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DANIEL (LE LIVRE DE)


controversé. Voici une première série de sujets, mêlés à d’autres qui proviennent des protocanoniques : — Dans un verre à fond d’or du musée Kircher, les trois enfants dans la fournaise, les mains levées comme s’ils priaient, la tiare flottant au vent, comme pour rappeler ce verset : « Il envoya un vent, » etc. Dan., iii, 26 (R. Garrucci, Vetri ornati di figure in oro. Tavole. Roma, 1864, tav. i, ꝟ. 1). Dans deux Fragments de la patène de Cologne, un Daniel qui prie et un de ses lions, puis un des trois enfants avec sa mitre flottante (P. Allard, Rome souterraine, Paris, 177, p. 422). Voir aussi pi. xrx, p. 437 et 439, et Canon, col. 158, 159. La série des sujets isolés est plus considérable. — 1. Les trois jeunes Hébreux. — Un de ces jeunes gens sur un sarcophage du cimetière de Callixte, — le groupe tout entier, et en outre, par derrière, comme un ange ailé sur un arcosolium du même cimetière, — le même avec un ange en dehors sur un sarcophage du Vatican, — le même sur un ivoire du Ve siècle, — un ange au-dessus des trois enfants dont l’un, à droite, touche d’un instrument, Azarias sans doute, sur une très belle lampe d’Afrique (R. Garrucci, Vetri, tav. iii, fig. 8, 9, 11). Voir col. 156. — 2. Susanne.^ On la voit debout, voilée, entre deux vieillards lui parlant avec feu, sur trois sarcophages d’Italie, — la même sur des sarcophages du midi de la Gaule, avec cette différence que l’un d’eux représente deux arbres derrière lesquels les vieillards aux yeux ardents se dissimulent, et l’autre reproduit en plus un serpent enroulé autour d’un arbre qui cherche à atteindre, au sommet, un nid de colombes, — une brebis sur une colline entre un léopard et un loup, peinture symbolique très belle et très simple du cimetière de Callixte. Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, Paris, 1877, p. 447. — 3. Bel et le dragon. — Dans un bas-relief de sarcophage (me siècle), un autel, un arbre avec un serpent lové derrière l’autel, et devant lui Daniel donnant au serpent le gâteau qu’il a pétri, — le même, sur un sarcophage de Vérone, — le même, avec, auprès de Daniel, une autre figure (le Sauveur ?), qui lui communique son pouvoir. Garrucci, Vetri, tav. iii, fig. 13. Texte p. 38. — Sur une tombe de Brescia, le ciel figuré par sept étoiles, d’entre lesquelles sort une main tenant, par la tête, Habacuc avec sa corbeille de pains. U. Ubaldi, Introductio in S. Script., Rome, 1878, ii, p. 391, 395 (avec les planches), etc. De tout cela il ressort que le livre de Daniel et ses Additions était très connu dans cette période, et qu’il était connu et reçu comme inspiré et canonique, car c’est une doctrine affirmée par les théologiens, que, dans les travaux de ce genre, les premiers artistes chrétiens ne devaient s’inspirer que des Livres Saints universellement admis, ce qui du reste est confirmé par le voisinage de sujets exclusivement bibliques, et tirés des protocanoniques, mêlés à ceux que nous venons de décrire. Voir P. Allard, Rome, p. 357, cf. p. 285, 286, 369. Nul doute que ces Additions et le livre entier, comme l’entendent les conciles de Florence et de Trente, ne soient inspirés et canoniques.

VII. Texte du livre de Daniel. — 1° Texte original.

— Le texte primitif, que nous possédons encore, est en mauvais état, surtout la partie chaldéenne : aucun livre peut-être de la Bible hébraïque n’est aussi corrompu. Le nombre considérable des variantes placées en marge ou au bas des éditions imprimées en est la preuve. J.-B. de Rossi en a relevé plus d’une centaine dans ses Variée Lectiones Veteris Testamenti, Parme, 1788, t. iv, p. 139 et suiv., et il en est une foule d’autres qu’il n’a pas notées. Cf. S. Bær, Libri Danielis, Esdrae et Nehemiee, Leipzig, 1882, p. 62-85, et à la marge inférieure du texte. Ce sont en général des mots ajoutés, omis, altérés, des lettres tombées, changées, transposées, surtout des différences d’écriture et d’accent. En voici quelques exemples : mizzéra’pour ûmizzéra’, 1, 3 ; min kol pour min, i, 15 ; upiSerêh (ejus) pour ûpiserâ’[et interprelatio), ii, 4-5, y, 17 ; ûbe’ah pour iïbe’â', H 16 ; kol medinôt pour kol

medinat, ii, 48, et souvent’ad dî pour’al di, iii, 19 ; beSa’âh pour keSd’âh, iv, 16 ; Savîiv pour savii, v, 21 ; veliMar pour velistar, vii, 5 ; lehagîd lekd pour lehagid, IX, 23 ; lekalah (ad consumendum) pour lekalê’( ad cohibendum), IX, 24 ; ûlehatam (et ad finienda) pour ûlehâtêm (et ad sigillanda), ix, 24 ; hattat pour hatlâ’ôt, ix, 24 ; môlsd’(exilum) pour min môlsd’(ab exitu), IX, 25 ; mesîah nâgid (unctus ducis) pour mâsia/i nâgîd (unctus dux), ix, 25 ; seba’îm Sdnâh pour Sabu’ûn sibe’âh, ix, 25 ; ’dm (populus) pour’am nâgid (populus ducis), ix, 25 ; iSl.têt pour iâshît (destruet), ix, 20 ; ’im (cum) pour’am (populus), ix, 26 ; ve’ad (et usque) pour ve’al (et super), ix, 27 ; ’at (tcmpus) pour qêls (finem), ix, 26 ; ubeheikol ieheiêh siqûls (et in lemplo erit abominalio) pour ve’al kenaf siqûtsîm (et super alam abominâtionum). Cf. J.-B. de Rossi, Variée lectiones, p. 147, etc. Aucune de ces variantes n’affecte, on le voit, la substance du livre. Toutes portent sur les accidents et la forme. — On a très peu fait pour améliorer à cet égard le texte primitif. J. Norzi est le premier, je crois, qui ait essayé une correction critique dans son commentaire intitulé : Minhat Saî, Mantoue, 1742. Récemment, ce travail de révision a été repris par S. Bær, qui s’est aidé de manuscrits que ne connut pas J. Norzi. Voir S. Bær, Libri Danielis, p. i-vr. Son édition, plus parfaite certainement, ne saurait être définitive. Du resle, elle ne vise qu’à donner le texte massorétique. On pourrait élargir la base de reconstitution du premier texte. Il y aurait avantage à y faire figurer les anciennes versions immédiates trop négligées. On aurait par là, non pas toujours sans doute la leçon massorétique, mais souvent le texte vraiment original. Exemples : au lieu de USelêvelâke (tranquillitati tuse) on aura lesâlevâ(âke (peccatis tuis), IV, 24, que donnent quatre manuscrits de Théodotion, la peschito, la Vulgate (delictis tuis) ; au lieu de savi, on aura sovi, Théod. (èSôSrj), la peschito, Vulgate (position est), etc. Kaulen, op. cit., p. 402. Disons enfin que Hermann L. Strack vient de publier le texte araméen de Daniel, en prenant pour base celui de S. Bær. Il l’a modifié et corrigé, mais légèrement ; il a utilisé des manuscrits, dont il fait la description. Abriss des Biblischen Aramaïsch, Leipzig, 1896. Texte : Liber Danielis, ii-vii, p. 9* -29*. Voir aussi A. Kamphausen, The Book of Daniel, À critical édition of the Hebrew and Aramaic text printed in colors exhibiting the bilingual characler of the BoOk, Leipzig, 1896. — Le texte grec des Additions a suivi le sort du texte des Septante.

2° Versions. — Les versions immédiates du livre sont : les Septante, la version de Théodotion, la peschito et la Vulgate hiéronymienne, moins les Additions traduites de Théodotion. Les versions dérivées sont : l’italique (Muenter, Fragmenta vers, antiq. lat. antehier. Prophétie Danielis, Copenhague, 1819), la syro-hexaplaire de Paul de Tela, qui date de 617, du reste très fidèle, presque servile, la philoxénieniie revue en 616 par Thomas de Markel, les égyptiennes, sahidique et memphitique, Muenter, Spécimen versionum Danielis copticarum, Rome, 1786 ; P. Ciasca, Sacr. Bibl. fragmenta copto-sahidica Mus. Borg., II Rome, 1889 (Daniel, p. 306-324) ; Tattam, Prophète majores, Londres, 1852 (Daniel, t. ii, p. 270 suiv.), l’éthiopienne, l’arménienne et la géorgique, la slavonne et l’arabe. Toutes, excepté la seconde et la troisième, sont faites sur Théodotion, disent les uns. Selon d’autres, elles descendraient des Septante. A. Bludau, De Alexandrinæ Interp. libri Danielis indole critica, Munster, 1891, p. 31, 32. Quoi qu’il en soit de leur origine, elles sont d’une médiocre utilité. Ajoutez que plusieurs n’ont pas encore été imprimées. Il en est autrement des versions immédiates. Ne parlons pas de la peschito et de la Vulgate. La version de Théodotion, faite plus probablement vers l’an 120 ou 130, suit les Septante d’assez près, mais en les corrigeant sur l’original : elle donne le sens plus qu’elle ne rend les mots (S. Jérôme,