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DÉCAPOLE — DÉCHIRER SES VÊTEMENTS (USAGE DE)


conclu avec assez de vraisemblance que Josèphe ne comprenait pas dans la Décapole la grande ville de Damas, que Pline et (probablement) Ptolémée mettent en tête de leurs listes. Et cela nous semble d’autant plus probable, que la ville de Damas, du temps des empereurs Caligula et Claude, paraît avoir été sous la domination des rois nabatéens. II Cor, , xi, 32. (Voir Arétas, 4, t. i, col. 943-944.) Ajoutons que Schùrer, Geschichte, t. ii, p. 94, propose de joindre à la Décapole la ville de lCivara, maintenant Kerak, distincte de la Canatha (KavâOot ou Kàvw8a) de Pline et de Ptolémée (Qanawât), puisque des monnaies de Kiva-a ont l’ère de Pompée. Mais comme il existe une autre monnaie de la même ville, datant du milieu du IIIe siècle et ayant l’ère de la province d’Arabie, il en conclut que depuis la création de cette province (105 après J.-C.), la ville doit avoir été séparée de la Décapole. D’après le même savant, Geschichte, t. ii, p. 84, cette remarque s’applique en partie à plusieurs autres villes de la Décapole : dès le m siècle, elles apparaissent comme faisant partie de b province d’Arabie. Aussi croit-il que dès lors la confédération des « dix villes » avait cessé d’exister, et que les auteurs postérieurs, comme Eusèbe, Onomast., édit. de Lagarde, p. 116, 251 ; saint Épiphane, Hœr., xxix, 7 ; xxx, 2 ; De pond, et mens., 15 ; t. xii, col. 401, 408 ; t. xliii, col. 261 ; Etienne de Byzance, loc. cit., n’en parlent plus que dans un sens historique. En somme, il faut avouer que nous n’avons de renseignements assez clairs ni sur la nature de la confédération, ni sur le nombre et les noms.des villes qui à diverses époques en ont fait partie, ni enfin sur sa durée. Le nombre paraît avoir varié au moins de dix à quatorze. Mais toutes les villes qu’on peut y rapporter avec quelque vraisemblance étaient situées dans le pays transjordanien, excepté Scythopolis. Aussi l’opinion de Brocard, Descr. Terrée Sanctx, ch. VI, dans Ugolini, Thésaurus antiquit. sacr., t. vi, col. mxxxviii, et d’autres auteurs du moyen $ge, qui les cherchent presque toutes dans la Galilée, est dénuée de tout fondement et réfutée déjà par Lightfoot, Decas chorogr. in S. Marcum, ch. vii, dans Ugolini, Thésaurus, t. v, col. mlxi-mlxii. Du reste, ce dernier savant n’est guère plus heureusement inspiré, quand il veut joindre à la Décapole Cësarée de Philippe et quelques autres localités, que les auteurs du Talmud, relativement à certaines observances légales, mettent au même rang que Scythopolis, parce qu’elles étaient également situées dans le « pays d’Israël », mais habitées par une population en majorité païenne.

Il paraît d’ailleurs que le territoire de nos « dix villes » n’a jamais formé un tout continu. Le royaume d’Hérode le Grand et les tétrarchies qui lui succédèrent, — sans compter la possession temporaire de Gadara, d’Hippos, d’Abila, de Scythopolis, — séparaient sans aucun doute le territoire de Damas de tout le reste, et très probablement y faisaient d’autres coupures. C’est du moins ce que Pline, H. N., v, 18, affirme expressément. En parlant donc du « pays de la Décapole », on ne saurait donner à cette expression un sens bien déterminé. Aussi les indications des auteurs chrétiens sont des plus vagues : « en Pérée, — ou au delà du Jourdain, — autour d’Hippos et Gadara et Pella, » Onomast., p. 116, 251 ; — « dans les environs de Pella, — en Pérée, — près de la Batanée et . de la Basanitide. s S. Épiphane, Adv. hxr., xxix, 7 ; xxx, 2 ; De pond, et mens., 15 ; t. xii, col. 401, 408 ; t. xliii, col. 261. Toutefois la partie méridionale du Djaulan et les montagnes de’Adjloun doivent en avoir formé le noyau principal. C’est le plateau qui domine le lac de Tibériade à l’est et le pays montagneux et boisé qui s’étend entre l’ancien Yarmouk au nord et l’ancien Jaboc au sud. Là s’élevaient la plupart des villes de la Décapole, celles qui nous ont laissé les ruines les plus remarquables, mais qui n’ont pas un intérêt directement biblique, parce qu’aucune d’elles n’est nommée dans nos Livres Saints. En allant du nord au sud, nous rencontrons à peu de

distance du Jourdain : Hippos (QaVat el-llosn), Gadara ( Umkeis), Pella (Khirbet Fdi.nl), Dion, dont le site est inconnu, mais qui, d’après les données de Ptolémée ( « Gerasa, 68° 15’long., 31°45’lat. ; Pella, 67° 40’, 31°40’; Dion, 67°50’, 31° 35’» ), ne pouvait être que très peu au nord du Jaboc ; et dans l’intérieur : Abila (El-Qoeilbéh, dont une colline porte encore le nom de Tell Abil), Capitolias, nommée par Ptolémée (Beit Râs), Gérasa (Djeras). C’était un pays béni de la nature, et où fleurit assez longtemps la civilisation gréco-romaine, comme les restes de ces villes, nommément ceux de Gérasa, en rendent encore témoignage. Plus d’une fois sans doute ces contrées ont entendu la prédication du Christ. Cf. Matth., vin, 28-34 ; Marc, v, 1-20 ; Luc, viii, 26-39 ; Matth., xv, 29-xvi, 4 ; Marc, vir, 31-vm, 13 ; et peut-être Luc, x, 1-37 ; xiii, 22-xvii, 10 ; Joa., x, 39-42. Elles ont été le refuge des chrétiens de Jérusalem pendant le siège de Titus. L’histoire nous a conservé les noms de plusieurs évêques d’Hippos, de Gadara, de Pella, d’Abila, de Gérasa, et parmi les ruines de ces villes on trouve encore les restes de basiliques chrétiennes. Mais il faut ajouter, comme nous le raconte saint Épiphane, Adv. hxr., xxix, 1 ; xxx, 2 ; t. xli, col. 401, 408, que dès les premiers jours du christianisme le même pays a été le berceau de l’hérésie des Nazaréens et des Ébionites. Plus tard, la fatale bataille du Yarmouk, en livrant la Syrie et la Palestine à la domination musulmane, en fit disparaître à la fois presque complètement le christianisme et la civilisation. Les croisades ne purent rien changer à cette triste situation. Dans une bulle de Pascal II (1103) bon nombre de localités de cette contrée, il est vrai, figurent parmi les possessions de l’abbaye dit mont Thabor (voir Rôhricht, Studien zur mittelalt. Geogr. und Topogr. Syriens, dans la Zeitschrift des deutschen Palâstina-Vereins, t. x, p. 231-234) ; mais si le christianisme y exerça alors une influence éphémère, il n’en reste aucun vestige." Ce n’est que depuis une dizaine d’années que des missionnaires catholiques, à El-Hosn et’Andjara, ont recommencé à jeter les semences d’un avenir meilleur, en reprenant l’œuvre que le Sauveur lui-même avait commencée. — Quant aux autres villes qui figurent dans les listes de Pline et de Ptolémée, presque toutes figurent dans la Bible. Voir Bethsan = Scvthopolis, t. i, col. 1738-1744 ; Çanath = Canatha, col. 121-129 ; Damas, col. 1213-1231 ; ÉDRÉï = Adra (de Ptolémée) ; Rabbath -Ammon = Philadelphia : voir Ammon 4, t. i, col. 489-491 ; Raphon. Quant à Abila de la Décapole, il faut peut-être lire ce nom Hâ-Abilâh au lieu de Rebla (Hà-Riblâh) dans la description des frontières de la Terre Promise. Num., xxxiv, 11. Voir Chanaan 2, col. 535.

Il ne nous reste que deux noms de la liste de Ptolémée, dont l’identification est très difficile. Samulis nous est totalement inconnu. Le nom pourrait faire penser au district d’Ez-Zumléh, à l’est du chemin du pèlerinage de la Mecque, au sud d’Er-Remthéh. Mais la longitude donnée par Ptolémée (67 « 30 ; , var. 67° 10’; lat. 32° 30’, var. 32° 10) nous mènerait plutôt dans la Galilée, dans les environs du mont Thabor. Le texte est probablement altéré. Quant à la Gadora de la même liste, qui est nommée entre Dion et Philadelphie, nous sommes portés à l’identifier avec la ville actuelle d’Es -Sait. Cf. Schlatter, . Zur Topogr. und Gesch. Palàstinas, Calw et Stuttgart, 1893, p. 44-51. Seulement cette ville semble avoir été plutôt une ville juive que païenne, et dans ce cas l’on ne conçoit guère qu’elle ait pu appartenir à la confédération de la Décapole. J. van Kasteren.

    1. DECHIRER SES VÊTEMENTS##

DECHIRER SES VÊTEMENTS (USAGE DE).

— Ce signe de deuil est celui que la Bible mentionne leplus fréquemment. Le vêtement est un signe du bienêtre, de la richesse, de la dignité de celui qui le porte. On le déchirait pour marquer que le chagrin venait de faire une déchirure au cœur, en l’atteignant dans sa paix.