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CORAIL — CORBEAU


larges mailles, et les laissent traîner au fond de l’eau. Ces filets accrochent les polypiers, et, à force de manœuvres et de rudes efforts, les pécheurs finissent par briser quelques branches coralliennes qu’ils remontent dans leur barque. Ils les dégagent ensuite de leur écorce et portent le corail aux marchés du voisinage. Cette pêche se pratique aujourd’hui dans la Méditerranée, particulièrement sur les côtes de Provence, d’Italie, de Sicile, de Tunisie et d’Algérie.

II. Le corail dans la Bible. — 1° Les râ’môt. — Ce nom donné au corail en hébreu paraît tirer son étymologie de râ’am ou rûm, « être élevé, » probablement avec le sens dérivé de <£ ressembler à un arbre » et « être arborescent ». La forme plurielle de râ’môt indique d’ailleurs quelque chose de composé ou de collectif. Carey, dans Frz. Delitzsch, Das Buch lob, Leipzig, 1876, p. 371, fait venir ce mot de rëlm, « aurochs, » en alléguant que les ramifications du corail rappellent les cornes de l’aurochs. Pline, H. N., xiii, 51, se sert de la même comparaison à propos de plantes pétrifiées. Cette étymologie, que plusieurs auteurs ont admise, est plus spécieuse que solide. La comparaison du polypier avec un arbuste est beaucoup plus naturelle, et elle a dû s’imposer d’autant plus aisément, que les anciens prenaient cet objet pour un végétal. Gesenius, Thésaurus, p. 1249, rapproche râ’môt du sanscrit ramye, « chose agréable. » Il se pourrait aussi que ce nom ait été apporté aux Hébreux de l’étranger, comme le corail lui-même. L’auteur de Job, xxviii, 18, dit en parlant de la sagesse :

Le corail et le cristal ne lui sont pas comparables,

Et la possession de la sagesse vaut mieux que les perles.

Les versions prennent ici râ’môt dans le sens de « météores, choses élevées ». Le Targum traduit par sandalkin, « sandaraque, » substance qui rappelle au moins le corail par sa couleur rouge. On lit aussi dans les Proverbes, xxiv, 7 :

La sagesse est râ’môt pour le sot,

Et il n’ouvrira pas la bouche à la porte.

La Vulgate traduit : « La sagesse est chose élevée pour le sot, » c’est-à-dire au-dessus de sa portée ; il est par conséquent incapable d’ouvrir la bouche à la porte de la ville où se traitent les affaires. Ce sens peut très bien être adopté. Il est également possible de traduire : « La sagesse est du corail pour le sot ; » c’est une parure d’emprunt, purement extérieure, dont il ne sait pas tirer parti quand il faut parler en public. Enfin Ézéchiel, xxvii, 16, range le corail parmi les objets de trafic que les Syriens apportaient à Tyr ou en exportaient. Les caravanes syriennes transportaient chez les Phéniciens, qui le montaient en colliers et en parures, le corail péché par les bateaux babyloniens dans la mer Rouge et jusque dans l’océan Indien, en même temps que les perles. Les Hébreux ne semblent pas avoir fait grand usage du corail, rarement nommé par les auteurs sacrés. C’est ce qui fait que les versions n’ont pas saisi le sens du mot râ’môt. Dans le passage d’Ézéchiel, les traducteurs grecs se contentent de reproduire le mot hébreu en lettres de leur alphabet, tandis que la Vulgate le traduit par « soie ».

2° Les penînîm. — Gesenius, Thésaurus, p. 1113, donne à ce mot le sens de « corail rouge ». Job, xxviii, 18 ; Prov., iii, 15 (qeri) ; viii, II, xx ; 15 ; xxxi, 10 ; Lam., IV, 7. Il justifie cette traduction en rattachant le mot à la racine pânan, qui désigne en arabe le « rameau », et en hébreu la « partie supérieure ». Il s’appuie surtout sur le passage où Jérémie, Lam., iv, 7, dit que les princes de Jérusalem étaient « plus blancs que le lait et plus rouges de corps que les peninim ». Mais les versions traduisent toujours ce mot par « perles. », et c’est le sens que lui revendiquent Bochart, Hierozoicon, Leipzig, 1793, t. iii, p. 619 ; fiosenmûller, Scholia, Ieremia, Leipzig, 1827,

t. ii, p. 586-588, et la plupart des commentateurs. Voir Perles. Dans la Bible, les perles sont toujours rangées parmi les choses les plus précieuses, tandis que le corail est plus commun, a par conséquent moins de prix, et, dans le passage de Job, est mis sur le même rang que le cristal. Quant au passage des Lamentations, il doit certainement être entendu dans un sens atténué. Les princes n’étaient évidemment ni rouges ni blancs, mais d’une teinte rosée qui tenait à la fois des deux couleurs, et rappelait celle de certaines perles. Une expression analogue se lit dans le Cantique des cantiques, v, 10, et dans Homère, lliad., iv, 141-146. Cf. Frz. Delitzsch, Dos Buch

lob, p. 370.

H. Lesêtre.
    1. CORBAN##

CORBAN (xopSSv), mot hébreu et araméen, qorbân, employé par saint Marc, vii, 11, reproduisant un discours de Notre-Seigneur. L’évangéliste nous apprend lui-même qu’il signifie « don », Sûpov. Josèphe l’explique par le même mot grec. Ant.jud., IV, iv, 4. Saint Matthieu, xv, 5, emploie Sûpov, munus, dans le passage parallèle à saint Marc. Dans l’Ancien Testament, l’hébreu qorbân désigne les offrandes et les sacrifices sanglants et non sanglants, et les Septante le traduisent toujours par Sûpov. Dans le Nouveau Testament, corban signifie aussi un don, une offrande faite à Dieu, mais un don d’une espèce particulière. La loi mosaïque avait déterminé, Lev., xxvii, 2-23 ; Num., xxx, 3-16, la manière dont on devait accomplir les vœux ; la tradition juive, Matth., xv, 3, 6 ; Marc, vii, 13, prétendait qu’on pouvait s’interdire par vœu, non seulement de se servir pour son propre usage, mais aussi de donner à autrui ou de recevoir pour lui un objet quelconque, aliment, vêtement, etc. L’objet qu’on s’était ainsi interdit s’appelait corban, et, sous prétexte de corban, on pouvait refuser de fournir, même à ses parents, ce qui leur était nécessaire. Notre-Seigneur condamne cette interprétation et cette application abusive de la loi. Matth., xv, 3-9 ; Marc, vii, 9-13.

    1. CORBEAU##

CORBEAU (hébreu : ’ôrêb, de’âràb, « être noir ; » Septante : xdpal ; Vulgate : corvus), oiseau de l’ordre des passereaux conirostres et de la famille des corvidés

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339. — Le corbeau (.Corvus corax).

(fig. 339). Il a la taille d’une poule, le plumage généralement noir, le bec droit, conique et très fort, la queue ronde ou carrée, la vue et l’odorat très perçants. Il marche gravement, mais sautille quand il veut aller plus vite ou s’envoler. Son vol est élevé et soutenu. L’animal a une grande facilité à s’apprivoiser et même à se familiariser, bien qu’il demeure toujours défiant de caractère, turbulent et querelleur. Il pousse un cri rauque, appelé croassement. Il imite pourtant assez bien la parole. Le corbeau niche dans les arbres élevés, les rochers et les ruines. U a un appétit vorace, se nourrit de cadavres