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ÉcniTURE — écriture hébraïque

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1, 2 ; ils citent 1rs prophètes en les appelant « l ypxfxi tûv jrpo ?ï)Twv, Scripturæ prophetarum, Matfh., xxvi, 56 ; ypaçaî jtpoçTiTixai, Scripturse prophetarum, Rom., xvi, 26, et ils reproduisent des versets on passages des auteurs sacrés en général en les nommant simplement ypa^r, , scriptura : « N’avezvous pas lu cette écriture ? » c’est-à-dire ce passage de l’Écrilure. Marc, xii, 10. Voir aussi Luc, iv, 21 ; Joa., XIX, 37 ; Act., i, 16. — Saint Pierre a appliqué le nom d’Écritures, al Y pif xi, aux écrits du Nouveau Testament, aussi bien qu’à ceux de l’Ancien, II Petr., iii, 16, et l’Église a adopté universellement cette manière de désigner tous les livres inspirés, de la même manière qu’elle a adopté les noms de Livres Saints, de Saintes Lettres, d’Ancien et de Nouveau Testament, qui sont également d’origine biblique. Pour le mot Bible, voir t. i, col. 1175-1176. F. Vigouroux.

2. ÉCRITURE HÉBRAÏQUE. L’écriture est l’art de représenter la pensée et de fixer la parole par des signes ou caractères, naturels ou conventionnels, tracés à la main ou à l’aide d’un instrument. On appelle idéographique l’écriture qui exprime directement, par des peintures ou des symboles, les idées ; phonétique, celle qui reproduit les sons de la parole. Cette dernière est syllabique ou alphabétique, selon que les caractères représentent des articulations complexes ou des syllabes, ou bien des sons simples ou des lettres. Les Hébreux n’ont employé que l’écriture alphabétique ; mais ils se sont servis successivement de deux formes différentes d’alphabets et ils ont eu deux écritures, la phénicienne et l’assyrienne, dont nous allons résumer l’histoire et les transformations.

I. Écriture phénicienne. — 1° Son origine. — Les Hébreux, parlant une langue semblable à celle des Phéniciens, adoptèrent de bonne heure l’écriture de ces derniers. Voir Alphabet hébreu, 1. 1, col. 402-416, pour l’origine et les éléments de l’écriture phénicienne. Sa dépendance des caractères hiératiques égyptiens paraît certaine. Toutefois l’emprunt n’a pas été fait de toutes pièces ni d’un seul coup. Le passage des hiéroglyphes à l’alphabet n’a été ni si simple ni si direct qu’on l’avait cru d’abord. Les hiéroglyphes héthéens et les inscriptions cypriotes, qui en dérivent, montrent par quels tâtonnements on a passé avant d’inventer l’alphabet. Le syllabaire cypriote (voir col. 467-469) se rattache au courant de simplification qui s’est produit presque simultanément dans les anciennes écritures idéographiques et d’où est sorti l’alphabet ; c’est un de ces essais qui ont précédé l’invention de l’alphabet et ont contribué soit directement, soit indirectement, à son éclosion. Il faut en rapprocher, semble-t-il, les caractères gravés sur des sceaux en pierre, découverts récemment dans le Péloponèse et l’île de Crète. À côté de signes hiéroglyphiques, empruntés au corps humain, aux animaux, aux plantes et à d’autres motifs d’ornementation, on a trouvé des formes cursives qui en sont le développement et qui constituent un syllabaire, semblable à celui de Chypre. A. J. Evans, Primitive Pictographs and a prse-pheenician Script front Crète and the Péloponnèse, dans le Journal of Hellenic Studies, t. xiv, 1894. Cf. Beilage zur Allgemeinen Zeitung, du 21 octobre 1895. Des signes de même nature ont été rencontrés dans la Basse Egypte, à Kahoun, sur des objets, de la XII 8 dynastie, et à Médinet-Ghorab, sur des objets de la XVIIIe et de la XIX » dynastie. Ce sont des marques de potier ou de maçon, qui reproduisent des signes hiératiques et des lettres des alphabets phénicogrecs. L’auteur de cette découverte, FI. Pétrie, les attribue à des prisonniers de race méditerranéenne, que les Égyptiens employaient comme captifs aux travaux publics. Ces travailleurs étrangers ne furent pas vraisemblablement initiés à l’écriture hiéroglyphique ; mais ils purent apprendre des maçons égyptiens, avec qui ils vivaient, l’usage des

marques d’ouvrage. On finit par employer ces marques hiéroglyphiques pour reproduire le son des mots qu’elles représentaient. Après avoir été d’abord une simple convention d’ouvriers, ces signes syllabiques furent transportés à travers la Méditerranée par le commerce international et servirent de mode d’écriture pour d’autres usages que leur emploi primitif. Ainsi ils pourraient être considérés comme un anneau intermédiaire entre les signes hiératiques et l’alphabet phénicien. FI. Pétrie, Kahun, Gurob and Hawara, in-4°, Londres, 1890. Cf. Revue critique d’histoire et de littérature, du 27 avril 1891, p. 322-323.

L’époque à laquelle les Phéniciens ont tiré leur alphabet des caractères hiératiques égyptiens est incertaine. On la fixe au temps de la domination des Hyksos. M. de Vogué, Corpus inscripfionum serniticarum, part, ii, t. i, Paris, 1889, p. il. Renan, Histoire du peuple d’Israël, t. i, Paris, 1887, p. 134-136, a précisé le lieu de l’emprunt. Ce lieu serait San ou Tanis, centre de l’empire des Hyksos. Ces Chananéens adaptèrent l’hiéroglyphisme égyptien à leur langue et transcrivirent les noms sémitiques au moyen d’un choix de vingt-deux caractères hiératiques. L’emprunt doit être plus ancien, car des découvertes récentes nous ont appris que les relations des tribus chananéennes avec l’Egypte ont précédé l’invasion des rois Pasteurs. D’ailleurs la présence de signes identiques aux caractères phéniciens sur les monuments de Kahun, qui remontent à trois mille ans environ avant notre ère, prouve au moins que les premiers essais d’alphabétisme sont bien antérieurs aux Hyksos. Tout ancienne que soit son origine, l’écriture alphabétique n’est devenue usuelle et commune chez les tribus palestiniennes qu’à une époque assez tardive, vers le XIVe ou le xm » siècle avant notre ère. En effet, la correspondance trouvée à Tell-el-Amarna nous a révélé que l’écriture cunéiforme était employée au xve siècle avec la langue assyrienne comme moyen officiel de communication entre le roi d’Egypte et ses tributaires ou alliés de la Mésopotamie, de la Syrie et de la Palestine. Si l’écriture alphabétique avait été répandue alors dans les pays araméens et phéniciens, les gouverneurs de Byblos, de Sidon et de Jérusalem auraient sans doute écrit au pharaon en phénicien, avec des caractères alphabétiques. L’emploi de ces caractères était donc alors limité. La nouvelle écriture n’était pas encore une écriture littéraire ; elle servait surtout aux Phéniciens dans leurs relations commerciales et n’était guère employée par les tribus chananéennes et autres qui habitaient l’intérieur de la Palestine. A. Loisy, Histoire critique du texte et des versions de la Bible, dans L’enseignement biblique, Paris, 1892, p. 64-70.

2° Époque à laquelle les Hébreux ont adopté l’écris ture phénicienne. — Nous manquons de renseignements précis pour déterminer cette époque, et nous ne pouvons dire avec certitude si les Israélites connurent l’alphabet durant leur passage en Palestine avant leur entrée en Egypte, ou seulement pendant leur séjour dans la terre de Gessen. Les philosophes français du siècle dernier niaient que Moïse fût l’auteur du Pentateuque, sous le faux prétexte que l’écriture n’était pas inventée de son temps. Tout en reconnaissant l’existence de l’alphabet avant Moïse, les rationalistes prétendent encore que les Hébreux ont appris à écrire sous les Juges, et qu’en Israël l’écriture est postérieure à Moïse et à Josué de trois à quatre cents ans. E. Reuss, L’histoire sainte et la loi, Paris, 1879, t. i, p. 114 ; E. Renan, Histoire du peuple d’Israël, Paris, 1887, 1. 1, p. 143 et p. 181, note 3. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. ii, p. 548-551. On peut soutenir que l’écriture était connue en Chanaan avant l’exode, et que malgré leur vie nomade les patriarches Abraham, Isaac et Jacob s’en servirent dans leurs relations d’affaires avec les habitants de la Palestine. Trochon, Introduction générale, Paris, 1886, 1. 1, p. 259-260. Il y a tout lieu de penser que, s’ils n’avaient