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DAPHNÉ — DARIQUE


l’Oronte. Un chemin pratiqué au flanc de la montagne y conduisait, bordé de gracieux édifices, maisons privées, jardins publics, sanctuaires, lieux de réjouissances. Ce site délicieux s’appelle aujourd’hui Beit el-Mâ, « la maison de l’eau. » Il a, comme beaucoup de localités orientales, perdu de sa fraicheur et de ses charmes d’autrefois ; mais il en a assez gardé pour laisser entrevoir les ressources que la nature offrait là à la main et à l’imagination de l’homme. Le laurier, l’arbre sacré dont Phébus Testa épris, y croit en vastes massifs, des bouquets de fleurs aux vives couleurs parfument l’air ; çà et là quelques roses rappellent celles qui avaient lait donner à une partie de la route le nom de Rhodion. Quelques vieux cyprès représentent ceux qui entouraient jadis le téménos d’Apollon. Tels sont les vestiges de ces bosquets ou bois sacrés dans lesquels un culte immoral amollit et souilla tant de générations. Nulle trace de la ville elle-même, de ses thermes, de ses théâtres, des temples d’Isis, de Diane et de Vénus, du stade où se célébraient les jeux olympiques. Cf. E. Le Camus, Notre voyage aux pays bibliques, Paris, 1890, t. iii, p. 03-66.

Et pourtant quel lieu de plaisance, quel pèlerinage fréquenté fut longtemps Daphné ! Son origine, comme celle d’Antioche, remonte à Séleucus Nicator, qui y localisa, dans un but de vaine gloire, des traditions mythologiques écloses ailleurs, les fables d’Apollon et de Daphné métamorphosée en laurier. Il bâtit, au milieu d’un bois de lauriers et de cyprès, un magnifique temple à Apollon. La cella, entre deux portiques, était ornée de marbres précieux et de bois rares habilement sculptés ; elle renfermait la statue colossale du dieu, chef-d’œuvre de Bryaxis d’Athènes. Plus tard, Antiochus Épiphane associa à ce culte celui de Jupiter, dont il plaça dans le sanctuaire la statue d’ivoire et d’or, également colossale, rappelant celle de Phidias à Olympie. Les cortèges sacrés, partant d’Antioche, se rendaient au temple, et la foule se répandait partout où bains, théâtres, jardins, fontaines, la conviaient à tous les plaisirs, à toutes les débauches. La célébrité de Daphné continua sous les Romains, de Pompée à Constantin, et les Daphnici mores passèrent en proverbe. Elle commença à décliner sous Julien l’Apostat, après la mort duquel autels et idoles furent jetés à terre, et des sanctuaires chrétiens, aujourd’hui également disparus, remplacèrent les temples païens.

Josèphe, qui ne donne pas sur la mort d’Onias le récit biblique, Ant.jud., XII, v, 1, a gardé le souvenir d’autres événements relatifs à l’histoire juive, qui se passèrent à Daphné. C’est là qu’Antoine reçut la députation composée de cent membres, choisis parmi les personnages les plus puissants et les plus éloquents de la nation, qui venait renouveler des accusations contre Hérode et ses partisans. Après avoir écouté les parties et demandé l’avis de Hyrcan, qui fut favorable aux fils d’Antipater, il donna à Phasaël et à Hérode le titre de tétrarques, et par un décret en forme leur confia l’administration de la Judée. Quant à leurs adversaires, il en jeta quinze en prison, et il s’apprêtait à les faire conduire au supplice, lorsque Hérode intercéda pour eux et obtint leur grâce. Ant. jud., XIV, xiii, 1 ; Bell, jud., i, XII, 5, 6. C’est aussi à Daphné que ce dernier apprit la mort de son frère Joseph, qui s’était imprudemment lancé, avec six cohortes, sur Jéricho, dont il voulait enlever les moissons. Ant. jud., XIV, xv, 11 ; Bell, jud., i, xvii, 1, 3. Voir Antioche

de Syrie, t. i, col. 676.

A. Legendre.
    1. DAPHNIS##

DAPHNIS, nom qui ne se trouve que dans la Vulgate, Num., xxxiv, 11, et désigne une « fontaine » (hébreu : lâ’âyin, avec la préposition et l’article ; Septante : étc 7T7|Yâ ; , * aux sources » ) près de laquelle était située Rébla, une des villes frontières de la Terre Sainte, du côté de l’orient. L’absence du mot dans le texte original et dans les versions anciennes montre qu’il y a eu ici interpolation. Plusieurs manuscrits même de la Vulgate

omettent Daphnim. On*croit généralement que c’est une glose empruntée aux commentaires de saint Jérôme, qui, identifiant Rébla avec Antioche de Syrie, en concluait naturellement que la fontaine en question était celle de Daphné, à quarante stades ou huit kilomètres de la grande cité. Comment, in Ezech., t. xxv, col. 478. Voir Daphné. Un copiste aura plus tard introduit dans le texte ce qui n’était qu’une explication, et une explication erronée, car la Terre Sainte ne s’étendit jamais si loin. Cf. C. Vercellone, Variai lectiones Vulgalse lat’mse, Rome, 1860, t. i, p. 475. —Josèphe, Bell, jud., IV, i, 1, signale bien au-dessus du lac Semechonitis ou Mérom un lieu appelé Daphné, Aâçvi), « endroit délicieux sous beaucoup de rapports et abondant en sources qui alimentent du tribut de leurs eaux ce que l’on appelle le petit Jourdain, au-dessous du temple de la génisse d’or, puis aboutissent au grand. » C’est aujourd’hui Tell Difnéh, situé à trois petits quarts d’heure de marche au sud de Tell el-Qadi, l’ancienne ville de Dan, où Jéroboam fit placer un veau d’or. Voir Dan 3. Cette dénomination, qui a bien une apparence grecque, peut dériver soit des lauriers - roses (en grec Sï^/vt)) dont sont bordés, en beaucoup d’endroits, les divers bras du Nahr Leddan et les ruisseaux qui en découlent, soit d’un ancien culte en l’honneur d’Apollon et de la nymphe Daphné, culte qui aurait jadis fleuri dans la contrée. Cf. V. Guérin, Galilée, t. ii, p. 342. Sans l’origine probable de l’interpolation et l’interprétation formelle de saint Jérôme qui s’applique à une autre Daphné, on pourrait croire que’la Vulgate a voulu déterminer ici « la source » du Jourdain dont se rapprochait la frontière orientale de la Terre Promise. Voir Aïn 3, t. i, col. 316. Mais il y a dans le tracé de ces limites de nombreuses difficultés qui ne sont pas encore résolues. Cf. Van Kasteren, La frontière septentrionale de la Terre Promise, dans le Compte rendu du 3’congrès scientifique international des catholiques, 2e section, Bruxelles, 1895, p. 132-134, ou dans la Revue biblique, Paris, 1895, p. 31-34.

A. Legendre.

DARA (hébreu : Dârâ ; Septante : AapâS ; Codex Alexandrinus : Aapâ), cinquième et dernier fils de Zara, de la tribu de Juda. I Par., ii, 6. Plusieurs manuscrits hébreux ont Darda, et ainsi ont lu le Targum, la Peschito et l’arabe : c’est vraisemblablement la bonne leçon.

    1. DARCON##

DARCON ( hébreu : Darkôn ; Septante : Aotpxtiv, Aopxwv), chef de Nathinéens qui revinrent de la captivité de Babylone avec Zorobabel. II Esdr., vii, 58. La Vulgate l’appelle Dercon. I Esdr., ii, 56.

DARDAR. Mot hébreu rendu dans la Vulgate par tribulus. Voir Centaurée.

DARIQUE. Hébreu : ’adarkemôn, darkemôn ; Septante : xP u< k>0ç, v6[iidjii ypiioiov, v6|iia|ia -/pyoou, [ivi ; Vulgate : solidus, drachma.

I. Description. — La darique fut créée par Darius 1°, fils d’Hystaspe, après qu’il eut organisé son empire en satrapies, auxquelles il imposa un tribut en or et en argent, Hérodote, III, 89 ; la monnaie nouvelle fut destinée à en faciliter le payement. Le nom complet de cette monnaie est (rraxrip Sotpeixôç, statère darique, et par abréviation, darique ( fig. 476). La darique était en or, Hérodote, IV, 166 ; Etymologicutn magnum, au mot Aapcixôç ; le monnayage de l’or était, en effet, réservé au souverain. Cet usage fut conservé par Alexandre et par les empereurs romains. — L’or de la darique, dit Hérodote, iv, 166, était très pur. L’analyse chimique n’y trouve que 3 °/ d’alliage. B. Head, The Coinage of Lydia and Persia, in-4°, Londres, 1877, p. 25. Ce fut évidemment là, avec la constance du poids, la cause de l’emploi universel de la darique dans le monde grec comme dans le royaume des Perses. Hérodote, vii, 28, 29 ; Thucydide, vnr, 28 ; Aristophane, Ecclesiaz., 602 ; Corpus inscript, greec., n° 1511 ; Lebas et "Waddington,