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COROZAIN — CORPS HUMAIN


le nnmbre deux milles de saint Jérôme comme la leçon authentique. Ils appuient leurs conclusions sur les raisons suivantes : 1° Eusèbe, ainsi que saint Jérôme, place Corozaïn « en Galilée », conséquemment en deçà, c’est-à-dire à l’ouest du Jourdain ; 2° Capharnaûm devant être identifié avec Tell-Houm, le nombre douze, trop considérable de trois milles de Tell-Houm à Kersa, ne peut être qu’une erreur ; 3° Kersa étant, au vn> siècle, habité par des chrétiens, qui y avaient une église, devait l’être déjà au IVe siècle, et ainsi ne peut être la Corozaïn « déserte » d’Eusèbe et de saint Jérôme ; 4° si Kefar-’Ahim est une erreur pour Kefar-Nahuin, d’après les Talmuds, Corozaïn était voisine de Capharnaûm ; 5° à la distance de trois kilomètres au nord de Tell-Houm, c’est-à-dire de deux milles, comme dit saint Jérôme, on rencontre les ruines appelées Khirbet Kérazéh, dont le nom est beaucoup plus semblable à Corozaïn (Korazim) que Qersa’, prononcé Guérsa par les Bédouins. Si saint Jérôme place Corozaïn in litlore, il ne faut pas prendre sans doute cette parole dans sa signification stricte, mais dans le sens : « aux alentours du lac ; » c’est du reste ainsi que Procope de Gaza, Comment, in Isa., iv, 1-7, t. lxxxvii, part. 2, col. 2000, la traduit : nsp’i rjv XcjjOT|V [TevvrioapÎTT )v]e ! ai xil xio[j.ai Kacpapvaoùn, xsù Br, 6 ?xïSà, xai /) XospîaÇst. Voir Christ. Cellarius, Notitia orbis antiqui, in-4°, Leipzig, ’1706, t. ii, p. 492 ; Hadr. Iteland, Palsestina, Utrecht, 1714, t. ii, p. 121 ; Sepp, Das Leben Jesu Christi, t. ii, part. 2, p. 261-268 ; Victor Guérin, Galilée, in-4°, Paris, 1880, t. i, p. 241-247 ; Armstrong, Wilson et Conder, Names and places in the New Testament, in-8°, Londres, 1888, p. 8.

III. Description. — Les ruines de Kérazéh (fig. 355) se trouvent à trois kilomètres et demi au nord de Tell-Houm et à six kilomètres et demi ail nord-est du Khan-Miniéh. Elles couvrent un assez vaste plateau s’étendant à la lisière sud de l’ouadi Kérazéh, au haut des collines qui dominent au nord le lac de Gériésareth. Les habitations de la ville étaient généralement petites, mesurant au plus dix mètres de côté et bâties, comme celles de Tell-Houm, en basalte. Quelques-unes d’entre elles sont encore à moitié debout ; les Bédouins Samakieh viennent s’y installer lorsqu’ils ensemencent les champs voisins ou enlèvent les moissons. Parmi les ruines on remarque les restes d’un édifice d’environ trente mètres de longueur sur vingt-cinq de largeur. Ses murs sont épais et formés de gros blocs. Il semble avoir servi de forteresse. Non loin on rencontre les débris beaucoup plus remarquables d’un autre édifice. « Ce sont celles, dit Victor Guérin, Galilée, t. i, p. 241, d’une ancienne synagogue. Tournée du sud au nord, elle avait été construite avec de beaux blocs basaltiques très régulièrement taillés. Sa longueur était de vingt-neuf pas et sa largeur de dix-neuf. Vers le milieu de sa façade méridionale, un magnifique linteau gisant à terre et long de 2 m 45 est orné de moulures à crossettes élégamment exécutées. Il couronnait jadis des pieds-droits monolithes, qui ont été complètement brisés. Non loin de ce linteau gisent également trois superbes blocs, creusés en forme de conques marines et couverts de gracieuses sculptures figurant des grappes de raisin, des fleurs et des fruits divers. Ces jolies coquilles décoraient probablement la voûte d’une arcade placée au-dessus de la porte principale d’entrée. Le sol, dans l’intérieur de l’enceinte, est jonché de tronçons mutilés de colonnes, de chapiteaux affectant la forme d’un ionique particulier et de bases faisant corps avec leurs piédestaux, le tout dans un affreux chaos. Une demi-colonne adossée à un pilier carré devait, comme dans les autres synagogues anciennes de Palestine, terminer l’extrémité septentrionale de l’une des rangées de colonnes. » À cinq pas, au nord-est de la synagogue, jaillit dans un petit bassin circulaire une fontaine assez abondante ; elle est appelée Blr Kérazéh ; ses eaux en s’écoulant forment un petit ruisseau qui descend dans la vallée voisine. — La plupart des critiques

modernes reconnaissent Corozaïn dans Kérazéh. Si cette identification n’est pas absolument certaine, elle parait du moins de beaucoup la plus probable. L. Heidet.

CORPS HUMAIN. — I. Dans les litres hébreux.

— Hébreu : ’vl, « ce qui est fort, » Ps. lxxiii [hébreu], 4 ; bâsàr, « la chair, » prise quelquefois pour le corps tout entier, par opposition avec néfés, « âme, » Is., x, 18 ; Job, xiv, 22 ; Prov., xiv, 30 ; Eccle., ii, 3 ; v, 5 (voir Chair, pour un certain nombre de textes dans lesquels se confondent les deux idées de chair et dé corps) ; gêvâh, « le dos, » pris pour le corps entier. C’est ce mot qui désigne habituellement le corps en hébreu ; geviyâh, de la même racine que le précédent ; gûfàh, « ce qui est creux, » le cadavre, I Par., x, 12 ; cf. I Reg., xxxi, 12 ; lehûm, la chair, le corps, Soph., i, 17 ; ’ésém, « ce qui est solide, » Lam., IV, 7, et’ôsém, Ps. cxxxix [hébreu], 15. Chaldéen : gésém ; Septante : amii.% ; Vulgate : corpus, cadaver.

Moïse raconte comment Dieu fit le corps de l’homme de la « poussière du sol ». Gen., ii, 7. Voir Adam, t. i, col. 171. Il y a trois remarques à faire sur ce texte : 1° Le corps de l’homme fut formé avant son âme ; mais cette antériorité n’implique aucune supériorité. Cf. Sap., xv, 10, 11. Elle indique plutôt la distinction absolue qui existe entre les deux parties du composé humain. — 2° Le corps de l’homme fut fait de la poussière du sol, comme pour réunir en lui les éléments composants de l’univers et devenir ainsi une sorte de microcosme. Cette poussière était dé couleur rouge, d’où le nom d’Adam, c’est-à-dire « rouge », donné au premier homme. Jérémie, Lam., iv, 7, parle des princes de Jérusalem qui étaient « rouges de corps plus que les coraux », c’est-à-dire très beaux. Cf. Gant., v, 10. Les versions traduisent fautivement le texte de Jérémie par « plus rouges que l’ivoire antique ». — 3° Dieu intervient extraordinairement pour former le corps de l’homme ; mais il n’en fait encore qu’une sorte de statue inanimée, dont l’âme, par sa présence, fera un organisme vivant. Cf. Delitzsch, System der biblischen Psychologie, 2e édit., Leipzig, 1861, p. 74. En racontant cette intervention positive de Dieu pour la création de l’homme, Moïse établit nettement que ce nouvel être ne procède pas des animaux antérieurs par transformisme. Cette vérité est absolument incontestable en ce qui concerne l’âme. Le récit biblique constitue une très forte présomption, voisine de la certitude, en faveur de la création directe du corps du premier homme par Dieu lui-même. Pour qu’on puisse soumettre aux lois de l’évolution l’apparition du premier corps humain, il faudrait que le système transformiste eut à sa disposition des preuves scientifiques qui lui font défaut. Le texte de la Genèse, ii, 7, doit donc être interprété littéralement, même en ce qui concerne la création du corps de l’homme par un acte positif de la puissance divine. Il faut se garder toutefois d’affirmer la nécessité de cette intervention, en ce qui concerne le corps, d’une manière aussi absolue que quand il s’agit de la création de l’âme. Voir Adam (paléontologie), t. i, col. 181. Sans intervenir directement comme au premier jour, Dieu préside à la formation du corps de chaque homme. Ps. cxxxviii, 15, 16. Cf. Sap., vu, 1, 2. — Dans les livres hébreux, il est question du corps frappé de coups pour le bien de l’âme, Prov., x, 13 ; xix, 29 ; xxvi, 3 ; foulé aux pieds, Is., li, 23 ; réduit en esclavage, II Esdr., ix, 37 ; percé par le glaive, Job, xx, 25 (dans ce passage, gêvâh est traduit à tort par vagina, « fourreau » ) ; mis à mort, Nah., iii, 3 ; enfin à l’état de cadavre. I Reg., xxxi, 12 ; Ps. ex (hébreu), 6. Isaïe, L, 6, parle du corps du Messie offert au supplice. Ézéchiel, I, 11, 23, et Daniel, x, 6, attribuent des corps aux êtres symboliques qui leur apparaissent. Les frères de Joseph ne possèdent plus que « leurs corps et leurs terres » stériles, et par conséquent sont réduits à la dernière extrémité. Gen., xlvii, 18. L’expression « jeter der-