Voir F. Vigouroux, Mélanges bibliques, 2e édit., 1889, p. 144-161 ; Les Livres Saints et la critique rationaliste, 4e édit., t. ii, p. 438-449. Parmi ses nombreux écrits plusieurs se rapportent ^t l’Écriture Sainte ; nous citerons : Einleitung in das Alte Testament, 3 in-8°, Leipzig, 1780-1783 ; Einleitung in die apokryphischen Schriften des Alten Testaments, in-8°, Gœttingue, 1795 ; Einleitung in das Neue Testament, 2 in-8°, Gœttingue, 1804-1810 ; Commentarius in Apocalypsim Joannis,

2 in-8°, Gœttingue, 1791 ; Die hebrâischen Propheten,

3 in-8°, Gœttingue, 1816-1820. Il a en outre écrit un grand nombre d’articles dans les deux recueils suivants : Repertorium fur biblische und morgenlândische Literatur, 18 in-12, Leipzig, 1777-1786 ; Allgemeine Bibliothek der biblischen Literatur, 10 in-8°, Leipzig, 17871801.— Voir H. G. A. Eichstædt, Oratio de J. G. Eichhorn illustri e.xemplo felicitatis Academicse, in-4°, Iéna, 1827 ; Th. G. Tyschen, Memoria J. G. Eichhorn, in-4°, Gœttingue,

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B. Heurtebize.

EL (hébreu : ’El ; Septante : ©erfç ; Vulgate : Deus ; assyrien : ilu), nom générique de Dieu, dans la langue hébraïque. Élohim a en hébreu la même signification, quoiqu’il en soit distinct. Voir Élohim. Nous n’avons d’ailleurs dans nos versions aucune trace de la distinction existant dans le texte original entre ces deux mots, parce qu’elles ont rendu l’un et l’autre par le même terme, 0e6î, Deus, Dieu. I. Le mot El. — On le fait dériver assez communément de Vin, ’ûl, racine verbale inusitée, à laquelle on attribue, entre autres sens, celui de « être fort », de sorte que’El signifierait « le fort ». Cf. Gen., xxxi, 29 (hébreu). Cette étymologie n’est pas acceptée aujourd’hui par plusieurs hébraïsants, qui donnent du mot des explications diverses et toutes sujettes à difficulté. Voir Fr. Buhl, Gesenius, Hebrâisches Handwôrterbuch, 12e édit., 1895, p. 39. Quoi qu’il eft soit, ’El a régulièrement dans l’Ancien Testament une valeur appellative, de même qu’Élohim, de sorte qu’il peut s’appliquer aux faux dieux comme au vrai Dieu. Par suite, pour désigner le vrai Dieu d’une manière précise et sans aucune équivoque, dans les écrits en prose on détermine souvent’El, soit par un adjectif : ’El haï, « le Dieu vivant, » Ts. xlii (xli), 3 ; lxxxiv (lxxxhi), 3 ; ’El’Ëlyôn, « le Dieu très haut, » Gen., Xiv, 18, etc. ; soit par un complément : hâ-’Êl’Ëlôhê’abîkâ, « le Dieu, dieu de ton père, » Gen., xlyi, 3 ; ’El’ôldm, « le Dieu d’éternité, » Gen.’, xxi, 33 ; ’El Bêt’El, « le Dieu de Béthel, » Gen., xxxi, 13 ; ’El’êlim, « le Dieu des dieux, » Dan., xi, 36, etc. Dans le style poétique, par abréviation’El peut s’employer sans aucun déterminant comme nom propre de Dieu. Job, v, 8 ; viii, 5 ; Ps. x, M ; xvi, 1 ; xvii, 6, etc. Quelquefois, mais plus rarement, il est précédé de l’article hâ-’Êl, pour désigner « le Dieu » par excellence, le seul vrai Dieu. Ps. lviii, 20 ; ls., xlii, 5. Voir F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. iv, p. 465-470.

II. Emploi du nom divin’El dans la Bible hébraïque.

—’El se lit, au singulier, deux cent vingt-six fois dans les livres protocanoniques de l’Ancien Testament (S. Xlendelkern, Concordantix hebraicse, 2 in-4°, Leipzig, 1896, t. i, p. 85-86) ; le pluriel’Êlim est employé seulement neuf fois.’Elôhîm est d’un usage beaucoup plus fréquent dans la Bible hébraïque. Voir Elohim. On doit remarquer que ce sont généralement les auteurs les plus anciens qui se sont le plus servis du mot’El. Il est dix-huit fois dans la Genèse (dont cinq fois avec l’épi—, thète èaddaï, « tout-puissant, » et quatre fois avec l’épithète’Élyôn) ; quatre fois dans l’Exode, vi, 3 (avec èaddaï ) ; xv, 2 ; xx, 5, et xxxiv, 14 ; dix fois dans les Nombres (huit fois dans les oracles de Balaam [xxm, 8, 19, 22, 23 ; xxiv, 4, 8, 16, 23] etxii, 13 ; xvi, 22) ; treize fois dans le Deutéronome (dont cinq dans les cantiques de Moïse). Il est absent des chapitres xi-xxxi de ce livre, de même que du Lévitique tout entier, où Dieu est toujours appelé Jéhovah et où Élohim lui-même ne se lit qu’une seule fois pour qualifier Jéhovah, xix, 2, et une autre fois pour désigner les faux dieux, xrx, 4. Josué l’emploie trois fois, Job plus de cinquante fois. Il est usité à peu près dans un tiers des Psaumes. Dans les livres de Samuel (I et II Reg.), il ne se rencontre que dans les morceaux poétiques. I Sam., i, 2, 3 ; II Sam., xxii (quatre fois) ; xxm (cinq fois). Isaïe l’emploie trois fois dans sa première partie, v, 16 ; xiv, 13 ; xxxi, 3 ; quatorze fois dans la seconde partie. Jérémie n’en fait usage que deux fois, li, 56, et xxxii, 18 ; ce dernier passage est un emprunt au Deutéronome, X, 17. Ézéchiel emploie’El Saddaï, x, 5 ; ’El seul, xxviii, 2, 9. On le trouve trois fois dans Osée et autant dans Malachie, une fois dans Michée, dans Nahum et dans Jonas, trois fois dans Daniel. On voit par là que peu à peu l’usage du nom de’El a diminué, et qu’il a été surtout conservé’par les poètes, qui ont toujours aimé les formes archaïques, et à qui l’emploi de ce mot monosyllabique était parfois plus commode que celui du nom d’Elohim. On ne le lit jamais dans le court livre de Ruth, dans le Cantique des cantiques, TEcclésiaste, les Proverbes, les (III et IV) livres des Rois, Joël, Amos, Abdias, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie, Esther, (I) Esdras, les Chroniques (Paralipomènes). Dans Néhémie (II Esdr.), il ne figure que dans une citation de l’Exode, II Esdr., ix, 31 et Exod., xxxiv, 6, et dans une double citation du même passage du Deutéronome, II Esdr., i, 5 ; ix, 32, et Deut., x, 17.

III. Le mot’El dans les noms propres. — Les Sémites, en général, manifestaient leur religion et leur piété envers leurs dieux en faisant entrer leur nom dans la composition des noms propres de personnes et de lieux, soit comme élément initial, soit comme élément final. Conformément à cet usage, les Hébreux se servirent du nom commun divin El (et plus souvent encore du nom propre de Dieu, Jéhovah, abrégé, voir Jéhovah ; jamais d’Elohim, qui était trop long) pour former leurs noms propres : par exemple, Éléazar, Elchanan, etc., Israël, Ézéchiel, Daniel, Métabéel ( nom de femme), etc. ; Phanuel, Béthel, etc. Cet usage existait encore du temps de Notre-Seigneur : nous trouvons dans l’Évangile : Nathana-el. Joa., i, 46, etc. Les Sémites polythéistes se servaient souvent, pour former leurs noms propres, du nom personnel de leurs dieux (voir Assurbanipal, Baltassar, etc.) ; mais on rencontre aussi l’emploi d’El chez plusieurs