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écriture hébraïque

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De son côté, l’écriture hébraïque se développe dans une direction différente. Nous en possédons peu de monuments. Bien que moabite, la stèle de Mésa appartient à la même famille paléographique que l’hébreu. L’inscription qui y est gravée reproduit la série complète des lettres de l’alphabet. On y observe déjà une tendance marquée à pencher les caractères et à recourber leur queue. Les lettres quiescentes y sont employées plus souvent que dans le phénicien. Tous les mots sont séparés l’un de l’autre par un point. L’écriture présente des traces d’usure qui attestent un emploi déjà assez long de l’alphabet. Elle a aussi les traits distinctifs qui deviendront les marques caractéristiques de l’écriture hébraïque. Les angles sont très aigus et fortement accusés ; les barres transversales du hé, du iod, du zaïn et du tsadé acquièrent une importance qu’elles n’ont pas en phénicien ; le vav présente une forme arrondie très particulière. Ces caractères sont encore plus sensibles sur les pierres gravées

jours dans l’écriture samaritaine. Les monuments de cette écriture sont des manuscrits du Pentateuque et des inscriptions provenant de Naplouse. Les manuscrits ne remontent pas au delà du Xe siècle de notre ère. Les inscriptions sont plus anciennes. On a voulu les rapporter à l’époque du temple de Garizim, qui fut détruit l’an 129 avant J.-G. Mais, plus probablement, elles sont seulement antérieures à la révolte des Samaritains sous Justinien I er, en l’an 529 de notre ère. L’alphabet qu’elles reproduisent est sensiblement le même que celui des manuscrits, et il dérive de l’ancienne écriture hébraïque. Les enjolivements y tiennent une trop grande place et donnent à l’écriture samaritaine quelque chose de factice et de capricieux. Elle paraît s’être arrêtée à un moment de son développement et être devenue hiératique. Anguleuse et massive, elle se replie sur elle-même et elle s’immobilise dans ses caractères stéréotypés. Ph. Berger, Histoire de l’écriture dans l’antiquité, p. 188-204. « 20. — Inscription phénicienne des colosses d’Ipsamboul. D’après le Corpus Inscriptionum semitiearum, part. i, pi. xx, n « 112. C’est une série de graffiti, contenant des noms propres. Voir laid., p. 131-135.

à légendes hébraïques. Mais ces cachets n’ont que très peu de lettres. Un monument plus complet, c’est l’inscription commémorative du percement du canal de Siloé. Voir t. l, col. 805 - 806. Il date du règne d’Ézéchias, delà fin du vin" siècle. Les mots sont séparés par un point, comme dans l’inscription de Mésa (voir Mésa). Les lettres ont quelque chose d’archaïque et de heurté ; leurs profils sont nettement accusés. Les queues, déjà penchées sur la stèle de Mésa, se replient de plus en plus sous la lettre.

Telles sont les modifications qu’a subies l’écriture monumentale. Nous ne pouvons, faute de documents, suivre les transformations de la paléographie manuscrite. Il nous est impossible de savoir si l’écriture a subi les mêmes changements dans les manuscrits que sur les monuments. Nous pouvons soupçonner seulement, d’après la règle générale et par analogie avec l’écriture araméenne, que l’écriture manuscrite des Hébreux s’est altérée plus vite que celle des inscriptions. Une grande lacune nous dérobe pendant plusieurs siècles l’écriture hébraïque, et, quand nous la retrouvons, elle est totalement modifiée ; elle s’est confondue avec l’écriture araméenne, dont est sorti l’hébreu carré. Cependant, même après cette substitution, l’ancienne écriture a persévéré dans la numisr matique. Sous les Machabées, quand l’hébreu carré est déjà devenu l’écriture courante, les monnaies frappées par Simon et ses successeurs ont toutes des légendes en caractères archaïques. Le même retour aux formes anciennes se retrouve sur les monnaies de Barcochébas, dont la révolte amena la ruine définitive du judaïsme, en l’an 134 après Jésus-Christ.

L’alphabet phénicien a même persévéré jusqu’à nos

4° Manière dont l’écriture phénicienne était transcrite.

— Les verbes qui désignent l’action d’écrire, kâfab, bê’êr, hârat, « tailler, sculpter, » nous indiquent que l’écriture fut d’abord gravée. Nous savons que les Hébreux ont gravé sur la pierre des inscriptions commémoratives ou des textes assez courts, comme le Décalogue et des passages de la Loi. Exod., xxrꝟ. 18 ; xxxiv, 28 ; Deut., xxvii, 8 ; Jos., viii, 32. Ils écrivaient aussi sur des plaques de métal, Exod., xxviii, 36 ; Job, xix, 24, et sur des tablettes de bois. Num., xvii, 3 ; Ezech., xxxvii, 16 et 17. Mais cette écriture monumentale ne pouvait être employée pour les œuvres littéraires un peu étendues, ni dans l’usage ordinaire. On ne voit pas que les Israélites aient eu coutume d’écrire sur l’argile, comme on le faisait à Ninive et à Babylone. Une Bible écrite sur des briques exigerait une grande bibliothèque pour la loger. Nous n’avons pas de renseignements explicites sur la matière dont les Hébreux se servaient pour écrire leurs livres. Mais le nom de « rouleau », megillâh, Ps. xxxix, 8 ; Jer., xxxvi, 2 ; Ezech., ii, 9 ; iii, 1-3 ; Zach., v, 1-2, laisse supposer que les livres étaient formés d’une matière flexible, peau préparée, papyrus ou étoffe. Des bandes de papyrus ou de cuir étaient rattachées l’une à l’autre et s’enroulaient autour de deux bâtons. De simples feuillets de papyrus ou des morceaux de parchemin servaient à recevoir des écrits plus courts. On n’écrivait que d’un seul côté. Dans les rouleaux, le texte était disposé en colonnes perpendiculaires, allant de droite à gauche. Les pages étaient appelées delâtôf, « portes, » Jer., xxxvi, 23, probablement à cause de leur ressemblance avec une porte rectangulaire.

Les caractères étaient gravés sur la pierre avec un