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DAVID

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repoussa toute solidarité dans cet odieux attentat ; il mena le deuil d’Abner, et épancha sa douleur dans un chant élégiaque, dont le commencement seul nous est parvenu. Il n’osa pas punir Joab, qui était très puissant ; mais il prononça contre lui une terrible imprécation. Sa douleur sincère fit taire les soupçons qui s’étaient répandus sur sa complicité dans l’assassinat d’Abner. II Reg., iii, 12-39. Voir t. i, col. 62-66. Deux chefs de voleurs tuèrent Isboseth et apportèrent sa tête à David, qui les punit de mort. II Reg., iv, 1-12. Alors toutes les tribus d’Israël reconnurent David pour leur roi, et les anciens lui conférèrent une troisième onction royale. Son règne à Hébron, sur la seule tribu de Juda, avait duré sept ans et demi. II Reg., v, 1-5.

2° Débuts du règne de David sur tout Israël. — David inaugura son règne sur tout Israël par un brillant exploit. Il marcha sur Jérusalem et s’empara de la forteresse de Sion, qui était encore au pouvoir des Jébuséens. Il s’y établit et la fit entourer de murs. Il existe encore à Jérusalem une tour rectangulaire, nommée tour de David. Bien que la construction actuelle soit généralement attribuée à Hérode, ses fondations et le massif principal peuvent être considérés comme l’ouvrage de David et même des Jébuséens. F. de Saulcy, Voyage autour de la mer Morte, Paris, 1852, t. ii, p. 369-371 ; V. Guérin, Jérusalem, Paris, 1889, p. 194-199 ; Ma’Meignan, David, Paris, 1889, p. 94-95. Jérusalem devint la cité de David et la capitale de son royaume. Par cet acte important, David fut le véritable fondateur du royaume d’Israël. « En lui donnant une tête et un centre, il cessa d’être un simple chef du peuple, comme l’avait été Saùl, comme l’étaient les scheikhs des tribus voisines, maîtres sur leur territoire, mais ignorants de toute administration et sans relations suivies au dehors. Il commença à être un vrai monarque, comme les rois d’Egypte et d’Assyrie, avec une organisation politique et une administration régulière qui se maintinrent et durèrent, au moins pour le fond, jusqu’à la ruine d’Israël. » F. Vigoureux, Manuel biblique, 9e édit., 1895, t. ii, p. 111-112. Il déploya dès lors un certain luxe, fit construire un palais, eut une cour, augmenta son harem de nouvelles* concubines, dont il eut des enfants. I Par., iii, 5-9 ; xiv, 1-7. Les Philistins lui déclarèrent la guerre et furent défaits à Baal-Pharasim et à Gabaon. II Reg., v, 6-25 ; I Par., xi, 4-7 ; xiv, 8-17. C’est dans cette campagne qu’on place l’épisode de l’eau, que de braves guerriers allèrent puiser, au péril de leur vie, à la citerne de Bethléhem, pour étancher la soif de David. Mais le roi aurait cru boire le sang des siens ; il refusa de se désaltérer, offrit l’eau au Seigneur et la répandit sur terre en son honneur. II Reg., xxm, 13-17 ; I Par., xi, 13-19. À cinq cents mètres au nord-ouest de Bethléhem, il existe trois citernes, que les Arabes appellent Biar Daoûd, « puits de David, » et dont l’une serait celle où les trois guerriers puisèrent. Mais quelques voyageurs infirment la tradition actuelle, en remarquant que le récit biblique place la citerne à la porte de Bethléhem. F. de Saulcy, Voyage autour de la mer Morte, Paris, 1852, 1. 1, p. 135-136 ; V. Guérin, Judée, t. i, p. 190-192 ; voir aussi t. i, col. 1694.

Après avoir restauré et consolidé l’unité politique de la nation par l’établissement d’une capitale, David prit soin dé faire de Jérusalem le centre du culte divin. Dans ce dessein, il y fit transporter l’arche, qui était restée à Cariathiarim, chez Abinadab. La translation fut douloureusement interrompue par la mort d’Oza. Frappé de crainte par ce tragique événement, David fit déposer l’arche dans la maison d’Obédédom. Ayant appris, au bout de trois mois, que la bénédiction divine était venue avec l’arche dans cette maison, il reprit son projet primitif, et introduisit solennellement et au milieu des réjouissances publiques l’arche à Sion. Lui-même, vêtu d’un éphod de lin, comme un lévite, dansait et menait le chœur devant le Seigneur. Cet acte de piété et d’humilité lui attira le

mépris et les reproches de Michol. David répondit qu’en s’humiliant devant Dieu, qui l’avait préféré à Saùl, il paraissait plus glorieux aux yeux de son peuple. II Reg., vi, 1-23 ; I Par., xiii, 1-14 ; xv, 1-29 ; xvi, 1-43. Clair, Les livres des Bois, Pans, 1884, t. ii, p. 38-39. Voir Danse, t. ii, col. 1288. David conçut alors le dessein de bâtir un temple au Seigneur ; mais Jéhovah lui fit dire par le prophète Nathan que cet honneur était réservé à son fils et successeur, et, pour récompenser sa piété, il lui promit que son règne serait éternel. David en remercia Dieu et le pria avec ferveur de réaliser ses promesses. II Reg., vu, 1-29 ; I Par., xvii, 1-27. Voir t. i, col. 920-921.

3° Conquêtes de David. — Dieu donna la victoire aux armées de David. Le roi battit de nouveau les Philistins et leur imposa le tribut ; il défit les Moabites, et, selon l’inexorable loi de la guerre de ce temps, il fit périr les deux tiers des prisonniers. Il triompha aussi d’Adarézer, roi de Soba, et des Syriens, qui étaient venus à son secours. Voir t. i, col. 211-213. Le roi d’Énlath lui envoya des présents, qui furent consacrés au Seigneur avec les dépouilles prises sur l’ennemi dans les guerres précédentes. David remporta encore une grande victoire dans la vallée des Salines et conquit l’Idumée. Il fut dès lors un roi très puissant, et sa cour comptait un grand nombre d’officiers. II Reg., viii, 1-18. Il n’oublia pas dans sa prospérité la famille du malheureux Saùl ; il fit venir à Jérusalem Miphiboseth, fils de Jonathas, l’admit à sa table et chargea Siba d’administrer ses biens. II Reg., ix, 1-13 ;

I Par., xviii, 1-17. La guerre reprit bientôt. Le nouveau roi des Ammonites vit des espions dans les députés que David lui adressait, et il les renvoya avec déshonneur. Pour venger cet affront, David dirigea toutes ses troupes contre les Ammonites et leurs alliés. Une première victoire fut remportée par Joab. Les Syriens ayant repris l’offensive, David lui-même les tailla en pièces. Ils se soumirent aux conditions de paix qui leur furent imposées et renoncèrent à secourir désormais les Ammonites.

II Reg., x, 1-19 ; I Par., xix, 1-19. Voir t. i, col. 496.

4° Chute de David, son repentir et son expiation. — L’année suivante, le roi envoya Joab attaquer les Ammonites. Pendant que l’armée assiégeait Rabba, David, livré à l’inaction dans Jérusalem, tomba dans la faute la plus grave de sa vie et devint adultère et homicide. Bethsabée fut séduite ; Urie, son époux, fut exposé au péril et lâchement abandonné. Le coupable se consola facilement da la défaite infligée à son armée, et, le temps du deuil écoulé, il épousa Bethsabée. II Reg., xi, 1-27. Voir t. i, col. 1712-1713. Par ordre du Seigneur justement irrité, Nathan, dans un ingénieux apologue, fit comprendre avec fermeté et prudence sa faute à David, et lui en annonça la punition : le glaive ne devait plus sortir de sa maison. Atteint par sa propre sentence, David n’excuse ni ne diminue son crime ; il le confesse humblement et s’écrie : « J’ai péché contre le Seigneur. » Son repentir est si sincère, que Dieu accorde aussitôt le pardon, tout en exigeant l’expiation de la faute. David accepte le châtiment qu’il a mérité, et par sa pénitence devient le modèle des pécheurs repentants. F. Vigouroux, Manuel biblique, 9e édit., t. ii, p. 118119 ; Les Livres Saints et la critique rationaliste, 1™ édit., t. iv, p. 82-84. L’enfant adultérin mourut ; mais Bethsabée donna le jour à Salomon, que le Seigneur aima. Cependant la guerre avec Ammon continuait. Pour la terminer, David assembla tout le peuple et marcha en personne contre Rabba, qu’il prit après quelques combats. Il traita cruellement les vaincus. II Reg., xii, 1-31 ; I Par., xx, 1-3. Ces cruautés, qui nous font horreur et qu’il ne faut point atténuer à l’exemple de Danz, De mitigata David in Ammonitas crudelitate, Iéna, 1710, s’expliquent suffisamment, sans s’excuser, par les mœurs barbares de l’époque. D’ailleurs, David, qui peut- être cédait à la pression de ses farouches soldats, appliquait aux Ammonites la peine du talion. Leur roi, Naas, répondait aux habitants de Jabès-Galaad que